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La numismatique égyptienne
à l'époque hellénistique et romaine
Les Égyptiens de l'époque pharaonique ne connaissaient pas l'usage de la monnaie. Ils échangeaient, dans leurs opérations commerciales, des lingots de métaux précieux, généralement forgés en forme d'anneaux, qu'ils appelaient outens. Des peintures égyptiennes (L'art égyptien) représentent des personnages occupés à peser des anneaux de ce genre qui ont été livrés en paiement de marchandises. Pareil usage régnait chez les Assyriens, les Hébreux et les autres anciens peuples de l'Orient. Ce sont les Perses qui introduisirent en Égypte l'usage de la monnaie (Basse époque). Le satrape d'Égypte sous Darius Ier et Xerxès, Aryandès, fut mis a mort, raconte Hérodote, pour avoir fabriqué des monnaies de meilleur aloi que celles du grand roi lui-même. Les monnaies d'argent frappées en Égypte par l'eunuque Bagoas, en 343, sous Artaxerxès Ochus, sont remarquables en ce qu'elles représentent sur une de leurs faces un Égyptien, en costume national, suivant le char du Roi des rois : les plus grandes de ces pièces sont des doubles sicles qui pèsent jusqu'à 28,40 g. Mais le véritable démarrage de l'usage de la monnaie en Egypte date de l'Epoque ptolémaïque.

Après la mort d'Alexandre le Grand, Ptolémée, gouverneur de l'Égypte au nom de Philippe Arrhidée et du jeune Alexandre IV, fit frapper des monnaies au nom et au type du conquérant défunt. Ce sont, notamment, de magnifiques tétradrachmes qui portent, au droit, la tête idéalisée d'Alexandre avec les cornes d'Ammon (pour l'orthographe  Oasis d'Ammon) et coiffée de la dépouille d'une tête d'éléphant. Au revers, on voit Zeus assis tenant l'aigle et le sceptre, ou bien Athéna Alkis debout, brandissant le foudre et se couvrant de son bouclier. Sur la plupart de ces remarquables pièces, on lit le nom d'Alexandre au génitif; mais quelques-unes portent ALEXANDREION PTOLEMAIOU, c.-à- d. Alexandreion de Ptolémée, ce mot Alexandreion étant le nom donné à cette espèce de monnaie. 

Devenu roi, Ptolémée Ier Sôter fit frapper des monnaies qui portent d'un côté son effigie, et de l'autre l'aigle sur un foudre, avec la légendeBASILWS  PTOLEMAIOU. Ces types se perpétuèrent, en concurrence avec quelques autres, sur la monnaie des Lagides jusqu'à l'établissement de la domination romaine, sans qu'il soit possible de répartir ces pièces entre les différents princes qui les ont fait frapper. Il en est de même des monnaies de bronze de tous modules qui portent au droit la tête de Zeus Ammon, et au revers, la même légende impersonnelle autour de l'aigle debout sur un foudre. Ces pièces égyptiennes sont peut-être les plus communes de la numismatique grecque, tant a été abondante leur émission. Les plus grandes sont d'énormes disques de bronze qui pèsent jusqu'à 80 grammes avec un diamètre de 45 millimètres.


Monnaie de bronze de l'Égypte sous les lagides.
(~Demie grandeur).

Parmi les autres types de la série des monnaies des rois lagides, il faut citer les grandes pièces d'or avec la légendeADELFWN  QEWN représentant d'un côté les têtes de Ptolémée Il Philadelphe et d'Arsinoé II, et de l'autre les têtes déifiées de Ptolémée Sôter et de Bérénice Ire. D'autres pièces d'or, qui font la joie des collectionneurs, représentent les effigies des rois et reines d'Égypte jusqu'à Ptolémée V Epiphane, époque où le monnayage de l'or disparaît dans la série égyptienne. Les monnaies d'argent de ces mêmes princes ne sont pas moins remarquables que les monnaies d'or. On en cite qui ont des dimensions inusitées, par exemple. un octodrachme de Bérénice II qui a un module de 35 millimètres et pèse près de 35 grammes. La plupart de ces magnifiques pièces d'or et d'argent ont, au revers, la corne ou la double corne d'abondance, type qui, avec l'aigle ou le double aigle, est exclusif sur les monnaies de la dynastie, jusqu'à Cléopâtre VII qui, sur ses monnaies d'argent et de bronze, associe l'effigie de Marc-Antoine à la sienne.

