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Les Indiens d'Amérique du Nord
Les Indiens Pueblos
Les Indiens Pueblos sont des populations autochtones du Sud-Ouest des Etats-Unis (Arizona, Nouveau-Mexique). Ils ne forment pas un groupe homogène linguistiquement, et l'appellation  qui leur est donnée est une référence à ce qu'ils habitent traditionnellement dans des villages (pueblos, en espagnol). Chaque village ou groupe de villages servant aussi à désigner leurs divisions tribales. 

Les habitations, construites en pierre, ou en adobe (c'est-à-dire en terre séchée, torchis) ont été à certaines époques bâties à flanc de falaises pour se protéger des menaces extérieures (Apaches, Comanches, etc.) qui n'ont cessé de peser sur ces populations sédentarisées de longue date, et pratiquant une agriculture centrée sur le maïs.

Au moment de la conquête espagnole (1540), on estime le nombre des Pueblos à environ 30 000 personnes. La population pueblo est aujourd'hui de 40 000 habitants environ, répartis dans une trentaine de villages. Dans l'intervalle, les mauvais traitements imputables aux nouveaux venus et les différentes guerres avaient fait diminuer considérablement ces chiffres.

Subdivisions des Pueblos

Tañoans Tewa Septentrionaux : Nambe, Tesuque, San Ildefonso, San Juan (auj. Ohkay Owingeh), Santa Clara, Pojoaque (éteints).
Méridionaux :  Tano (éteints).
Tiwa Taos, Picuris


Sandia, Isleta


Isleta del Sur (Tigua), Senecu del Sur (del Sur, en espagnol = du Sud).
Towa Jemez Pueblo  (Walatowa ou Teguala), Pecos (Cicuye ou Ciquique, éteints).
Piro Senecu, Senecu del Sur (Mexicanisés).
Uto-Aztèques Hopi Première Mesa : Walpi, Shichomovi, Polacca, Hano.
Note : Certains  Tewa qui avaient participé à la révolte de 1680-1692 s'étaient réfugiés parmi les Hopi. Hano, le village de Tewa et Polacca sont aujourd'hui habités principalement par leurs déscendants, connus sous le nom de Hopi Tewa. 


Deuxième Mesa :  Mishongnovi, Sipaulovi, Shongopovi


Troisième Mesa : Oraibi, Otevilla.
Isolés
linguistiquement
Keresans
(Keres)
Orientaux (Sitsime ou Kawaiko) : San Felipe, Santa Ana, Sia (Zia), Cochiti, Santo Domingo (auj. Kewa). 


Occidentaux (Queres) : Acoma, Laguna et villages alentour.
Zuñi Zuñi (Ashiwi) et villages environnants.

La culture traditionnelle des Pueblos

Il semble difficile aujourd'hui de parler de façon uniforme de la survivance des modes de vie traditionnels des Pueblos. Les modes de vie ont beaucoup changé au cours du dernier siècle. Les Pueblos, comme les autres Amérindiens, ont dû s'adapter à des réalités nouvelles. Il y ont cédé parfois, comme ceux, par exemple, de la vallée du Rio Grande entre Santa Fé et Albuquerque, qui ont basé leur développement économique sur l'ouverture de casinos (l’Indian Gaming Regulatory Act (IGRA), qui reconnaît  la souveraineté des réserves indiennes en matière de jeux date de 1988). D'autres, en particulier les Hopi, continuent autant qu'il le peuvent de résister aux intrusions du monde extérieur. Aussi, pour parler de ce qu'on appellera la culture traditionnelle des Pueblos, s'est-on appuyé dans cette page sur les travaux des ethnologues américains de la fin du XIXe siècle, tels Frank Hamilton Cushing (1857-1900) ou Jesse Walter Fewkes (1850-1930).

Le costume.
Les vêtements des Indiens Pueblos étaient principalement tissés d'écorces, de fibres de yucca, de duvet de coton ou de peuplier, de fourrure et de plumes. 

Le costume des hommes.
Les hommes portaient des tuniques en peau de félin ou de lapin, des pelisses de plumes, des manteaux de coton richement rayés et brodés, des manteaux du genre poncho, des kilts à glands et brodés, maintenus en place par de longues et larges ceintures de coton, des collants en peau de daim remontant jusqu'au-dessus du genou, ou bien des jambières faites de longues bandes de la même matière enroulées autour de la jambe et attachées au genou par des jarretières joliment tissées ou encore des brins entrecroisés de fils de coton colorés, ou bien enfin de longs bas au crochet atteignant le haut des cuisses. 

Les cheveux formaient une frange descendant  jusqu'aux sourcils; deux longues mèches latérales pendaient des tempes, et les cheveux à l'arrière étaient attachés en une touffe avec un ruban tressé dans lequel était collé un bouquet de plumes brillantes (de préférence d'ara) : un filet de fibres, ou de cosses tressées, teintes de la couleur symbolisant le quartier auquel appartenait le porteur était liée autour de cette parure.

Les costumes des prêtres-chefs, variés symboliquement, étaient beaucoup plus élaborés. 

Le costume des femmes.
Les femmes portaient ordinairement une longue camisa, c'est-à-dire une robe sans manches en coton qui descendait au-dessous du genou. Le costume était complété par un manteau de coton brodé, un léger châle, des jambières et des sandales, ou des mocassins semblables à ceux des hommes, mais non colorés, et, à la maison elles portainet des bas en grosse maille. 

Elles portaient de nombreux ornements : des bracelets similaires à ceux des hommes, des bagues et des pendants d'oreilles, ou encore des amulettes de maternité.

Les cheveux des femmes étaient légèrement plaqués sur le devant de la tête, séparés dans le sens de la longueur vers l'arrière puis relevés pour former, chez les femmes mariées, deux chignons, ou, chez les célibataires, deux boucles, "semblables à des anses de pichet" (selon l'expression des premiers explorateurs) couvrant les oreilles.
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Un chasseur Pueblo et une jeune femme d'Isleta Pueblo (vers 1900).

Le costume et l'équipement des guerriers.
Les guerriers portaient des casques coniques en cuir épais ou des couvre-chefs fabriqués à partir de la peau du puma, de l'ours, de l'antilope à cornes ou du bison. Ils portaient aussi des cuirasses de peau, ou de coton et de yucca capitonnés, et ils se munissaient de boucliers ronds de vannerie, de coton fortement et serré, ou de cuir brut épais, peints de motifs symboliques. Ils portaient des lances courtes, des javelots et des propulseurs (similaires aux atlatl des Aztèques), des arcs longs, des massues de guerre, de très grands couteaux de silex ou d'obsidienne gainés dans des poches suspendues à la ceinture, des haches de pierre à manche de bois enfoncées dans le pli gauche de la ceinture, ou bien des épées en bois bordées de lames rapprochées d'obsidienne ou de silex, et des frondes de yucca savamment tressé.

Les habitations.
Parmi les tribus orientales, le parallélogramme semble avoir été la forme de groupement de maisons qui a prévalu, tandis que parmi les tribus de l'intérieur et de l'Ouest, le village polygonal ou arrondi était plus courant. 

Dans l'ensemble, les murs des maisons construites à la périphérie des villages étaient généralement les plus hauts; les étages en terrasses des maisons étaient tournés vers l'intérieur sur des cours et des ruelles ouvertes.

Il n'y avait pas de portes dans les étages inférieurs : ces maisons, que l'on appelle des maisons-puits, possédaient des écoutillons sur leur toit et l'accès s'y faisait au moyen d'échelles à très longues perches, disposées comme des rampes de puits, de manière à pouvoir être facilement basculées la nuit par sécurité. Outre son intérêt pratique, l'ouverture sur le toit avait une fonction symbolique : elle représentait le shipapu, le lieu d'où les humains étaient sortis, à l'origine des temps, du monde intérieur. C'est seulement dans les étages supérieurs, inaccessibles depuis l'extérieur, que l'on pouvait trouver des portes véritables. Les fenêtres des parties basses étaient de simples hublots, tandis qu'au-dessus, elles étaient plus grandes et parfois bien vitrées avec des plaques de sélénite ou de mica. 
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Taos Pueblo.
Taos Pueblo, en 1898.

Les maisons individuelles de ces villages se répartissaient, plus ou moins rigoureusement, en quartiers correspondant au nombre de divisions coutumières du pueblo; ces quartiers étaient eux-mêmes subdivisés en fonction du nombre de clans dans chaque division. 

Chaque ménage dans les quartiers du clan occupait trois pièces ou plus - car les pièces étaient très petites - et était présidé par la matrone la plus âgée. Il y avait toujours une cuisine, un cellier, une salle à manger et une salle de séjour, dans laquelle les maris venaient prendre les repas avec leurs familles ou rendaient visite à leurs épouses.

Les kivas.
Ces quartiers n'étaient occupés en permanence que par les femmes (à qui ils appartenaient) et les enfants. Les hommes, qu'ils soient  mariés ou célibataires, avaient pour quartiers permanents les grandes kivas semi-souterraines. Le sol de ces kivas possédéait une excavation cylindrique, appelée aussi shipapu (mot hopi) et qui était vu comme l'analogue symétrique de l'entrée par le toit des maisons-puits (il relevait du même symbolisme). Chaque division de la tribu possédait sa propre kiva. 

C'est dans les kivas, qui étonnent par leurs petites dimensions, que se tenaient  tous les conseils des groupes de clans et que se célébraient les cérémonies des sociétés de culte secrètes qui leur appartenaient. C'est aussi dans les kivas, surtout en hiver, que les hommes se réunissaient pour travailler à leurs métiers à tisser, à la fabrication d'armes et aux arts mineurs. C'est dans les kivas encore, qu'il cherchaient à s'amuser, ou que les « anciens » enseignaient aux jeunes adultes le savoir et les usages régulateurs de la division particulière à laquelle ils appartenaient. 
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Kiva dans la grotte sacrée de Rito de los Frijoles.
Une kiva construite dans une grotte sacrée du Rito de los Frijoles.

Les procès ou les différends entre les clans étaient réglés dans les kivas, tandis que les affaires des divisions tribales étaient administrées à partir de la kiva principale de la ville, généralement celle de la division principale. C'est dans cette cette kiva également, que toutes les affaires tribales étaient menées et que les étrangers d'autres tribus étaient accueillis. 

L'artisanat, l'agriculture, la chasse.
Les femmes s'occupaient des familles, préparaient toute la nourriture, fabriquaient la poterie et la vannerie, et façonnaient les moulins en pierre et autres ustensiles ménagers. Elles avaient de petits jardins maraîchers près des village, où les poireaux, le piment ou les poivrons rouges, et quelques herbes parfumées étaient cultivés par arrosage à la main. 

Les hommes étaient les principaux tisserands et fileurs. Ils travaillaient les champs, produisaient leurs cultures principalement au moyen de l'irrigation. 

Les dindes et autres petits animaux ont été domestiqués par certains des Pueblos. Mais l'essentiel de l'approvisionnement en viande était assuré par la chasse, qui était généralement collective. Des clans entiers organisaient ensemble de grandes campagnes de chasse, pour lesquelles d'énormes corrals ( = enclos) étaient construits. 

Le labourage, la construction de barrages d'irrigation, de fossés et de remblais, et toutes les autres opérations menées à distance des villages, étaient, comme les chasses, des entreprises qui mobilisaient l'ensemble du village, puisque ses habitants, avec leurs riches provisions de vivres, étaient toujours exposés d'attaques prédatrices des tribus nomades voisines.

