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Césure
On nomme césure (du latin cesura, coupe, coupure) la  partie du vers qui semble coupée et où l'on observe un repos plus ou moins sensible :
Le crime fait la honte | et non pas l'échafaud.
(Th. Corneille, le Comte d'Essex, IV, 3).
Il y avait en grec 5 sortes de césures : 
1° la trihémimère, venant après 3 demi-pieds ou 1 pied et demi, dans
les vers hexamètres héroïques; 

2° la penthémimère, après 5 demi-pieds ou 2 pieds et demi;

3° la hephthémimère, après 7 demi-pieds ou 3 pieds et demi; il n'est pas rare de trouver concurremment deux de ces césures ou toutes les trois. 

On trouve aussi la césure après le 4e pied, soit seule, soit avec une, deux ou trois autres; 
4° la trochaïque, très fréquente, surtout au 3e pied, et ainsi nommée parce qu'elle porte sur un trochée ou trois quarts de pied, tandis que les césures précédemment énumérées portent sur une longue ou un demi-pied. Il y a peu d'hexamètres héroïques où elle ne se trouve concurremment avec l'une de celles-ci, et on la rencontre environ une fois sur dix vers employée toute seule; 

5° la bucolique, ainsi appelée parce que les poètes bucoliques la recherchaient. Elle consiste à couper le vers sur un dactyle au 4e pied.

Le pentamètre élégiaque admettait la trihémimère et la penthémimère seules, le 4e et le 5e pied étant anapestes. La césure du vers ïambique avait lieu après le 1er, le 2e, le 3e pied; le nombre en était facultatif; mais s'il n'y en avait qu'une, sa place était au commencement du 3e pied. Il va de soi que la césure tombait toujours sur une brève lorsque l'ïambique était pur. Il existait aussi des césures de l'alcaïque, de l'asclépiade, du saphique, du phalécien, etc..

Les césures furent d'abord employées par les poètes latins suivant les règles puisées dans les modèles grecs; mais les conditions d'harmonie n'étant pas toujours les mêmes dans les deux langues , on adopta, au siècle d'Auguste, un système plus conforme au latin, du moins dans les genres très élevés, comme l'épopée et la poésie didactique; les trois premières espèces de césures furent consacrées : il en fallait au moins une après le 2e pied, sinon, une après le 1er, et une après le 3e; il pouvait y en avoir une après les deux premiers  pieds ou après le 2e et le 3e; il pouvait même y en avoir trois.

On rejeta la césure trochaïque toutes les fois qu'elle n'était pas précédée de la trihémimère et suivie de l'hephthémimère : si on la trouve quelquefois avec l'une des deux seulement, c'est qu'il en résulte un effet poétique, une cadence heureuse, une peinture saisissante et vraie. Quant aux césures longues, tombant au 5e et au 6e pied, elles furent bannies pour des raisons dont l'oreille des Romains pouvait être seule juge; mais on les admit encore dans certains cas : 

1° lorsque le vers se terminait par un mot d'origine grecque; 

2° lorsque cette irrégularité faisait image;

3° dans la poésie presque familière des épîtres et  des satires, dont la versification se rapproche beaucoup de l'ancienne facture latine, et par conséquent de la facture hellénique.

En français, la césure est ordinairement après la 6e syllabe du vers alexandrin; mais pour des effets de style ou de pensées, il est quelquefois permis de la déplacer; ex. :
L'esprit qu'on veut avoir | gâte celui qu'on a. 
(Gresset, le Méchant).

Qui depuis... mais alors il était vertueux.
(Racine, Britannicus).

Dans le vers de dix syllabes, elle vient après la 4e :
Mais aussitôt | que l'ouvrage eut paru,
Plus n'ont voulu | l'avoir fait l'un ni l'autre. 
(Racine, Épigrammes).
Cette césure est obligatoire; mais le vers peut être coupé à d'autres endroits pour produire un effet poétique. (P.).
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