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L'Église écossaise

Les écrits de Luther pénétrèrent en Ecosse vers 1525. Les principes de la Réforme y furent activement propagés par le jeune Patrick Hamilton, de la famille des comtes d'Arran, qui mourut sur le bûcher, en 1527, à peine âgé de vingt-quatre ans. Par des mesures d'une rigueur extrême, le cardinal Beaton s'efforça d'entraver les progrès du protestantisme. Mais l'exécution de Wishart (1546) mit le comble à l'exaspération populaire. Le cardinal périt lui-même assassiné peu de temps après. Dans les années qui suivirent, la lutte fut ardente entre les réformateurs soutenus par le peuple et la noblesse d'une part, et l'Eglise défendue par la couronne, de l'autre. C'est dans ces conjonctures que parut sur la scène John Knox, le véritable organisateur du parti protestant en Ecosse. A son instigation, les membres de la noblesse protestante forment une ligue puissante sous le nom de The Lords of the congregation. Ils dominent bientôt tout le pays. Aussi, quand le Parlement se réunit en 1560, un de ses premiers actes fut-il d'interdire l'exercice de la religion catholique. Le 17 juillet, une confession de foi (Confessio Scotica) reproduisant les principales doctrines de l'Institution chrétienne de Calvin et rédigée en grande partie par Knox, fut solennellement adoptée. Quelques mois plus tard, la première assemblée générale de l'Eglise se réunit (décembre) et s'occupe de la rédaction du Livre de discipline. On y traite toutes les questions relatives à l'organisation des congrégations individuelles. Le Second Livre de discipline parut seulement à l'assemblée générale de l'Eglise de 1578. Il complète le premier et a surtout pour objet de régler les rapports des congrégations avec les cours ecclésiastiques supérieures. Le point de départ du système presbytérien qui prévaut en Ecosse est l'administration de l'Eglise par des ministres et des anciens nommés par les fidèles. Toutes les questions pendantes ressortissent à quatre tribunaux ou cours ecclésiastiques : 
1° le conseil presbytéral ou kirksession; 

2° le consistoire ou presbytery; 

3° le synode provincial; 

4° l'assemblée générale. 

Chaque cour est présidée par un modérateur élu par ses collègues. Les ministres sont éligibles. On peut appeler des sentences de ces tribunaux à l'assemblée générale, dont les décisions sont irrévocables.

Dans la seconde moitié du XVIe siècle, la cause protestante, défendue par Knox sous Marie Stuart et par André Melville sous Jacques VI, ne cesse de gagner du terrain. A la mort de Marie Stuart (1586), l'Angleterre et l'Écosse, longtemps ennemies, se rapprochent dans la poursuite d'un but commun : l'établissement du protestantisme chez elles. Telle était la situation de ces deux pays quand Jacques VI monta sur le trône d'Angleterre (1603). Tout semblait annoncer l'avènement d'une ère de paix intérieure. Mais les Stuarts, mal conseillés par Laud, en imposant l'usage de la liturgie anglicane aux protestants d'Ecosse, s'aliènent l'affection de leurs sujets. Les presbytériens se révoltent contre le parti des prélats. Ils s'engagent par le Solemn league and Covenant (1638) à exterminer leurs adversaires et contribuent, avec les parlementaires d'Angleterre, à l'établissement de la république et du protectorat de Cromwell. Leur triomphe est le triomphe de leur Eglise. Ils complètent son organisation en abolissant le droit que s'arrogent les seigneurs de nommer les titulaires aux fonctions pastorales. Renchérissant sur les doctrines de la confession de foi de Knox, ils adoptent la confession plus rigide de Westminster (1647). Mais à la restauration des Stuarts, en 1660, l'épiscopat fut réintégré dans tous ses privilèges. Pendant vingt-huit ans, sous les règnes de Charles II et de Jacques II, les presbytériens furent persécutés sans merci. Aussi accueillirent-ils avec enthousiasme la révolution qui renversa ce dernier.