Organisation sociale.
Les clans et leur symbolisme.
Toutes les tribus Pueblo étaient matrilinéaires (la descendance appartenait à la lignée féminine) et composées de clans. Ces clans étaient des familles de parents nommés d'après un animal, une plante, un minéral ou un élément. Les regroupement des clans reposaient sur leur association avec des régions de l'espace et des saisons. La division la plus rudimentaire  divisait les clans en deux groupes : ceux du Nord et du Sud (ou d'Été et d'Hiver). D'autres Pueblos avaient quatre clans (ceux du Nord, de l'Ouest, du Sud et de l'Est, ou des Quatre Saisons). Les Pueblos hautement développés (comme chez les Zuñi) en avaient rarement moins de six : généralement sept groupes, à savoir les clans de ceux du Nord, de Ouest, du Sud, de l'Est, de la région Supérieure, Inférieure et Moyenne. 

Les clans étaient groupés ou liés, selon les analogies supposées de leurs totems ou homonymes (les animaux, etc., dont ils étaient nommés) avec divers phénomènes des différentes régions symboliques. 

• Ainsi, le Puma, féroce et rugissant, appartenait au Nord, d'où venaient les vents les plus violents et les tempêtes déchaînées de l'hiver. Même chose pour le chêne vert, qui ne se jamais flétri lors de ces tempêtes : il appartenait donc aussi au nord et à l'hiver. De là venait que les clans du Puma et du Chêne vert, et d'autres comme eux, appartenant à l'Hiver et au Nord, formaient un groupe particulier.. 

• Le Soleil et l'Aigle, habitants des cieux, ou encore la Turquoise, considérée comme un morceau du ciel lui-même, donnaient leurs noms à des clans associés au monde supérieur, tandis que le Serpent à sonnettes et la Grenouille servaient à réunir des clans associés au monde inférieur.

On ajoutera que l'archéologie montre que l'importance accordée par les Pueblos historiques aux points cardinaux (auxquels sont aussi associées des couleurs), ainsi qu'aux quatre périodes de l'année solaire (délimitées  par les solstices et les équinoxes), se manifestait déjà chez leurs prédécesseurs (Anasazi, etc.).

Le gouvernement.
A la tête de chaque groupe de clans se trouvait un prêtre, ou "ancien". C'était l'adorateur en chef, le gardien des médecines, des pouvoirs et des mystères des grands esprits animaux et des dieux de de l'enceinte du monde (région symbolique) que sa division représentait.

Ce prêtre  était aussi l'oracle dans toutes les affaires religieuses et profanes de sa «-maison ». Il y avait généralement sept de ces prêtres divisionnaires ou chefs de groupes claniques, et rarement moins de quatre. Parmi eux se trouvaient le « chef pacifique » et le « chef courroucé », populairement connu après l'arrivée des Espagnols sous les noms respectifs de gouverneur ou alcalde, et de capitaine de guerre. Ces dignitaires ont leurs assistants, ou tenientes, dont les charges, comme celles de leurs supérieurs, ont des noms d'adoption espagnole, et qui sont élus annuellement avec la sanction du conseil suprême des prêtres ou caciques. (Ce dernier mot a été emprunté par les Espagnols à une langue caraïbe).

Le peuple n'était pas tant contrôlé par les chefs de paix et de guerre (à qui ils étaient néanmoins généralement obéissants) que par les pères oraculaires et magiques qu'ils étaient supposés représenter. Ceux-ci méritaient la révérence et le respect dans lesquels ils étaient considérés comme les « pères et mères » de la tribu, car ils étaient les pénitents de leur peuple; ils devaient accomplir les rites sacrés de saison en saison, veiller, jeûner et répéter des rituels, etc., des jours à la fois à des occasions indiquées. Ainsi, sous les auspices des sociétés divisionnaires, presque toutes les grandes coutumes (telles que les jeux, les courses, les chasses collectives, les labours, les récoltes et les voyages pour la collecte du bois) étaient-ils annuellement exécutées à leur profit.

La religion.
Les fraternités sacerdotales.
Dans chaque tribu importante d'Indiens Pueblo, il y avait de quatre à treize sociétés secrètes ou taboues, appelées fraternités sacerdotales, et qui étaient composées de «-guérisseurs ». Ces sociétés se voulaient représentatives l'organisation tribale : les guérisseurs appartenaient, selon leurs fonctions spéciales, aux divers groupes claniques ou divisions régionales. 

Les membres de ces fraternités étaient, avec les prêtres-caciques divisionnaires, les gardiens et les enseignants des traditions et des rituels mythiques, des règlements religieux, des mystères magiques et des médicaments ou « puissances » propres au divisions auxquelles ils appartenaient. Ainsi, le nom de sociétés cultuelles (cult-societies), qui leur a été donné par l'explorateur et fondateur du Bureau d'ethnologie américaine John Wesley Powell (1834-1902), semble-t-il le plus approprié pour les désigner. 

Les membres de ces fraternités étaient des médecins, ou prêtres-médecins, dont les attributions édépendaientt ainsi de la région, la saison, l'élément et la fonction associée de sa société particulière. Les sociétés cultuelles du Nord fabriquaient du vent et du froid, et prenaient le pas en hiver; celles du Sud, faiseurs de feu ou maîtres du feu, contrôlaient l'été. 

Leur pratique de la médecine et l'application des remèdes étaient strictement réglementées et souvent très simples, mais leur efficacité n'était pas remise en question. La croyance en l'universalité de la maladie et de son origine spirituelle ou fantomatique élargissait considérablement le champ de l'utilité supposée et le pouvoir de ces frères prêtres-médecins. Non seulement ils soignaient la maladie, mais leur activité la plus ordinaire était dirigée vers sa prévention (spirituelle). S'assurer de la chute de la pluie était aussi une tâche importante qui leur était assignée.

Le panthéon.
Avant l'arrivée des Européens et les transformations que l'imposition du christianisme a pu opérer, la religion des Pueblos était une religion naturaliste. Leurs dieux et déesses étaient des dieux animaux, des dieux associés aux phénomènes naturels, des dieux ancestraux et des dieux célestes. 

Suprême parmi les immortels était le dieu du bouclier solaire, le créateur de tous les faiseurs, de l'eau ou de la génération, personnifié dans la mère de l'océan, l'homme du ciel et la femme de la terre, d'où sont nées toutes les choses mortelles. Sous le dieu solaire se trouvaient le dieu du destin et son frère cadet jumeau, le dieu de la guerre; le Dieu du Temps ou des Saisons, et son frère cadet, le Dieu de l'Aube, etc. 

A part était le Maître de la Vie, fils du dieu Soleil et de la Vie, ou des Grandes Eaux, dans lequel les missionnaires ont voulu y voir une sorte de messie des Pueblos. Il régnait sur les dieux animaux et phénomènes naturels, et était le médiateur entre ces êtres mortels et les dieux célestes. Il était aussi une personnification du reflet ou de l'image du soleil dans l'eau. Il existait aussi une personnification du reflet de la Lune dans l''eau, qui était la déesse de la menstruation et de la maternité.

Tous ces dieux étaient censés être liés les uns aux autres comme le sont les humains, les créatures et les choses de ce monde; leur organisation était comme l'organisation sociale des humains. Le monde céleste ou spirituel interpénétrait le monde visible dans le nord du pays Pueblo, qui était le lieu de connexion ombilicale entre le monde spirituel parent et le monde mortel engendré.  C'est donc en direction du Nord que les rituels et les offrandes au Maître de la Vie, ou Dieu du soleil inférieur, étaient toujours adressés par les prêtres des sociétés cultuelles.
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Danse de la dinde à Jemez Pueblo.
Danse de la dinde, à Jemez Pueblo (vers 1900). Notez la croix au cou du personnage central. Le
christianisme, apporté par les Espagnols a altéré la religion des Pueblos. Mais la persistance de
traditions telle qui celle figurée ici montre que cette altération a souvent été seulement cosmétique.

Le culte public.
Tout comme la conception Pueblo de la pratique médicale était religieuse, leur conception du culte religieux était aussi en grande partie médicale. Les maux de la vie et du temps étaient des maladies à maîtriser par des charmes et des formules et par des règles d'hygiène spirituelle (observances et bonnes conduites), ou à prévenir par le travail, les affaires ou l'industrie du culte. 

En tout cela, il fallait être aidé et aidé par les dieux, et à cette fin, en gage de sincérité, les prêtres s'abstenaient de viande et de toutes autres choses charnelles quatre jours par mois, et de huit à dix jours aux solstices d'été et d'hiver, ou pour des périodes plus ou moins longues chaque fois que des circonstances malheureuses l'exigeaient

À ces moments-là, ils travaillaient jour et nuit, fabriquant des baguettes de prière à plumes, comme témoignages de constance, pour être érigés dans des sanctuaires situés hors des villages en tant que « prières de saison en saison ». Ces travaux s'accompagnaient de la répétition de long rituels et d'incantations, et de représentations dramaturgiques (appelées chez les Hopi danses kachinas, ou correspondant aux fêtes du shalako, célébrées à la période du solstice d'hiver chez les Zuñi) devant des autels érigés pour symboliser l'une ou l'autre des régions sacramentelles. Des offrandes de repas de prière sacrés étaient également faites à diverses occasions; des coquillages, du corail ou des perles de turquoise ou d'autres trésors étaient sacrifiés comme médicaments spirituels ou comme paiements ou cadeaux de bonne volonté.

La population générale se joignait un jour par mois et quatre jours semestriellement à ces exercices d'adoration. En automne, tous se souvenaient des morts avec des offrandes de nourriture et d'autres objets consommés ou libérés par le feu, et au nouvel an ou à la « mi-temps » (en novembre) avaient lieu les fêtes solennelles et les célébrations dramaturgiques de la création et de la sortie du « milieu du monde ». Les danseurs des kachinas étaient costumés et masqués en animaux ou en démons, se joignant aux prêtres dans ces représentations dédiées à la régénération du monde et des saisons.

Coutumes relatives à la naissance, au mariage, à la mort.
Le mariage.
Les hommes d'un clan ne pouvaient épouser les femmes d'un même clan, et le mariage était donc presque autant une affaire de clans que d'individus, les alliances se faisant autant que possible en dehors du groupe clanique (afin que les saisons et les éléments puissent être « mariés »). Jusqu'après les fiançailles, les futurs époux se courtisaient très indirectement; c'est-à-dire qu'un jeune homme, en faisant la cour, s'efforcerait d'attirer l'attention de la personne de son choix par des démonstrations et des actions générales et non directes. Après les fiançailles, le jeune homme était accepté par les parents maternels comme un invité perpétuel plutôt que temporaire de leur clan et de sa femme. Ainsi, le divorce, bien sûr, était principalement entre les mains des femmes.

La naissance.
Une sage-femme (généralement une prêtresse de culte), la grand-mère ou matrone maternelle, et, s'il s'agit d'une prêtresse, la grand-mère paternelle, ou à sa place le grand-père (appelé à l'occasion « grand-mère »), présidait à la naissance. Immédiatement après les offrandes de naissance étaient faites par les parents féminins paternels, et l'enfant était déposé, avec de nombreuses cérémonies, sur un tas de sable. Un épi de « maïs mâle » pour un garçon, ou de « maïs femelle » pour une fille, était placé par le côté droit du nourrisson. Au bout de neuf jours, l'enfant était présenté au Soleil par les grands-parents paternels, et formellement adopté par eux. Il était, à cette occasion, nommé claniquement par les membres du clan de la mère, à qui il appartenait désormais.

La mort.
Ces observances étaient  inversées lors du décès. Une jarre d'eau était brisée, signifiant le renoncement au défunt par les membres du clan de la mère aux membres du clan du père. Des cadeaux de nourriture et de biens personnels étaient donnés, et le corps était ensuite lavé et enveloppé dans des couvertures avec des offrandes sacrées et des plumes. Si le mort avait été un prêtre de clan ou de culte, il était enterré sous les échelles à l'extérieur ou à l'intérieur de la maison, les présents ou offrandes des parents étant brûlés; sinon le corps du mort était brûlé avec les offrandes. Il était ainsi rendu au soleil et à la terre. Le but était de permettre à l'âme d'échapper aussi bien au corps qu'aux sorciers. 

