| Juan Melendez-Valdès est un célèbre poète né à la Ribera del Fresno (Estramadure) le 11 mars 1754, mort à Montpellier le 21 mai 1817. Etudiant en droit de l'université de Salamanque, il y fut remarqué par le poète Cadalso qui le prit dans sa maison et se fit son maître littéraire avec un dévouement incomparable. Il attira son attention sur les trésors de la vieille poésie castillane et le familiarisa avec les oeuvres des poètes contemporains. Melendez obtint, en 1780, le premier prix au concours institué par l'Académie espagnole pour son églogue Batilo, ou « Eloge de la vie champêtre », qui « sentait le thym », selon l'opinion d'un des juges. Dès l'année suivante, son autre protecteur, l'éminent magistrat et écrivain Jovellanos, le fit venir à Madrid, et il exerça sur son talent une influence salutaire. L'académie San-Fernando décerna à Melendez le prix pour son odeA la gloria en las artes, et il ne tarda pas à obtenir la chaire de professeur d'humanité à l'université de Salamanque, objet de ses vifs désirs. En 1782, il consacra à la mort de son ami Cadalso, tué au siège de Gibraltar (L'Espagne au XVIIIe siècle), une poésie inspirée. La comédie pastoraleLas Bodas de Camacho (les Noces de Gamache), couronnée par la ville de Madrid à un concours occasionnel (1784) n'eut aucun succès sur la scène. Le premier recueil de ses poésies lyriques qu'il publia en 1785 produisit une sensation extraordinaire. Dans ses anacréontiques, il dépassa Villegas, et ses romances séduisirent le public par leur grâce et la tendresse des sentiments qui y sont exprimés. Mais, non content de sa gloire de poète, il voulut jouer un rôle dans la magistrature. Il fut successivement juge à la cour de Saragosse (1789), membre de la chancellerie à Valladolid (1791), avocat général (fiscal) à la cour suprême de Madrid (1798). Il dut ce dernier poste à la faveur du puissant prince de la Paix (Godoy), à qui il avait dédié la seconde édition de ses Poesias (Valladolid, 1797, 3 vol. pet. in-8), augmentée du plus du double de pièces, d'un caractère plus grave et plus philosophique. La disgrâce de son ami Jovellanos, alors ministre de la justice (27 août 1798), s'étendit à lui aussi : il fut exilé à Medina del Campo, puis à Zamora, et ce n'est qu'en 1802 qu'il lui fut permis de retourner à Salamanque. Après la chute de Godoy (1808), il put regagner Madrid, et ne tarda pas à s'attacher au gouvernement de l'invasion. Chargé d'une mission à Oviedo, il y faillit être massacré par la populace. Plus tard, sa maison de Salamanque fut saccagée et sa bibliothèque détruite par le parti français. Enfin, il offrit définitivement ses services au roi Joseph, qui le nomma conseiller d'État et ministre de l'instruction publique. Avec l'effondrement de la domination française, l'exil s'ouvrit pour lui, et il vécut les quatre dernières années de son existence dans la pauvreté et la douleur. L'édition définitive de ses poésies, préparée par lui en émigration, fut publiée aux frais du gouvernement espagnol; avec une biographie du poète par Quintana (Madrid, 1820, 4 vol. in-8.). Vincente Salvà en a donné une réimpression à Paris (1832, 4 vol. gr. in-18). L'édition de Paris (sous la rubrique de Madrid) de 1821 (3 vol. in-18) a été faite sur celle de 1797. Les poésies de Melendez sont aussi comprises dans la Biblioteca de Rivadeneyra (1871, t. LXIII). Ses discours et réquisitoires, pleins de vigueur et d'éloquence, ont été réunis sous le titre de Discursos forenses (Madrid, 1821, in-8). Comme poète, ce fut avant tout un génie de grâce, de douceur et de pureté. On l'a bien caractérisé en l'appelant « le doux Melendez », quoique certaines de ses compositions ne manquent point de force. Sa langue est riche et sa versification d'une limpidité étonnante. Et précisément parce qu'il avait su s'assimiler les qualités des littératures étrangères de son temps, qu'il aurait pu, bien plus que tout autre, imprimer une nouvelle direction à la poésie nationale, s'il n'avait pas été détourné de sa mission par des événements politiques. (G. Pawlowski). | |