On a découvert en 1886 une petite monnaie de bronze portant, à côté de la tête d'Aphrodite, la légende NAU, qui paraît désigner la ville de Naucratis. Mais, à cette exception près, on peut dire que la seule ville d'Égypte dont le nom paraisse sur les monnaies est Alexandrie. La série numismatique de cette puissante ville consiste en pièces de bas argent et de bronze, épaisses, d'aspect rugueux et souvent grossier, qui ont été frappées en quantités énormes, à l'effigie des empereurs romains, depuis Auguste jusqu'à l'usurpateur romain Domitius Domitianus en l'an 296 de notre ère. Cette suite renferme quelques noms d'usurpateurs qui n'ont pas régné à Rome, mais seulement en Orient. Ce qui la rend surtout intéressante pour les historiens et les archéologues, c'est que toutes les pièces portent des dates, secours précieux pour la chronologie; c'est, en outre, que les types du revers sont extrêmement variés et se trouvent expliqués par la légende qui les accompagne.


Monnaie de bronze d'Alexandrie.
(An 11 du règne d'Hadrien).

Les principales divinités représentées, souvent avec leurs noms, sont Cronos, Zeus, Héra, Apollon, Isis, Sérapis, Artémis, Athéna, Arès, Déméter, Perséphone, Poseidon, Héraclès, Dionysos, Hermès, Hélios, Séléné, les Dioscures, Triptolème, Harpocrate, Asclépios et Hygie, Tyché, Niké, Eos, Orphée, Anubis, Persée et Andromède, Pâris, l'Océan, le Nil, Rome, Alexandrie, le Peuple, l'Arménie, Antinoüs, la Paix, l'Équité, l'Espérance, la Liberté, les Bonae nuptiae, l'Abondance, la Concorde, la Providence, la Monnaie, la tête d'Isis sur un vase canopique, etc. 

En outre, la plupart de ces divinités y figurent en action dans les principales phases de leurs mythes. Nous y voyons, par exemple, Apollon Didyméen entre les deux Némésis; Déméter accompagnée des Dioscures, Anubis avec ses divers attributs; les divers exploits d'Héraclès contre le lion néméen, l'hydre de Lerne, le sanglier d'Érymanthe, les étables d'Augias, les boeufs de Géryon, le taureau crétois, les oiseaux de Stymphale, le jardin des Hespérides, le centaure Chiron, Cerbère, Antée, la reine des Amazones, le monstre anguipède Echidna, etc. 


Monnaies planétaires frappées en Egypte sous l'empereur Antonin.

Nous voyons des types astronomiques, tels que le Phénix avec l'inscription AIWN, le Zodiaque, Jupiter ou Vénus dans le signe du Taureau, le Soleil dans le signe du Lion, Vénus dans la Balance dans les Gémeaux, Mars dans le Scorpion, Saturne dans le Capricorne ou dans le Verseau, etc.: ces types astronomiques ont tous été frappés dans la huitième année du règne d'Antonin le Pieux. Les animauxqui vivent sur les bords du Nil, le serpent, le crocodile, l'hippopotame, le rhinocéros, l'ibis, l'aigle, ou divers attributs symboliques des dieux égyptiens, forment aussi des types intéressants et variés dans la numismatique alexandrine.

Une autre suite monétaire égyptienne non moins intéressante que la précédente, mais peu nombreuse, est constituée par les monnaies des nomes. Il existe en effet des pièces de bronze frappées sous l'empire romain, sur lesquelles se trouvent inscrits les noms des différents nomes ou divisions administratives de l'Égypte, et ces noms sont accompagnés d'une représentation de la divinité spécialement adorée dans chacune de ces petites provinces. Ces pièces paraissent avoir été toutes frappées à Alexandrie pendant une période de cinquante-quatre ans, mais à plusieurs intervalles; on en a de la onzième année de Domitien, de la douzième jusqu'à la seizième année de Trajan, de la onzième d'Hadrien et de la huitième d'Antonin le Pieux. Ces monnaies sont du plus haut intérêt pour la géographie et l'histoire des cultes locaux en Égypte sous les Romains. (E. Babelon).
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monnaie du nome cynopolite.
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