Histoire des Indiens Pueblos

L'origine des Pueblos.
Les différentes langues parlées aujourd'hui par les Pueblo témoignent de leurs origines diverses. Leurs ancêtres étaient issus de nombreuses tribus (probablement petites) bordant la grande région aride qui forme un demi-cercle irrégulier du centre de l'Utah et du Colorado au nord au centre du Texas à l'est. Mais, quelle qu'ait été cette diversité initiale, les populations des Indiens Pueblo ont partout suivi pratiquement la même trajectoire. 

On peut supposer que ces tribus ancestrales de chasseurs-cueilleurs ont été chassées par vagues successives vers le sud dans les déserts par des tribus plus pluissantes, et ont été forcés de vivre de l'agriculture dans d'étroits secteurs, à proximité des approvisionnements en eau, un bien presque partout  rare dans cette région. Une civilisation des oasis s'est ainsi progressivement créée. Le développement des systèmes d'irrigation a permis d'étendre la surface des cultures. L'habitat s'est perdectionné. Des huttes en bois, recouvertes de terre (d'un type analogue aux hogan des Navajos), ont été les premières habitations. Puis, à cause de la rareté du bois, des maisons de pierre et de boue, plus grandes et de meilleure qualité, parfois semi-enterrées ou enterrées (maison-puits) furent construites en groupes, qui allaient devenir des villages, autour des points d'eau, à proximité des champs qu'ils permettaient d'irriguer. 

La prospérité ainsi obtenue a attiré la convoitise des populations voisines, obligeant les Pueblos anciens à se réfugier dans des sites plus sûrs, comme les falaises bordant les canyons, relativement nombreux dans la région. Ils ont alors construit leurs habitations d'un type très particulier massées à flanc même de falaise (cliff-dwellings). Cependant, l'évolution démographique et la nécessité de disposer de terres cultivables (irriguables) plus étendues semble avoir conduit à l'abandon de ces villages escarpés. Ceux-ci n'ont plus servi, peut-être encore quelque temps, que de refuge en cas de danger. Les nouveaux villages, construits  de nouveau à proximité des zones cultivables, ont été ceux qu'habitaient les Pueblos au moment de l'arrivée des Européens en 1540. A cette époque, les Pueblos étaient au nombre de 20 000 environ,  dispersés dans 70 villages. Leur principale source de nourriture était un type de maïs adapté à la semi-aridité du territoire, qu'ils complétaient par la chasse.

Les données de l'archéologie.
Tradition du Sud-Ouest (2000 avant JC - 1400 après JC).
On a donné le nom de Tradition de Sud-Ouest ou de culture Cochise (du nom d'un ancien lac situé au Sud-Est de l'Arizona) à la tradition du désert apparue très tôt (peut-être dès 9000 av. JC) et qui a connu son plus grand développement entre 2000 av. JC, et 200 ap. JC. Certaines populations ont même conservé des coutumes de vie archaïques propres à la culture Cochise jusque vers 1400. 

On reconnaît dans la Tradition du Sud-Ouest certaines composantes d'autres cultures paléoaméricaines, telles que la culture Clovis (13 500 av. JC - 11 000 av. JC) et la culture Folsom (8500 av. JC - 4000 av. JC) qui lui a succédé. La chasse au gros gibier caractéristique de ces cultures est cependant remplacée ici par des pratiques de chasse plus modestes, et la collecte de plantes prend dans le Sud-Ouest une plus grande importance. On note aussi de indices d'une agriculture rudimentaire (maïs). A partir de 500 av. JC., on commence à trouver des céramiques, et aussi les vestiges des toutes premières maisons-puits.

C'est sur ce socle que, vers 300 avant JC, trois cultures importantes ont évolué : les cultures Anasazi, Hohokam et Mogollôn. Ces cultures sont en partie seulement contemporaines et leurs emprises géographiques bien distinctes.

Culture Anasazi (185 av. J.-C -1300 après JC.)
Le terme "Anasazi" a été forgé au XIXe siècle à partir d'un mot hopi signifiant "les Anciens". La culture anasazi s'est déployée sur une quinzaine de siècles autour de la région des Quatre Frontières (Four Corners) à partir de six foyers principaux (Mesa Verde dans le Colorado, Chaco Canyon et Rio Grande au Nouveau-Mexique, Little Colorado et Kayenta en Arizona, Virgin au Sud-Ouest de l'Utah et au Nord-Ouest de l'Arizona). On fait commencer la chronologie de la culture anasazi en 185 avant notre ère. Huit phases ont été établies : les trois premières appartiennent à l'évolution des Vanniers (Basketmakers) jusqu'en 750 après JC., et les suivantes à la culture Pueblo proprement dite.

Les premières habitations des Anasazi étaient des maisons-puits semi-enterrées, peu profondes et avec une structure simple. Plus tard, ils ont construit des bâtiments avec des pierres et au niveau du sol. Vers et 700 après J.C à Mesa Verde, ils ont construit des habitations dans des grottes naturelles creusées dans des falaises (ex. Cliff Palace). 
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Mesa Verde : Cliff palace.
Les ruines du Cliff Palace, à Mesa Verde (Colorado).

Le XIIe siècle correspond à l'apogée des Anasazi, dont témoignent l'accroissement démographique considérable, le développement de l'artisanat (céramique) et les perfectionnements de l'agriculture. Plusieurs grands sites datent de cette période. Pueblo Bonito compte environ 800 salles et 25 kivas. Les habitations y ont plusieurs étages et la cité est entourée de fossés d'irrigation. Chetro Ketl est un autre centre urbain parmi les plus importants, avec plus de 125 colonies réparties tout au long du bassin du fleuve San Juan dans le Chaco Canyon. Toutes ces agglomérations étaient pourvues d'entrepôts, d'enceintes cérémonielles, de bâtiments publics et étaient desservies par plus de 400 km de réseau routier.

Le changement climatique (diminution des précipitations) qui affecte tout le Sud-Ouest vers le début du XIIIe siècle et qui achève de détruire un écosystème déjà fragile, ajouté aux incursions des Apaches et des Navajos, sont les causes les plus probables de la disparition rapide de la culture anasazi. Les villes du bassin du fleuve San Juan sont purement et simplement abandonnées.

On ignore ce que sont devenus les Anasazi. On peut seulement constater que leur effacement prélude de peu l'apparition, dans la région des rivières Petit Colorado et Rio Grande, de nouveaux centres d'habitation importants, parfois autour de grottes comme dans le plateau de Pajarito, non loin de Los Alamos (Nouveau-Mexique), et qui ont perduré jusqu'à l'arrivée des Européens.
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Pueblo Bonito.
Vue aérienne de Pueblo Bonito (Chaco Canyon)
Les structures circulaires correspondent aux kivas.

Culture Hohokam (100 av. JC - 1450 après JC).
La culture Hohokam a commencé à développer vers 100 avant l'ère commune dans le bassin désertique de la rivière Gila, au centre et au sud de l'Arizona actuel, elle aussi sur les débris de la culture Cochise. On la divise, de puis les travaux de Glawdin et Haury (1937) en quatre périodes. La dernière, qui s'est étendue du milieu du XIIe siècle au milieu du XVe, sera la plus florissante.

Malgré l'aridité de la région où ils vivaient, les Hohokam ont élaboré une agriculture capable de leur fournir deux récoltes annuelles (maïs, haricots et, plus tard, coton). Ils ont construit des canaux d'irrigation qui transportaient l'eau depuis les montagnes. 

Leurs artisanat (céramique, bracelets en coquillages, travail de la pierre, de la turquoise et du cuivre) semble dénoter des relations précoces avec les sociétés mésoaméricaines. La constructions de jeux de pelote et de monticules en plateforme (platform mound), comme à Pueblo Grande, près de Phoenix, atteste de façon plus patente encore de l'influence mexicaine à partir du VIIe siècle. A cette époque, leurs habitations étaient des maisons-puits avec des enceintes rectangulaires construites en pisé. Elles atteignaient quatre étages à Casas Grandes.

A partir du Xe siècle, la croissance démographique rend nécessaire une politique de grands travaux (nouvelle phase de développement du réseau d'irrigation) qui va de pair avec la complexification de l'organisation sociale. Les échanges économiques avec les populations voisines, notamment avec les autres Pueblos, prennent de l'importance. Cependant, les mauvaises récoltes, que l'on associe ici encore à un changement climatique, et les incursions fréquentes des tribus Apaches ont provoqué leur effondrement vers 1450. Les colons ont abandonné leurs colonies et se sont regroupés en petits villages épars.

Culture Mogollon (300 -1350 après JC).
La culture Mogollon occupait un espace qui comprenait le sud du Nouveau-Mexique, le Sud-Est de l'Arizona, le Nord Ouest de l'Etat mexicain de Sonora et une grande partie du Nord du Chihuahua. Elle était à peu près contemporaine de la culture Anasazi. On place la transition entre la tradition archaïque Cochise, qui connaissait déjà la culture d'un type primitif de maïs, et la culture Mogollon d'agriculteurs sédentaires vers l'an 300 de notre ère et on reconnaît quatre phases de développement jusqu'au milieu du XIVe siècle.

Au début, les villages comptaient  un grand nombre de petites maisons-puits. À partir de l'an 1000 après JC, les Mogollon ont commencé à se construire au-dessus du niveau du sol et, sous l'influence des Anasazis, ont bâti de grands complexes cérémoniels et, dans certains cas, des kivas. 
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Céramiques de la culture de Mogollon.
Motifs de céramiques de la culture Mogollon (Rio Mimbres).

L'artisanat mogollon était très développé. Les fouilles ont révélé toutes sortes de bijoux (bracelets en coquillages, boucles d'oreilles en bois), des bibelots tubulaires en os, des outils divers (mortiers, pièges, arcs et flèches, etc.); ils fabriquaient des textiles, des paniers, des céramiques telles que des spatules, des tablettes, des flûtes et des pipes. Les habitants de la vallée de la rivière Mimbres (Sud-Ouest du Nouveau-Mexique), en particulier, ont produit des  céramiques remarquables). La principale source de nourriture des Mogollon provenait de la domestication et de la culture du yucca et d'autres cactus, du tournesol, du maïs, etc.

Le lent déclin de la culture Mogollon commence à s'observer vers le début du XIIe siècle, peut-être pour les mêmes raisons que le reste du Sud-ouest. Elle s'effondrera définitivement vers le milieu du XIVe siècle.

Histoire coloniale.
L'arrivée des Européens.
On fait remonter au voyage du franciscain Marcos de Niza, en 1539, le premier contact des Pueblos avec les Européens. Parti de Mexico en direction du Nord, Niza était accompagné d'un ancien esclave originaire d'Afrique du Nord nommé Estevan (ou Estevanico), qui avait été un des compagnons de Cabeza de Vaca. Deux survivants de l'expédition de Narvaez, naufragés dans le golfe du Mexique en 1528 l'accompagnaient aussi. Estevan, parti en éclaireur, établit le tout premier contact avec des Zuñi, mais est tué par eux. Quelques jours plus tard, Niza aperçoit depuis une hauteur un village que l'on a identifié plus tard avec le village zuñi, aujourd'hui ruiné, de Hawikuh. Il plante à l'endroit qu'il a atteint une croix et déclare prendre officiellement possession du pays au nom de l'Espagne. A son retour à Mexico, il fera un récit très enjolivé de tout ce qu'il avait vu et entendu.

La promesse de grandes richesses incite le vice-roi Mendoza a demander à Francisco Vasquez de Coronado, d'organiser une expédition en direction de ce pays. Cette expédition, à laquelle devait participer comme guide Niza lui-même, part en mars 1540 de Culiacan (dans l'actuel Etat de Sinaloa au Nord-Ouest du Mexique). Hawiku est atteinte en juillet. Le comportement des Espagnols suscite rapidement l'hostilité des Indiens,, mais ceux-ci sont mis en déroute. 