Un des premiers actes du Parlement appela Guillaume III d'orange à monter sur le trône Angleterre fut de ratifier l'établissement du presbytérianisme en Ecosse (1690). Pour cette histoire. Les attaques venant du dehors ne tardèrent pas à être remplacées par des luttes incessantes entre les congrégations et les seigneurs, au sujet du patronage. Tant que régna Guillaume III, les églises n'eurent pas à souffrir de l'intrusion (c'est ainsi qu'on désignait la prétention des seigneurs de nommer les titulaires aux chaires vacantes) et s'administrèrent elles-mêmes. Mais, quand le traité d'union entre l'Angleterre et l'Ecosse fut définitivement signé (1707), le patronage qui était tombé en désuétude fut remis en honneur. C'était un moyen pour la couronne de se concilier les sympathies de la noblesse écossaise. Quelques années plus tard, en 1712, quand le parti tory (Tories et Whigs), représenté par Harley et Bolingbroke, arriva au pouvoir, on se hâta de confirmer les privilèges accordés aux seigneurs. L'Eglise d'Ecosse se trouva dès lors divisée en deux camps :

1° les moderates, partisans de la soumission à tout prix, quelque peu indifférents sur les questions de doctrine, disposés à faire de l'Eglise une institution de l'Etat; 

2° les évangéliques, presbytériens convaincus, conservateurs des traditions primitives, hostiles à l'intrusion sous toutes ses formes. 

Telle était la situation intérieure de l'Eglise au XVIIIe siècle. L'organisation presbytérienne était ouvertement foulée aux pieds. Aussi, devant la violation de leurs droits, vit-on de nombreux fidèles quitter l'Eglise à différentes époques et fonder des congrégations nouvelles avec des pasteurs de leur choix. La première en date de ces communautés dissidentes fut créée par Ebenezer Erskine, pasteur de Stirling (1733) et fut désignée sous le nom de Associate Synod. Les séparatistes (seceders),auxquels se joignirent trois autres pasteurs, Wilson, Moncrieff, Fisher, attaquèrent l'Église au double point de vue doctrinal et disciplinaire. Leur exemple fut imité par d'autres. En 1761, un groupe important de fidèles suivit le pasteur Thomas Gillespie révoqué par l'assemblée générale peur avoir refusé d'installer un titulaire imposé à une congrégation en vertu du patronage. Ce parti forma le Presbytery et relief ou Eglise de la délivrance. Malgré la division de l'Associate Synod, en 1747, en burghers et antiburghers sur la question de la prestation du serment en matière politique, les deux puissantes communautés dissidentes fondées par Erskine et Gillespie eurent, pendant de longues années, une existence très prospère. Une foi commune et une situation semblable vis-à-vis de l'Eglise d'Ecosse devaient opérer tôt ou tard entre elles un rapprochement. En 1847, elles se constituèrent en un seul corps sous le nom de Synod of united original seceders ou Eglise presbytérienne unie. Cependant, l'Eglise d'Ecosse continuait à subir le système des intrusions. Les plaintes des congrégations devinrent de our en jour plus nombreuses et plus pressantes. L'assemblée générale des Eglises se vit forcée, en 1834, d'accorder aux fidèles le droit de veto contre l'installation de tout pasteur n'ayant pas leur confiance. Mais le conflit ayant été porté devant les tribunaux, ceux-ci se déclarèrent contre les congrégations en faveur des patrons. Cette décision provoqua une indignation générale. Thomas Chalmers, président de l'assemblée, se mit à la tête des mécontents. Il se sépara de l'Eglise établie d'Ecosse avec quatre cent soixantedix pasteurs (18 mars 1843) et fonda l'Eglise libre. A partir de ce moment, l'Eglise d'Ecosse ne comprend plus que la minorité des habitants de ce pays. 

Son union avec l'Etat lui a été fatale. En 1874, l'abolition du patronage a consacré le triomphe du parti évangélique. Ainsi, dans cette longue lutte entre les congrégations et les patrons, la victoire est restée aux congrégations. (G. de La Quesnerie).

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Dictionnaire Religions, mythes, symboles
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