Des groupes d'exploration sont ensuite envoyés dans diverses directions - vers les villages Hopi de Tusayan, vers le le Grand Canyon du Colorado, vers la vallée du Rio Grande et même vers les Grandes plaines, sans que bien sûr on ne trouve nulle part les richesses espérées. De son côté, le gros de l'expédition part pour Tiguex (le pays et le chef-lieu des Indiens Tiwa actuels), vers l'actuel Bernalillo, sur le Rio Grande, où des quartiers d'hiver sont établis. 

Plusieurs révoltes indiennes vont éclater en raison des atrocités commises par les explorateurs. Elles seront toutes matées cruellement. Guidé par un Indien surnommé «-Le Turc » (un Pawnee, qu'il a trouvé habitant parmi les Pueblos), Coronado part en avril 1541 avec toute sa force afin explorer une province orientale appelée Quivira. Mais les Espagnols sont égarés par leur guide, qu'ils exécuteront plus tard; le gros de la troupe revient vers le Rio Grande, tandis qu'un petit corps expéditionnaire atteint l'Est de l'actuel Kansas. Finalement, toute l'expédition de Coronado rebrousse chemin, en direction du Mexique, au printemps 1542. Seuls deux missionnaires restent sur place : Juan de Padilla, qui atteint  Quivira, et Fray Luis, un frère laïc, qui s'installa à Pecos. Tous deux seront  tués par les indigènes qu'ils avaient cherché à convertir. 

Nouvelle expédition en 1581. Francisco Sanchez Chamuscado escorte trois missionnaires franciscains au pays Tigua du Rio Grande, mais tous seront tués peu de temps après. 

Fin de 1582, Antonio de Espejo, accompagné d'une petite force, part, depuis San Bartolomé Nord du Mexique, dans le but de déterminer le sort des missionnaires. Il traverse le pays Hopi du nord-est de l'Arizona, atteint Pecos au Nouveau-Mexique, et retourne à San Bartolomé par la rivière Pecos. Espejo a bien décrit son itinéraire, et la plupart des noms tribaux qu'il mentionne sont facilement identifiables, mais ses estimations de la population sont grandement exagérées (parfois d'un facteur dix).

En 1590,Gaspar Castaño de Sosa, à la tête d'une expédition de 170 personnes, suit la rivière Pecos jusqu'au pueblo de ce nom. Il le décrira comme ayant cinq places et seize kivas. La poterie et les vêtements des hommes et des femmes suscitent l'admiration des Espagnols.

En, la plus importantes de toutes ces expéditions, après celle de Coronado, est celle de Juan de Oñate, le colonisateur du Nouveau-Mexique en 1598 et le fondateur de Santa Fé sept ans plus tard. Oñate atteint le 22 mai les premiers pueblos du Rio Grande (ceux des Piro à proximité de l'actuel Socorro). Un groupe est envoyé pour visiter les pueblos des Salinas, au Nord du Rio Grande, tandis que le corps principal atteint le pays de Tigua quelques semaines plus tard, y trouvant, au village de Puaray, des preuves du meurtre des missionnaires en 1581. D'autres pueblos furent visités, et leurs habitants contraint de prêter allégeance aux nouveaux venus. Dans de nombreux cas, des noms de saints chrétiens furent imposés aux villages. Il leur sont souvent restés jusqu'à nos jours. C'est de l'expédition d'Oñate que date le début de l'acculturation des Pueblos. 

Le temps des missionnaires.
Dès la fin du XVIe siècle, le pays Pueblo est divisé en districts. Un prêtre est affecté à chacun d'eux. Les véritables missions permanentes sont bientôt fondées. La première est établie, sous le nom de San Gabriel de los Españoles, sur le Rio Grande, dans le village Tewa de Yukewingge, à l'embouchure du Rio Chama, en face du pueblo de San Juan (Ohkay Owingeh); elle est restée le siège de la colonie jusqu'au printemps 1605, date à laquelle elle fut abandonnée, à la suite de la fondation de Santa Fé.

Le début du travail missionnaire actif parmi les Pueblos date surtout des années suivantes : beaucoup de baptêmes sont alors célébrés, mais peu de conversions réelles ont lieu. Un état des lieux en 1629 est exposé dans le Mémorial écrit par Alonso Benavides, qui dirige les Franciscains dans la province. Il s'en suivra l'envoi de 30 nouveaux missionnaires et la fondation de nombreuses nouvelles missions chez les Hopi, les Zuñi, etc. Des églises et des monastères importants sont érigés avec l'aide des Indiens. 
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Ancienne église d'Acoma.
Vestiges de l'église de l'ancienne mission San Estevan del Rey à Acoma Pueblo.

La grande révolte des Pueblos. 
Vers le milieu du XVIIe siècle, des difficultés surgissent entre les fonctionnaires civils et les missionnaires. Les Indiens vont s'en mêler. En août 1680, une révolte éclate, dirigée par un shaman tewa natif de San Juan (Ohkay Owingeh) et nommé Popé (Po'pay) : 21 des 33 missionnaires, et environ 375 colons (sur un total d'environ 2350) sont tués. Les missions sont détruites. Le gouverneur Antonio de Otermin et les colons survivants (environ un millier) se réfugient dans les bâtiments du gouvernement à Santa Fé, où il résistent pendant dix jours à un siège auquel participent environ 3000 Indiens. Les assiégés parvi ennent à se dégager et se replient à El Paso. De crainte que les Espagnols ne reviennent en force, la plupart des Indiens abandonneront leurs villages pour trouver asile sur des terres moins fertiles.

Pendant 12 ans, les Pueblos ont pu ainsi échapper la tutelle des Espagnols, mais pas aux  dissensions internes, ni aux attaques de leurs vieux ennemis, les Navajos et les Apaches. En 1692 Diego de Vargas reconquiert toute la province après une répression sévère et la destruction de plusieurs villages. Par le suite, de tous les pueblos du Nouveau Mexique au début de la révolte (à cette époque, il y avait 33 missions actives, tandis que d'autres n'étaient que de simples visitas), seuls Acoma et peut-être Isleta ont continué à occuper les anciens sites.

En 1696, certains des Pueblos se sont de nouveau rebellés, tuant plusieurs missionnaires, mais ils se sont rendus après avoir été à nouveau sévèrement matés par Vargas. Les troubles qui touchent le Nouveau-Mexique (auquel appartient encore le territoire qui deviendra l'Arizona) provoquent en 1837 un soulèvement parti du village  tewa de Santa Cruz de la Canãda; le gouverneur est mis à mort; un Indien de Taos, nommé José Gonzalez, le remplace, mais le mouvement est rapidement réprimé.

Les Pueblos sous la domination des Etats-Unis.
Il n'y eut plus ensuite de rébellion contre les occupants, si ce n'est peu après que l'armée des Etats-unis ait envahi la région sous le commandement du  général Kearney, en 1846 : dès janvier de l'année suivante, des habitants de Taos tuèrent le gouverneur Charles Bent et quelques autres Américains. L'armée prit alors d'assaut leur village fortifié et l'église de la mission où ils s'étaient réfugiés. Environ 150 Indiens furent tués pendant l'attaque; d'autres furent ensuite jugés et pendus. En 1848, le traité de Guadalupe-Hidalgo, complété par le traité de Gadsden (Gadsden Purchase) en 1853, céda officiellement aux Etats-Unis tout le territoire ainsi occupé. L'Arizona sera détaché du Nouveau-Mexique en 1863. La concession de territoires administrés par les Pueblos (réserves) s'est faite à différentes dates depuis les années 1880 (Hopi); la dernière réserve créée, celle d'Isleta del Sur (Tigua Pueblo), date de 1967. Comme les autres Indiens des Etats-Unis, les Pueblos n'ont acquis la citoyenneté américaine qu'en 1924. Debra Haaland, née en 1960, d'origine kérésane (sa famille maternelle provient de Laguna Pueblo), est la première Amérindienne des Etats-Unis à avoir été élue à la Chambre des Représentants (2018); elle est devenue en 2021 secrétaire à l'Intérieur sous l'administration Biden.
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Carte des populations Pueblos.
Localisation des tribus pueblos au Nouveau-Mexique et (Hopi) en Arizona.

Les Tañoans

Comme pour les autres Indiens Pueblo, les Tañoans sont encore principalement désignés en fonction de leurs pueblos ou villages. Par ordre alphabétique, ce sont Hano (du groupe Hopi-Tewa en Arizona), Isleta (Texas, près d'El Paso), Jemez (Walatowa), Nambe, Ohkay Owingeh (anc. San Juan de los Caballeros), Pecos (un simple vestige, les descendants de ses habitants vivant depuis 1840 à Jemez) , Picuris, Pojoaque, Sandia, San Ildefonso, Santa Clara, Senecu (dans le Nord-Est du Chihuahua, au Mexique, au-dessous d'El Paso), Tangewiñge (un vestige de sous-tribu partageant avec les Keresans le pueblo de Santo Domingo ), Tigua (anc. Isleta del Sur, Nouveau-Mexique), Taos et Tesuque.

Il existe des indications selon lequelles les ancêtres des Tañoans provenaient des localités, aujourd'hui ruinées, situées au nord-ouest de leurs pueblos actuels, et qui étaient abondantes dans le Colorado et l'Utah. De là, on peut tracer leur parcours, vers le sud dans le pays des canyons et des montagnes à l'Ouest-Nord-Ouest des chaînes de Taos, dans le Nord du Nouveau-Mexique. Il semble que les Towa méridionaux et les Jemez aient été les premies à migrer, peuplant le bassin et les vallées affluentes du Rio Grande en aval de Santa Fé, du Nord et de l'Ouest, tandis que des branches Tewa descendaient directement de la vers l'Ouest pour s'étendre progressivement vers l'Est et vers le Sud le long de la partie supérieure de la même rivière jusqu'à leurs villages actuels, ou du moins à proximité de ceux-ci, sur cette rivière et sur ses affluents supérieurs.

Le tañoan est une langue qui appartient à l'une des deux branches de langues uto-aztèques parlées parmi les Pueblos (l'autre branche étant représentée par la langue des Hopi). Au milieu du XVIe siècle, les Tañoans étaient dispersés et divisés en groupes géographiques distincts. Ils ont été diversement nommés par leurs découvreurs et conquérants espagnols, mais sont considérés comme représentatifs de seulement quatre groupes différents  : tiwa, tewa, towa et piro. Les langues auxquelles ces termes renvoient aussi sont de proches parentes.

Répartition géographique et divisions.
Malgré l'intrusion des tribus keresanes Cochitme et Kiwami (qui était relativement récente au moment de la découverte), les Tañoans étaient le peuple par excellence du Rio Grande del Norte. Ils occupaient, avec de légères interruptions, toute sa vallée et quelques de ses affluents périphériques à moins de 70 km de la frontière nord du Nouveau-Mexique jusqu'à 200 km du Mexique, soit une étendue de pays d'au moins 380 km de long sur une largeur variable de quelques kilomètres à près de 160 km.

Les Tewa.
Aujourd'hui, les Tewa occupent des villages dans la région autour du confluent des Rio Grande et Rio Chama (où se trouve le pueblo d'Ohkay Owingeh), au Nord de Santa Fé. D'autres Tewa (les Tewa méridionaux ou Taño), dont la langue semble aujourd'hui éteinte, ont vécu dans le territoire actuel de la ville de Santa Fé et ses environs.

• Les Tewa septentrionaux ont, comme principale localité, le village de Ohkay Owingeh (Jyu-o-tyu te-oj-ke, anc. San Juan), situé sur la rive orientale du Rio Grande, à environ 50 km au sud-ouest de Picuris, à 60 km au nord de Santa Fé. Il avait autrefois comme voisin, de l'autre côté du Rio Grande, le village de Chamito, maintenant en ruines, et auquel Castañeda donnait le nom le Tunque Yunge. C'est de là, probablement, que sont partis, dans la dernière partie du XVIIe siècle, les ancêtres de la majorité des actuels Hopis Tewas, qui vivent aujourd'hui dans certains villages hopi de la Première Mesa. Les pueblos encore habitées de Santa Clara (Ka-po) et San Ildefonso (Pho-ju-o-ge), sur la rive orientale du Rio Grande, respectivement à environ 3 et 8 km au Sud de Ohkay Owingeh, appartenaient également aux Tewas septentrionaux. Les autres villages sont (ou ont été) Pojuaque (Pho-ju-añ-ge), Nambe (Na-im-be) et Tesuque ou Tezuque (Te-tzo-ge), tous ces villages étant assez proches les uns des autres, et à moins de 15 km à l'Est de la vallée principale du Rio Grande.
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Indiens Tewa de Santa-Clara (Nouveau-Mexique)
Tewa de Ka-Po (Santa Clara). (1907).

• Les Tewa méridionaux ou Taño vivaient dans divers villages dans le secteur de Santa Fé,  l'actuelle capitale du Nouveau-Mexique. A l'arrivée des Européens, le village le plus septentrional était Tzi-gu-ma, sur l'emplacement de l'actuel Ciénega, à 20 km au Sud de Santa Fé. A quelques kilomètres au sud-est se trouvait un autre village, appelé Kwa-ka, et renommé  San Marcos. À environ 20 km plus au sud (à Galisteo) se trouvait le principal pueblo des Taño, Tan-ge-wiñ-ge. Dans un rayon de 15 km autour du bassin de Galisteo,on trouvaient encore les petits pueblos de I-pe-re (San Lazaro) , Yam-p'ham-ba (San Cristobal), et Hi-shi (Pueblo Largo). Les habitants de ces villages ont été presque totalement exterminés par les Comanches et les Apaches vers la fin du XVIe siècle ou au début du XVIIe siècle. Quelques fugitifs ont trouvé refuge chez les Keres de Kewa (anc. Santo Domingo), où vivent encore leurs descendants, conservant, comme le font leurs parents Hopi Tewa, leur langue d'origine et leur organisation. 

Les Towa.
Au XVIe siècle, les Towa se divisaient en deux branches : les Jemez, et les Pecos, ces derniers aujourd'hui éteints (ou mêlés à d'autres populations).
• Les Jemez  (ou tribu Teguala) occupent maintenant le pueblo de Jemez (Wa-la to-hu-a ou Walatowa), à 50 km à l'ouest du Rio Grande, sur le Rio Jemez. C'était la branche occidentale des Towa, qui était répartie dans douze ou treize villages, dont le groupe principal se trouvait près des célèbres sources chaudes de San Diego. Ici se trouvaient les grandes ruines de Gwin-se-wa ou Vieux-Jemez (aux sources chaudes elles-mêmes), de A-mox-yum Kwa, Asht-ya-la-kwa, et de quatre autres villages sur les hauteurs plus au Sud. Au-dessous de ceux-ci se trouvaient encore sept ou huit beaux villages. Leurs les ruines peuvent être encore distinctement identifiées, depuis l'endroit où se trouve le Jemez moderne jusqu'à proximité du village keresan de Sia (Zia).
.Jemez Pueblo.
Jemez Pueblo à l'heure de la pandémie de covid-19. Les Amérindiens ont été la minorité la
plus gravement impactée par la maladie à coronavirus aux Etats-Unis. Selon une étude 
publiée en 2021, le taux d'incidence du covid au sein des populations autochtones a été 2 fois 
supérieur à celui constaté chez les Blancs; la mortalité a été 4 fois supérieure (notamment 
à cause de la forte prévalence du diabète dans cette population). (Image Google Streetview).
• Les Pecos (Pae-kwi wa-la), ou branche orientale des Towa étaient séparés par une distance de 130 km de leurs parents occidentaux, chez qui leurs quelques descendants habitent maintenant. Ils occupaient la célèbre ruine de Pecos (Tshikwit-ye, la Cicuye de Coronado), sur le Rio Pecos, à environ 70 km à l'est du Rio Grande et au sud-est de Santa Fé. Ce pueblo était, au moment de l'arrivée des Européens, le plus grand et le plus peuplé du Nouveau-Mexique. Il est probable aussi que les ruines de Ku-wang wa-la (pueblo de las Ruedas) et de Se-yu-pa we-la, près de Fulton, dans le même secteur, étaient occupées par des sous-tribus de ces Pecos.
Les Tiwa.
Les Tiwa sont, proches parents les Towa, sont, eux, divisés en trois groupes, dont les villages actuels occupent à peu près aux mêmes positions que lors de leur découverte par Coronado en 1540-1542.
• Les Tiwa septentrionaux vivent dans deux villages  : Taos (Te-wat-ha, le «-Braba-» de Castañeda et le « Tayberon-» des écrivains espagnols ultérieurs), situés à environ 75 km au Nord-Nord-Estd e Santa Fé, sur un affluent oriental du Rio Grande, et Picuris (Ping-'ultha ou U-la-na, les Picuris d'Oñate, 1584-1585), à 3 km au Sud-Ouest de Taos. 

• Les Tiwa centraux, vivent dans dans la vallée du Rio Grande, autour des pueblos de Sandia, à une trentaine de kilomètres au Nord d'Albuquerque et d'Isleta, à une trentaine de kilomètres au Sud de cette même ville.

• Les Tiwa méridionaux  correspondent aux populations déplacées lors de la révolte de 1680, à Isleta del Sur (Tigua), aujourd'hui absorbé par les faubourgs d'El Paso, au Texas, et à Senecu del Sur (San Antonio de Senecú), dans les faubourgs de Ciudad Juarez, au Mexique.

Pueblo de Taos, au Nord du Nouveau Mexique.
Le pueblo de Taos, au Nord du Nouveau Mexique.

Les Piro.
Il y a eu au moins dix ou douze établissements des Piros répartis de part et d'autre du Rio Grande jusqu'au sud jusqu'à San Marcial. Le plus septentrional d'entre eux (abandonné pour El Paso en 1680) était à Alamillo; un autre pueblo, appelé Pil-a-bo, et peut-être un troisième, occupaient le site de Socorro. À San Antonio se trouvait Se-ne-ku, ou Senecu, qui fut détruit par les Apaches en 1675. Les fugitifs s'enfuirent à Socorro et dans le Chihuahua, près d'El Paso, où ils s'établirent avec les fugitifs d'autres villages dévastés. Le dernier village de la série, et l'exemple le plus méridional des pueblos, étaient encore occupé au moment de la découverte : il s'agissait de Tre-na-quel, à San Marcial. Au sud des Salines et à environ 70 km à l'Est du Rio Grande se trouvaient, dans la vallée d'Abo, les villages Piro d'Abo et Ten Abo (El Pueblo de Los Siete Arroyos), et près de la Mesa de los Jumanos, Tabira (Gran Quivira). Tous ces villages piro, et trois ou quatre autres dans leurs environs immédiats, ont été détruits par les Apaches, entre 1670 et 1680. Leurs habitants s'échappèrent pour s'installer à Senecu del Sur et à Isleta del Sur.

Traits culturels principaux.
Les Tañoans étaient partout les pionniers du pays et des populations Pueblo. Au Nord et à l'Est, ils étaient contigus aux Grandes plaines, et voisins des Utes, des Pawnees, des Comanches, des Apache et d'autres tribus nomades ou chasseuses de bisons. Ils étaient avec eux constamment, soit en guerre, soit en termes d'amitié très précaire au cours de trêves commerciales fréquentes mais brèves. Ainsi, les Tañoans sont devenus plus belliqueux, et plus grands voyageurs, commerçants et chasseurs, que tous les autres Pueblos. 

Leur bellicisme rendait aussi difficiles leurs relations avec les Pueblos eux-mêmes, mais les rendait prééminents et leur assurait le commandement, en cas de confédération générale ou de soulèvement des Pueblos. Les Tañoans du Rio Grande ou d'Isleta (Tiguex) ont été les premiers à s'opposer aux Espagnols, assassinant les premiers missionnaires franciscains au Nouveau-Mexique. Comme on l'a dit plus haut, c'est un chef-sorcier des Tañoans, le célèbre Popé, originaire d'Ohkay Owingeh, qui a incité, planifié et largement dirigé la terrible rébellion des Pueblos de 1680-1696, qui a failli entraîner la chute du pouvoir espagnol au nord du Mexique. Pourtant, la situation géographique très exposée des Tañoans a conduit à l'extermination rapide de groupes entiers de leurs pueblos par les tribus les plus turbulentes peu après l'introduction des chevaux et des armes à feu par les Espagnols, qui, en changeant la nature de la guerre indienne, ont rendu inadéquate la méthode défensive des Pueblos.

Apparence physique. Costume.
Leur mariages pendant des générations avec leurs voisins du Nord, en particulier avec les Utes et les Comanches, ont eu une influence marquée sur leur apparence physique. Les Tañoans typiques (du Nord en particulier) sont grands, larges d'épaules, souples, mais aux membres forts, ressemblant aux Indiens des Plaines à ces égards et à bien d'autres, encore plus qu'aux autres Indiens Pueblos. Les femmes sont plus petites que les hommes, mais plus grandes que la moyenne des femmes pueblos et moins rondes en règle générale. 

Leur costume traditionnel, en revanche, est sensiblement le même que celui des autres Pueblos. Les robes des femmes, bien que plus ornées, sont beaucoup plus courtes. Les hommes portent leurs cheveux comme le font les Indiens des Plaines du Nord, longs et tressés sur les côtés (avec de la fourrure ou des étoffes de couleurs vives entrelacées), au lieu de les réunir à l'arrière en queue de cheval, comme le font les Keresans, par exemple. Ils portent également de longues jambières de peau de daim à la place des pantalons courts et larges ou des bas longs tricotés des autres Pueblos, et pendant longtemps les tenues en peau de félin et de bison ont largement remplacé les tissus rayées ou figurées, caractéristiques de tous les autres Pueblos.

Modes de vie.
La large distribution des Tañoans était le résultat de leur ancienne vie errante. Ils formaient de petites mais nombreuses communautés et le style compact à plusieurs étages (jusqu'à six à Taos) et en terrasses abruptes de leurs pueblos étant dus à leurs guerres constantes et à leurs besoins défensifs. 

En fournissant à tous les pueblos les produits de la chasse au bison, les Tañoans formaient de petits groupes de commerçants, qui pénétraient parfois jusqu'au Sud et à l'Ouest jusqu'au pays pima de l'Arizona et du Nord du Mexique. Leurs descendants sont restés les plus grands voyageurs et les commerçants parmi les Pueblos. Comme ils étaient en mesure d'obtenir ainsi tous les produits artisanaux pueblos, ils dépendaient plus que les autres Pueblos à la fois du troc et de la chasse. Ils travaillaient la terre moins intensivement et recouraient rarement à l'irrigation.

Leur propension à se séparer (en bandes plus ou moins nombreuses) de leurs propres communautés et à rejoindre celles d'autres souches est fortement caractéristique des Tañoans. Ceux-ci sont pourtant restés remarquablement attachés à leur langue, leur organisation et à leurs coutumes.

Chez les Tañoans, la division de chaque tribu en deux corps principaux - les groupes claniques d'hiver et d'été - était plus marquée que chez les autres Pueblos, entraînant parfois des divisions doubles (c'est-à-dire Nord et Sud) de leurs villages, comme on peut le voir encore aujourd'hui à Taos, et l'existence d'au moins deux kivas dans chaque pueblo. Au sein de ces groupes, cependant, se produisaient les subdivisions septénaires habituelles et le système de clans, ainsi que les totems de leurs tribus, n'était pas moins analogue à ceux des autres Pueblos. 

La mythologie des Tañoans, bien que pueblo en principe, est très composite dans sa composition, leurs contes folkloriques étant dérivés de ceux de tous les nombreux peuples avec lesquels ils ont été en relation, ou ou modifiés par l'apport de ces peuples. Leurs danses rituelles relevait plus manifestement de la dramaturgie animale que celui des pueblos Zuñi, et leurs jeux sacrés ou sociaux étaient plus athlétiques que ceux des autres Pueblos.

Les Keresans ( K'eres)

Les Keresans (ou K'eres, leur nom aborigène) sont une population dont la langue constitue un isolat. Ils se divisent en deux groupes, correspondant à deux dialectes distincts. Les Keresan orientaux, aussi appelées Sitsime ou Kawaiko, vivent, sur les rives du rio Grande au Nord Albuquerque, dans les pueblos de San Felipe, Santa Ana, Sia (Zia), Cochiti et Santo Domingo (auj. Kewa). Les Keresan occidentaux, ou Queres, vivent, à l'Ouest d'Albuquerque, dans les pueblos d'Acoma de Laguna et dans quelques petits hameaux alentour.
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Femmes broyant du maïs à Laguna Pueblo.
Femmes broyant du maïs à Laguna Pueblo (1910).

Selon les traditions des Indiens Keresans ceux-ci, venus du Nord, ont lentement migré vers le sud jusqu'au Rio Grande, s'installant dans le secteur de Tyuonyi (sur le Rito de los Frijoles, un affluent occidental du Rio Grande), où ils  construisirent les habitations troglodytiques, creusées dans le tuf volcanique friable, dont les ruines subsitent encore. Bien avant l'arrivée des Espagnols, ils avaient abandonné le Rito de los Frijoles et, se déplaçant encore plus au Sud, s'étaient séparés en un certain nombre de communautés villageoises autonomes. 

Selon Coronado, qui visita la province « Quirix » en 1540, ces Indiens occupaient 7 pueblos; 40 ans plus tard, Espejo en a trouvé 5 ; tandis qu'en 1630 Benavides estimait le nombre de Keresans à 4 000 personnes, réparties dans 7 villages s'étendant sur une quarantaine de kilomètres le long du Rio Grande.

Les Zuñi

Comme la langue des Keresans, celle des Zuñi est un isolat qui résiste aux rapprochements avec les grandes familles linguistiques d'Amérique du Nord.  Ils ont été connus des Européens  dès l'expédition de Marcos de Niza en 1539, et nommé par lui les habitants de Cibola ou Civola. Un terme qui semble une corruption de Shi'-wi-na ou Shi'wo-na, le nom que les Zuñi donnaient alors au pays qu'ils habitaient. Dès 1583, cependant, ces Indiens sont appelés par Antonio de Espejo le peuple de la « province de Zuñi, et par les Espagnols appelés Cibola ». Ce nom tribal de Zuñi aurait été dérivé du keresan Sun'yi-ga ou Su'inyi, signifiant « peuple aux ongles longs » , et faisant apparemment référence à une coutume des guérisseurs indigènes.

Les Zuñi vivent dans le centre-ouest du Nouveau-Mexique. Les sept villages d'origine du Zuñi - les « Sept cités de Cibola », dont la légende recoupe celle de la mystérieuse île d'Antilia - et les terres plus ou moins cultivées qui les entouraient occupaient toute la vallée du rio Zuñi (5 à 15 km de largeur), de la limite orientale de l'Arizona au Canyon du Zuñi, à près de 50 km à l'Est-Nord-Est de cette frontière. Ce territoire et la vallée confluente d'Ojos Calientes étaient la demeure des Zuñis près de quatre siècles avant l'arrivée des Européens. Les villages, déjà abandonnés à l'arrivée de ces derniers, plus à l'Est, au-delà d'Ojo Pescado dans la vallée supérieure du Rio Zuñi et de ses affluents du Sud, étaient propablement encore occupés moins d'un siècle plus tôt par une division des Zuñi appelée A'tâ-akwe, le Peuple du maïs.

A l'époque de l'arrivée des Européens (1540), les Sept Cités comptaient une population estimée à 4000 habitants. La population Zuñi serait tombée à 2500 personnes à l'époque de la révolte de 1680, était estimée à 1600 à la fin du XIXe siècle. Les Zuñi seraient aujourd'hui au nombre de 7000.

Tribus et pueblos. 
A l'époque des explorations espagnoles, au XVIe siècle, les Zuñi étaient divisés en sept communautés tribales, occupant autant de pueblos distincts. Cette dernière circonstance fit naître la légende des « Sept cités de Cibola », et, combinée à la prééminence des Zuñi à d'autres égards, en fit de bonne heure la plus connue et la plus respectée de toutes les tribus de la région aride. Ils étaient considérés par presque toutes les tribus, du Nord de l'Arizona et du Nouveau-Mexique jusqu'au Mexique. comme les chefs de file des arts, du gouvernement et surtout de la magie - comme les «-Pères des Pueblos ».

Les Zuñi ont conservé cette disposition septénaire dans le plan de leur pueblo central ou permanent de Zuñi. Ce village, avec ses bungalows préfabriqués semblables à ceux qu'on peut voir un peu partout dans les réserves indiennes des Etats-Unis, et où ne subsistent qu'une poignée de constructions aux murs en terre sèche, a aujourd'hui largement perdu son caractère traditionnel. Mais il était, jusqu'à une époque relativement récente, en apparence une masse de maisons entassées à une seule terrasse, et en réalité se trouvait divisé en sept portions ou blocs distincts par les cours et les ruelles. Ces divisions correspondaient à la fois dans la distribution et dans la nomenclature indigène aux subdivisions originales du pueblo, et chacune (à l'exception de la septième division ou division moyenne) avait sa propre kiva.

Les habitants de Zuñi occupaient aussi temporairement trois autres villages, appelés pueblos d'été ou pueblos agricoles. Il s'agissait de Tâiakwin ( = le «-lieu de plantation-»), K'ia'pkwainakwin (= le «-lieu des eaux chaudes courantes-») et He-sho-ta-tsi'na-kwin ( = la «-ville bâtie des inscriptions-», ainsi nommée des pétroglyphes sur les murs des maisons les plus anciennes). A Tâiakwin, les clans appartenant au Nord et à l'Ouest avaient leurs quartiers ensemble. Les clans du ceux du Sud et de l'Est étaient hébergés à K'ia'pkwainakwin; tandis qu'à He-sho-ta tsi-na, étaient placés ceux qui appartiennent aux régions supérieure et inférieure. Les maîtres de maison, bien que représentés par des subordonnés dans ces lieux éloignés, étaient censés ne pas quitter le pueblo principal, même pendant l'été. Pendant la saison froide, tout le peuple revenait des villages agricoles et se rassemblait autour d'eux.

Aspects de la vie coutumière. 
Les Zuñi ont attiré l'attention des ethnologues, à commencer par Cushing qui a séjourné chez eux entre 1879 et 1884, par leur religiosité extrême, par leur très fort attachement aux traditions mythologiques, qui s'exprime dans leur culture traditionnele à la fois dans leur poésie et dans l'importance qu'ils accordent à leurs cultes et à leurs diverses cérémonies religieuses, dont l'emprise déborde largement sur la vie quotidienne, même dans ses aspects les plus intimes.

Jusqu'à l'introduction d'articles d'origine européenne dans la seconde moitié du XIXe siècle, le vêtement des Zuñi est similaire à au costume traditionnel des autres Pueblo . Les hommes, en particulier, portaient les pantalettes typiques des Pueblo et des chemises unies assez ajustées, ouvertes sous les aisselles, toutes en coton, tissé localement ou acheté aux Blancs, ainsi que des bandanas en soie rouge ou noire.
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Danse de la pluie à Zuñi Pueblo (vers 1900).

Histoire.
Selon un tradition que les études archéologiques tendent à confirmer, les Zuñi occupaient en des temps lointains la région du Rio Colorado, et, à une époque encore plus reculée, ils étaient descendus dans cette grande vallée par le Nord-Ouest et l'Ouest.

Encore selon les récits traditionnels, les ancêtres des Zuñi actuels ont progressivement pénétré dans la vallée du Rio Zuñi. Une partie d'entre eux s'est éloignée jusqu'au territoire préhistorique des Tañoans, pour revenir longtemps après. Cette composante, imprégnés de coutumes étrangères fut longtemps tenue à l'écart du corps central de la population, et fut reléguée dans le village d'été de Tâiakwin ou dans celui de Las Nutrias, au Nord et à l'Est de Zuñi. 

Une autre division de la tribu a construit la longue série de villages, dont il reste de belles ruines de pierre, commençant dans l'Est de l'Arizona, s'étendant à travers les vallées au Sud du Rio Zuñi au New Mexique, et s'étendant vers  l'Est jusqu'au double pueblo bâti sur le rocher d'El Morro. Les vestiges de leurs réservoirs pavés, de eurs travaux de labourage et d'irrigation, et le caractère supérieur de leurs œuvres d'art, justifient bien leur nom de Peuple du Maïs ou Peuple des Grandes Récoltes. 

Pendant longtemps, le Peuple du maïs a vécu pacifiquement à l'écart des habitants de Zuñi. Il les a rejoints seulementà l'occasion d'une guerre menée contre une série de tribus keresanes à Ma-k'y'a-ta, ou Ma'k'yanawan. Ce dernier pueblo correspondait à la « Province de Marata » dont parle Marcos de Niza, qui nous fait savoir que cette guerre était récente et l'assujettissement des Keres de Salinas et à leur absorption par les tribus du Maïs et Zuñi proprement dite. C'est de cette évolution qu'aurait résulté la réunion en un seul ensemble politique ce qu'on a appelé  les « Sept Cités ».

Au printemps 1539, Estevan, le compagnon de Marcos de Niza, découvrit pour la première fois K'ia'kime, le plus oriental des sept villages zuñi, au pied de Tâaiyalane ou Montagne du Tonnerre. Les habitants de ce village l'ont tué, et le moine qui le suivait n'a dû sa survie qu'à la fuite. Il atteignit cependant sain et sauf les villages voisins, et nous a laissé, le premier et le plus précis récit concernant les Zuñis jamais écrit jusqu'aux études menés par Cushing à la fin du XIXe siècle. En 1540, Coronado suivit avec son armée et attaqua Hawikuh, dont la plus grande partie de la population, avec celle des villages voisins, réussit toutefois à s'enfuir pour se réfugier au sommet de leur forteresse commune, Tâaiyalane. Les Zuñi furent cependant soumis  peu après. Entre 1542 et 1580, Kwakina, le plus occidental des sept pueblos, fut abandonné. Entre 1598 et 1680 Hampassawan et K'ia'nawe ont également été pratiquement désertés sous la pression des raids des Apaches et des Navajos. Hawikuh a été définitivement abandonné en 1672 pour la même raison.

Pendant ce temps, les franciscains avaient établi des missions dans cinq (peut-être six) des villages, mais les Zuñis isolés étaient résistèrent à cette pression religieuse et, en 1630, ils tuèrent deux missionnaires avant de s'enfuir à nouveau dans leur citadelle de la Montagne du Tonnerre.  Au début de la grande rébellion Pueblo de 1680-1692, les Zuñis occupaient les trois villages de Ha'lona, Ma'tsaki et Ki'akime, mais ce soulèvement les poussa à chercher un nouvelle fois leur refuge dans la montagne. Ils reconstruisirent leur citadelle sextuple, ajoutant un septième groupe de bâtiments pour les fugitifs keresans d'Acoma, et restèrent là jusqu'après la paix de Vargas. Quand ils redescendirent, ils occupèrent de nouveau les trois derniers villages mentionnés.

En 1704, les Zuñi ayant tué trois soldats espagnols se sont retirés pour la troisième fois sur leur rocher. C'est quand ils en redescendirent qu'il occupèrent définitivement  l'actuel village de Zuñi. Néanmoins, pour échapper aux ingérences des Espagnols, autant que pour pouvoir célébrer en paix leurs anciens cultes, ils construisirent dans les hautes mesas ( = plateaux tabulaires) au Nord de  Zuñi encore sept autres villages appelées les villages appelés "Pêche" ou "So'noli" (les pêchers avaient été introduits depuis le Sonora au début du XVIIIe siècle) : la plantation de pêchers et l'entretien de leurs vergers leur furent un bon prétexte pour habiter le plus possible à l'écart des Espagnols.

Les Zuñi se sont joints aux Américains lors de la guerre avec le Mexique, et plus tard sous le général Kearny et ses successeurs, ils ont participé à la guerre contre les Navajos, mais après cela, ils sont retournés dans leurs trois villages et ont continué à s'occuper de leurs moutons et de leur bétail et à cultiver leurs champs de maïs et leurs parcelles de blé irriguées, indifférents au monde extérieur, comme c'était leur habitude depuis des siècles. 

Les Hopi

La langue des Hopi (= les "Pacifiques", en langue hopi) appartient au groupe septentrional des langues uto-aztèques, qui comprend aussi les langues numiques (shoshone, comanche, païute, ute, etc.). Elle conserve de nombreuses formes archaïques et son vocabulaire contient de nombreux mots dérivées du tewa, du zuñi, du keresan, du pima, du ute, du navajo et de l'apache; comme dans beaucoup d'autres tribus du Sud-Ouest, certains mots sont aussi dérivés de l'espagnol.

Les Hopi  occupent sept villages sur trois hauts plateaux (mesas) du Nord de l'Arizona. Leur actuelle réserve est enclavée dans la grande réserve Navajo qui occupe tout le Nord-Est de cet Etat. Leur population s'élève à environ 6000 personnes.
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Carte du pays Hopi en 1890.
-Ancienne carte du Pays hopi (1890, par J. W. Fewkes). (Note : Moqui = Hopi).
Costume.
Les vêtements des hommes se composent d'une chemise en calicot et d'un pantalon court, d'une culotte, de mocassins et de bandeaux pour les cheveux. Des bracelets, des colliers de coquillages, de turquoise ou d'argent et des boucles d'oreilles sont couramment portés.Quelques hommes s'habillent en femmes et effectuent des travaux de femmes.

Les femmes portent une couverture de laine bleu foncé de tissage indigène, nouée avec une ceinture brodée, et une manta ou un châle en calicot sur une épaule; leurs mocassins, qui ne sont portés qu'occasionnellement, sont en cuir de boeuf et de daim, comme ceux des hommes, auxquels sont attachés des jambières de la même matière, mais souvent remplacées par de la peau de mouton. Les pendants d'oreilles des femmes et des filles sont constitués de petits disques de bois, ornés de mosaïque turquoise sur un côté. 

Les enfants courent généralement nus, et les vieillards, en travaillant aux champs ou en participant à des cérémonies, se dépouillent de tout habillement, à l'exception du pagne.

Les cheveux des hommes sont communément « plaqués » devant ou coupés en «-terrasses »; les longs cheveux derrière sont rassemblés en une sorte de courte queue de cheval et attachés à la nuque. Les matrones portent leurs cheveux en deux bobines qui pendent devant. A la puberté, les filles coiffent leurs cheveux en verticilles sur les côtés de la tête, à l'imitation de la fleur de courge, symbole de fertilité. 

Agriculture, élevage, chasse.
Le maïs étant la base de leur subsistance, l'agriculture est la principale industrie des Hopi.  Peut-être qu'un tiers de la récolte annuelle est préservé en cas d'échec futur dû à la sécheresse ou à d'autres causes. Il y a aussi des vergers de pêchers , des cultures de haricots, de melons, de courges, de citrouilles, d'oignons, de chili, de tournesols, etc. Le coton, le blé et le tabac sont également cultivés en petites quantités, mais dans les premiers temps, le coton indigène était largement cultivé. Dans les années de sécheresse, les plantes du désert, qui ont toujours été utilisées dans une certaine mesure pour l'alimentation, constituent une partie importante de l'alimentation.

A la fin du XIXe siècle, les Hopi ont commencé l'élevage de moutons et de chèvres. Les troupeaux, acquis à l'origine des Espagnols, fournissent laine et peaux. Ils possèdent également des vachesn des chevaux, des ânes et des mulets. Les chiens, les poulets, les porcs et les dindes sont leurs seuls autres animaux domestiques. Tous les petits animaux du désert sont mangés; autrefois, les antilopes, les élans et les cerfs étaient capturés en étant conduits dans des pièges ou des corrals. Les chasses communales au lapin étaient courantes, les animaux étant tués avec des massues en bois en forme de boomerangs. Les chiens de prairie étaient noyés hors de leurs terriers, les coyotes étainet pris dans des pièges faits de pierres et les petits oiseaux étaient capturés dans des collets.
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Femmes Hopi.
Femmes Hopi vers 1900.

Arts et techniques.
Les maisons des Hopi sont construites en pierre sertie de mortier. L'artisanat est développé et de qualité.

Les Hopi pratiquent le tissage, la teinture et la broderie de couvertures, etc. Leur travail textile révèle une grande variété de tissages. La couverture bleu foncé de la femme Hopi est un article de commerce important parmi les Pueblos, et leurs couvertures de cérémonie brodées, leurs ceintures et leurs kilts en coton se vendent facilement parmi les tribus voisines. Le tissage de la vannerie s'est perpétué plus durablement dans les villages de la Deuxième mesa et à Oraibi. 

Les Hopi sont surtout habiles dans la fabrication de masques et autres accessoires religieux à partir de peaux, et excellent dans la sculpture et la peinture de poupées, représentant des kachinas, qui sont ornées de plumes et de tissus brillants. Ils fabriquent également des jouets mécaniques, qui sont exposés à l'occasion certains de leurs divertissements dramatiques, qui n'ont pas d'égal en Amérique du Nord.

Ajoutons que leurs chants et leurs prières, dont certaines en langues étrangères, comme le Keresan et le Tewa, sont parfois très beaux.

Organisation sociale.
Les Hopi sont divisé en douze phratries, composées de nombreux clans représentés dans chaque village, dont chacun conserve ses légendes et ses cérémonies distincts. De ces organisations claniques sont nées des fraternités religieuses dont les chefs sont encore membres du clan dominant dans chaque phratrie. L'importance relative des clans varie selon les villages; il peut arriver qu'ici certains clans aient complètement disparu, alors que là, les mêmes clans sont très puissants. 

Gouvernement.
L'organe directeur des Hopi est un conseil des anciens des clans héréditaires et des chefs des fraternités religieuses. Parmi ces fonctionnaires, il est reconnu un chef orateur et un chef de guerre, mais il n'y a jamais eu de chef suprême de tous les Hopi. Suivant l'ancienne coutume, diverses activités sont inhérentes à certains clans; par exemple, un clan contrôle la société guerrière, tandis qu'un autre observe le soleil et détermine le calendrier. Chaque pueblo a un chef de village héréditaire, qui dirige certains travaux collectifs nécessaires, tels que l'entretien des sources, etc. 
Le meurtre est inconnu, le vol est rare et le mensonge est universellement condamné. Il semble n'y avoir aucune punition pour le crime, sauf la sorcellerie, à laquelle, selon la loi Hopi, toutes les transgressions peuvent être ramenées. Il existe des traditions d'emprisonnement et de disparition mystérieuse de ceux accusés de sorcellerie dans le passé.

Religion, croyances.
Les Hopi sont avant tout un peuple religieux, une grande partie de leur temps, surtout en hiver, étant consacrée aux cérémonies de pluie et de croissance des cultures. 
Ils croient en la sorcellerie et en diverses forme de divination (présages). Ils reconnaissent un grand nombre d'êtres surnaturels. Ils possèdent par ailleurs une mythologie et un folklore riches, hérités d'un passé lointain. 

Le rituel Hopi est extraordinairement complexe et occupe beaucoup de temps. Leurs cérémonies sont d'une nature élaborée; parmi elles la fameuse «-danse du serpent-», au cours de laquelle les interprètes portent des serpents à sonnettes vivants à leur bouche. Les esprits nommés kachinas (le mot est hopi, mais est utilisé aussi par la plupart des autres Pueblos) sont également célébrés par des danses. Des figurations de ces mêmes kachinas sous forme de «-poupées-» bénéficient d'une vénération particulière.

Bien que leur religion ait fortement été modifiée par l'adoption du mode vie sédentaire reposant sur l'agriculture, elle conserve certaines caractéristiques archaïques : elle consistait à l'origine en un culte des ancêtres, englobant le culte des  puissances de la nature (ciel, soleil, lune, feu), auxquelles se sont ajoutées des puissances plus propres aux religions des sociétés d'agriculteurs (pluie et terre). 

Mythologie.
La mythologie des Hopi est poétique et très imaginative. Elle repose sur un polythéisme largement teinté de culte des ancêtres et imprégné de fétichisme. Leurs plus grands dieux sont des puissances de la nature divinisées, comme la Mère Terre et le Père Ciel. D'eux proècxèdent les humains et les animaux, étroitement liées. 

Selon les récits cosmogoniques des Hopis, la terre a toujours existé. L'espèce humaine n'a pas été créée, mais générée à partir de la terre, d'où l'humain a émergé par une ouverture appelée le sipapu, désormais caractérisée par le Grand Canyon. Les morts sont censés retourner dans le monde souterrain. 

Le Père Ciel et la Mère Terre ont de nombreux noms et sont personnifiés de plusieurs manières; la Mère Terre est représentés par une araignée; le Père Ciel par un oiseau, un faucon ou un aigle. Des noms tels que dieu du feu, dieu germe et autres sont des désignations attributaires des grands pouvoirs masculins de la nature, ou de son principe germinatif masculin.

Tous les êtres surnaturels sont censés avoir une influence sur la pluie et par conséquent sur la croissance des cultures. Chaque clan possède un culte ancestral fort, deux ancêtres tutélaires, l'un masculin et l'autre féminin qui y occupent une pace prééminente.

Le grand serpent à cornes ou à plumes, une forme de dieu du ciel, dérivé du Sud, et introduit par les clans du Sud  est important dans les cérémonies du soleil.

Les kachinas.
Le nombre de personnages surnaturels subordonnés est presque illimité. Ceux-ci sont connus sous le nom de kachinas, un terme faisant référence au pouvoir magique, bon ou mauvais, inhérent à chaque objet naturel. Beaucoup de ces kachinas sont des personnifications d'ancêtres claniques, d'autres sont simplement des êtres de parenté inconnue mais dotés de pouvoirs magiques. Chaque kachina possède des caractéristiques individuelles et est représentée dans au moins six couleurs symboliques différentes.

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Poupées kachinas.
Poupées kachinas. Ces représentations d'esprits ou de divinités jouent
un rôle important dans de nombreuses cérémonies religieuses des Hopi.

L'espace et le temps sacrés.
Les quartiers du monde, ou six points cardinaux, jouent un rôle important dans la mythologie et le rituel Hopi. Les fétiches, les amulettes, les charmes et les mascottes sont couramment utilisés pour assurer la chance dans les occupations quotidiennes, ainsi que pour la santé et le succès dans la chasse, les courses, les jeux et les performances laïques. Le calendrier cérémoniel Hopi consiste en un certain nombre de fêtes mensuelles, généralement d'une durée de 9 jours, dont les 8 premiers sont consacrés à des rites secrets dans des kivas ou dans des salles réservées à cet effet, le dernier jour étant généralement consacré à une spectaculaire cérémonie publique ou « danse ».

L'année cérémonielle est divisée en deux parties, chaque grande cérémonie ayant une représentation majeure et une représentation mineure ayant lieu à environ 6 mois d'intervalle. Tous les 4 ans, lors de l'initiation, la plupart des cérémonies sont célébrées in extenso. Les danses dites du serpent et de la flûte sont exécutées tous les deux ans dans tous les pueblos, à l'exception de Sichomovi et de Hano. Les cérémonies sont également divisées en celles avec des participants masqués et celles avec des participants non masqués, les premières, appelées kachinas, s'étendant de janvier à juillet, les dernières ayant lieu les mois restants de l'année. 

Les fraternités religieuses.
Toute grande fête se déroule sous les auspices d'une ou de plusieurs fraternités ou confréries religieuses particulières, et est préludée, sur une durée d'une vingtaine de jours, par des manifestations mineures. 

Parmi les fraternités religieuses les plus importantes figurent celles du Serpent, de l'Antilope, de la Flûte, du  Soleil, ainsi que les fraternités dites Lalakontu, Owakultu, Mamzrautu, Kachina, Tataukyamu, Wuwuchimtu, Aaltu, Kwakwautu et Kalektaka.

Lors des fêtes, le chef de chaque fraternité porte un insigne propre à celle-ci et dirige à la fois les cultes secrets et les cultes publics de la cérémonie. Les fétiches et les idoles utilisés dans les rites sacrés appartiennent au sacerdoce et sont disposés par son chef dans des autels temporaires, devant lesquels sont réalisées des peintures sèches.

Il existe également d'autres dignités religieuses, comme le Yaya et le Poshwympkia, dont les fonctions sont principalement celles de médecins ou de guérisseurs. Plusieurs prêtres anciens, connus sous les noms de Koyimsi, Paiakyamu et Chukuwympkia, interviennent comme des clowns ou des faiseurs d'amusement pendant les danses sacrées des Kachinas. 
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Kiva de la fraternité du Serpent.
Prêtre pénétrant dans la kiva de la fraternité du Serpent, à Oraibi.

La famille.
Les Hopi sont monogames et, en règle générale, fidèles dans leurs relations conjugales. Ils ont des coutumes de mariage particulières et des rites élaborés dans lesquels les enfants sont dédiés au soleil. Les enfants sont respectueux et obéissants à leurs aînés et ne sont jamais fouettés, sauf lors de leur initiation rituelle en tant que kachinas. Dès leur plus jeune âge, on leur enseigne le travail et la nécessité de mener une vie droite.

Les corps des morts sont cousus dans des couvertures et déposés avec des offrandes de nourriture parmi les rochers des mesas. 

Les Hopi après l'arrivée des Espagnols.
Les explorations du XVIe siècle.
Le premier contact des Hopi avec les Européens date de l'expédition de Coronado en 1540. Celui-ci, alors à Zuñi, envoya deux des membres de son expédition Pedro Tobar et Juan de Padilla, visiter les villages dont les Zuñi avait fait mention dans la province de Tusayan ( = le Pays hopi). L'accueil fut d'abord hostile, mais les deux envoyés purent cependant séjourner quelques jours chez les Hopi, qui leur apprirent l'existence du Grand Canyon (reconnu la même année par Garcia lopez de Cardenas). Les noms des pueblos de Tusayan n'ont pas été consignés par les chroniqueurs de l'expédition, de sorte qu'à l'exception d'Oraibi, Shongopovi, Mishongnovi, Walpi et Awatobi, on ne sait pas avec certitude quels villages étaient habités à cette époque. En omettant Awatobi, qui a été détruit en 1700, et peut-être Oraibi, aucun de ces villages n'occupe maintenant son site du XVIe siècle.

Francisco Sanchez Chamuscado, qui visita Zuñi en 1581 et parle du pays Hopi mais ne put s'y rendre à cause de la neige. Deux ans plus tard, la province sera visitée par Antonio de Espejo. Celui-ci mentionne cinq grands villages, mais ne donne le nom que de l'un d'eux, Aguato ( = Awatobi), sur Antelope Mesa. C'est ensuite au tour de Juan de Oñate, gouverneur et colonisateur du Nouveau-Mexique, d'explorer le Pays hopi qu'il appelle le Mohoqui (Moki ou Moqui est le nom par lequels les Hopi ont longtemps été connus; c'est une appellation de signification inconnue et qui pourrait dériver d'un mot keresan). Les cinq villages à cette époque, pour autant qu'il soit possible de les déterminer, étaient Aguato  ( = Awatobi), Gaspé ou Gualpé ( = Walpi), Comupavi ou Xumupami ( = Shongopovi), Majanani ( = Mishongnovi), et Olalla ou Naybi ( = Oraibi).

Les missions.
La première tentative d'installation de missions chrétiennes en Pays hopi date de 1629. Quatre missionnaires escortés de douze soldats établirent une première mission à Awatobi, puis à Walpi, Shongopovi, Mishongnovi et Oraibi. L'un de ces missionnaires fut empoisonné par les habitants d'Awatobi en 1633, et les autres missions euront toujours une existence précaire jusqu'en 1680, lorsque, à l'occasion de la révolte générale des Pueblos, quatre missionnaires résidents furent tués et leurs églises détruites. 

Aucune tentative ne fut faite ensuite pour rétablir aucune des missions, sauf celle d'Awatobi en 1700, qui exaspéra tellement les autres Hopi qu'ils l'attaquèrent une nuit et tuèrent beaucoup de ses habitants. Le village fut alors définitivement abandonné. Les murs de l'église de la mission d'Awatobi, construite probablement dès 1629, sont encore en partie debout. 
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Walpi, pueblo hopi.
Les village de Walpi vu de l'Est, sur la Première mesa (vers 1900).

Les Hopi après la révolte de 1680.
Les pueblos de Walpi, Mishongnovi et Shongopovi, alors bâtis sur les contreforts des mesas, ont probablement été abandonnés à l'époque de la rébellion Pueblo, et de nouveaux villages ont été construit sur les sommets des mesas adjacentes dans le but de se défendre contre les Espagnols. 

• Les clans originels de Walpi auraient occupé trois sites après leur arrivée en pays Hopi, s'installant d'abord sur la terrasse occidentale de la Première Mesa (Mesa orientale), puis plus haut et vers le sud, où les murs de fondation d'une église de mission espagnole peuvent encore être vus. De ce point, ils se sont déplacés vers l'actuel Walpi au sommet de la mesa, apparemment peu de temps après la révolte des Pueblos de 1680. 
• Les ruines du vieux Mishongnovi (Deuxième Mesa) se trouvent sur la terrasse au-dessous du pueblo actuel. Le tracé de ses murs est à peine discernable. On a exhumé dans son cimetière une belle poterie, ressemblant à celle de Sikyatki (V. ci-dessous).

• Le vieux Shongopovi s'étendait sur les contreforts à la base de la Deuxième Mesa (Mesa centrale), au-dessous du pueblo actuel de ce nom. Ce village était encore habité à l'époque de l'arrivée des Espagnols, qui y ont construit une église dont les murs ont servi plus tard de corral (= enclos)  pour les moutons. Ses habitants venaient de la vallée du Petit Colorado.

La reconquête des pueblos du Nouveau-Mexique a aussi conduit nombre de leurs habitants à chercher protection chez les Hopi. Certains d'entre eux, appartenant au peuple Tañoan (apparemment des Tiwa), ont construit vers 1700 le pueblo de Payupki, sur la Deuxième mesa, mais, celui ci a été abandonné vers 1742, lorsque ses habitants ont été capturés et ramenés dans la vallée du Rio Grande pour être installés à Sandia.

Vers l'an 1700, des Tewa venus du Nouveau-Mexique ont aussi construit Hano, près de Walpi,  sur la Première Mesa. Ils y ont ensuite vécu sans interruption et, bien qu'ils se soient souvent mariés avec les Hopi, ils ont conservé leur langue maternelle et bon nombre de leurs coutumes tribales. 

Sichomovi, entre Walpi et Hano, qui a été construit par les clans Asa du Rio Grande, et Shipaulovi, qui a été fondé par une colonie de Shongopovi sur la Deuxième mesa, sont deux pueblos d'origine relativement moderne. Ils ont été établis vers le milieu du XVIIIe siècle, soit à peu près à l'époque où les Payupki retournèrent dans leur ancienne demeure. 
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Mishongnovi.
Mishongnovi, sur la Deuxième mesa. Au fond, à droite, on devine la silhouette de Shipaulavi.

Archéologie.
La construction et l'abandon définitif de leurs villages par les divers clans Hopi au cours de leurs migrations et déplacements successifs ont laissé de nombreuses ruines, constituées aujourd'hui en grande partie de monticules. Ces ruines se trouvent à la fois sur leur territoire actuel et éloignés de celui-ci. On a déjà donné quelques exemples. 

Mentionnons encore Chukubi, qui est un pueblo préhistorique à mi-chemin entre Payupki et Shupaulovi (Deuxième mesa), et qui a probablement été construit par des clans du sud, dont les descendants forment la majeure partie de la population actuelle des villages de la Mesa centrale.

Au nord des mesas Hopi actuelles sont des ruines à Kishuba, où vivait autrefois le clan Kachina, et à Lengyanobi, la maison du clan hopi de la Flûte. Les ruines le long du petit Colorado inférieur, près de Black Falls, connues sous le nom de Wukoki, et celles appelées Homolobi, près de Winslow, sont également revendiquées par les Hopi comme les foyers de clans ancestraux. Wukoki a peut-être été habité par le clan du Serpent, tandis que les habitants d'Homolobi étaient liés aux clans du sud qui allèrent à Walpi et à Zuñi.

Il existe aussi sur l'actuel territoire occupé par les Hopi, des ruines de villages qui ont été habités par d'autres tribus de Pueblos. On a mentionné Payupki, citons aussi Sikyatki, dont les ruines sont sur les contreforts de la Première Mesa. Ce village était occupé à l'époque préhistorique par les clans Kokop (Keresans orientaux). Ses habitants avaient atteint un haut développement artistique comme en témoigne leur poterie, qui est probablement la plus belle vaisselle jamais fabriquée par les Indiens du Nord du Mexique.

Certaines des ruines les plus importantes du pays Hopi sont situées sur le bord de la d'Antelope Mesa, à l'Est d'Awatobi, et sont également des vestiges de villages  keresans (ex. : Kawaika, Chakpahu). Dans le même secteur se trouvent aussi les ruines de Kokopki, pueblo autrefois habité par un clan originaire de Jemez Pueblo.-



En librairie. - Don Talayesva, Soleil Hopi, autobiographie d'un Indien Hopi chef du clan du Soleil, Pocket, 2005. - Jean Cazeneuve, Les Indiens Zunis, les dieux dansent à Cibola, Ed. du Rocher, 1993. -  F. H. Cushing, Zuñi mythology, Format Kindle (en anglais).

Susanne Berthier-Foglar, Les Indiens Pueblo du Nouveau-Mexique, de l'arrivée des conquistadors à la souveraineté des nations pueblo, PU de Bordeaux, 2010. - Marco Antonio Gutiérrez Martínez, Popé (Po'pay) dans la rébellion des Indiens Pueblo de 1680 : Une étude sur le leadership dans les rébellions indigènes, Ed. Notre savoir, 2021.

Joe S. Sando, Les Pueblos de l'Ouest, éd. du Piat, 2017. -  David Grant Noble, Les Indiens Pueblos, Phaidon, 2016 . - Jean-Pierre Protzen, Les Indiens Pueblos, Picard, 2013. - Marc Thouvenot, Les Pueblos d'Amérique du Nord, Karthala, 2011. - Jonathan Till, Les Indiens Pueblos, Belin, 2010. - James Green, Les Pueblos, Hazan, 2009.

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