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La peinture
fut cultivée de bonne heure en Allemagne.
II ne reste rien des peintures murales
dont Charlemagne avait fait décorer son
palais d'Aix-la-Chapelle. A la fin du
IXe
siècle,
Raban Maur, abbé de Fulda,
donna les dessins d'après lesquels furent
exécutées, les peintures de l'église de
Mayence.
Au siècle suivant, on représenta dans les palais de Mersebourg et de
Magdebourg les victoires de Henri l'Oiseleur
et d'Othon le Grand sur les Hongrois: Les
ecclésiastiques étaient alors les principaux protecteurs de l'art; Bernard,
évêque d'Hildesheim, emmenait dans ses
voyages plusieurs artistes, pour copier les oeuvres remarquables; Meinwerk,
évêque de Paderborn, attachait à son église une école de peinture.
Pendant les XIe
et XIIIe siècles,
les églises et les palais furent décorés de peintures, qui sans doute
n'étaient que des ébauches grossières, mais dont le nombre atteste du
moins combien le goût des arts était répandu. De tous ces anciens travaux
rien n'a survécu; on possède seulement quelques manuscrits enluminés,
que conservent les bibliothèques de Munich et de Bamberg.
Il y eut aux XIIIe
et XIVe siècles,
dans la ville de Cologne, une école
célèbre, où l'on suivait les principes de l'art
byzantin
: ce sont, en effet, les mêmes fonds d'or, la même raideur des poses
et des draperies, la même absence de perspective. Toutefois, on remarque
dans cette école, dont quelques oeuvres existent à la galerie de Munich
et dans les églises des bords du Rhin, la
tendance à s'éloigner du caractère typique imprimé à la peinture
par les Byzantins, et à substituer le génie individuel de l'artiste Ã
la règle liturgique. Déjà l'école allemande prend un cachet particulier;
elle imite la nature, mais sans la poétiser; privée des ouvrages de l'Antiquité
qui eussent pu diriger son goût, moins portée que les écoles
italiennes vers la beauté des formes, elle imprimera à ses oeuvres
un caractère plus simple qu'idéal, plus naïf qu'héroïque. La Bohème
avait, au XIVe
siècle, son école distincte, que représentent Nicolas Wurmser,
Kunze et Théodoric de Prague, et dont les
oeuvres principales sont au château de Karlstein,
près de Prague, et à la galerie de Vienne : on y dessinait moins exactement
que dans l'école de Cologne, où brillaient Wilhelm et Stephan. Les archéologues
reconnaissent aussi une école westphalienne, à laquelle appartient sans
doute le Christ entouré de quatre saints, qui décorait jadis le
cloître
de Saint-Walbourg à Soest, et qu'on voit aujourd'hui à Munster; et une
école bavaroise ,
dont un bon nombre d'ouvrages ornent les églises Saint-Sébald et Saint-Laurent
à Nuremberg.
Dans l'art
byzantin ,
la mosaïque était spécialement employée
à la décoration des monuments. Avec l'architecture ogivale ,
la peinture
sur vitraux prit naissance. Dès le XIe
siècle, une verrerie était installée au monastère
de Tegernesee. Les plus beaux produits de la peinture sur verre
jusqu'au XVe siècle
furent les vitraux des cathédrales de
Strasbourg,
de Fribourg, d'Augsbourg, de Francfort,
d'Ulm et de Nuremberg,
de l'église Sainte-Élisabeth à Marbourg.
Parmi les artistes on cite : St Jean l'Allemand, qui orna de ses oeuvres
plusieurs églises d'Italie; Paul et Christophe,
qui allèrent travailler à la cathédrale de Tolède; Jean de Kirchheim,
auteur des vitraux de Strasbourg; Judmann d'Augsbourg, Pierre Baker de
Nordlingen, Volckhamer, Hirschvogel de Nuremberg, Jean Wild, Jean Cramer
de Munich, etc.
Jusqu'au XVe
siècle, les peintres s'étaient servis de couleurs à la détrempe,
avec lesquelles ils peignaient sur les murs, sur des panneaux de bois,
ou sur des toiles enduites de plâtre. La découverte de la peinture
à l'huile, perfectionnée par Van Eyck ( L'école
de Bruges), accéléra la marche de l'art, et les Allemands,
abandonnant entièrement le style byzantin ,
se mirent à imiter l'école Flamande.
Alors parurent Isaac de Meckenen, Frédéric Herlin de Nordlingen, Martin
Schoen, supérieurs à tous les autres peintres du même temps. Plus d'originalité
existe chez Michael Wolgemut de Nuremberg, Martin Zagel et Jacob Walch.
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Portrait
d'Ursula Tucher (1478),
par
Michael Wolgemut.
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Le
Martyre de saint Jean (1440),
par
Stefan Lochner.
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Les origines des
écoles allemandes.
De la Flandre à l'Allemagne, la transition
est facile; entre les deux pays se sont établies d'étroites relations
artistiques. La fidélité y est grande aux traditions gothiques; longtemps
elles se maintiennent, sans qu'on surprenne la préoccupation marquée
de l'Antiquité ou de l'Italie; mais dans tous les arts plastiques s'accentue
la tendance au réalisme. Elle est visible chez les sculpteurs, dont plusieurs,
Adam Krafft, Pierre Vischer, Veit Stoss, qui tous trois ont travaillé
à Nuremberg, montrent beaucoup de vérité
et de vie : le tombeau de S. Sebald à Nuremberg, que P. Vischer exécuta
de 1508 Ã 1510,
est l'oeuvre maîtresse de la sculpture
allemande à cette époque. Cependant la peinture devient l'art par
excellence.
Dès le XIVe
siècle, des écoles fleurissent à Prague,
à Nuremberg, à Cologne surtout. L'école
de Cologne a produit des oeuvres d'une candeur d'expression et d'une fraîcheur
de coloris exquises.
Stephan Lochner (mort en 1452) en fut
le maître par excellence (ses oeuvres se trouvent à la cathédrale
et dans les musées de Cologne). Ces mêmes qualités, avec un remarquable
don d'expression dramatique, se retrouvent chez un peintre qui travailla
à Hambourg, dans la première moitié du
XVe
siècle, maître Francke (ses oeuvres sont à la Kunsthalle
de Hambourg). Martin Schongauer ou Schoen, de Colmar
(vers 1450-1491),
peut-être élève de Van der Weyden, outre quelques
tableaux, a laissé de nombreuses gravures burinées avec fermeté et souplesse.
L'Allemagne a disputé, non sans raison, à l'Italie
l'honneur d'avoir pratiqué la première la gravure sur cuivre; des artistes
habiles en ce genre avaient même précédé Martin Schoen.
Le commencement au XVIe
siècle vit fleurir les principaux maîtres de l'art allemand.
Ce fut alors qu'Albrecht Dürer personnifia dans
sa plus grande originalité la peinture en allemagne pour le pittoresque,
et son penchant vers le fantastique : peintre assez fécond pour que toutes
les galeries importantes aient pu posséder plusieurs de ses tableaux,
coloriste plein de fantaisie dans le jeu de la lumière et des ombres,
graveur inventif et d'une rare finesse, Dürer introduisit dans l'école
allemande une manière plus franche et plus libre, et exerça sur les pays
voisins une grande influence, dont les Italiens Jean
Bellini, André del Sarto, Pontormo, etc.,
ne cherchèrent pas à s'affranchir. Sur ses traces marchèrent Jean de
Kulmbach, Scheuffelin, Aldegrever, Altdorfer,
Beham,
Pens, Grunewald de Nuremberg, Gutlinger et
Burgmaier d'Augsbourg. A la même époque,
Lucas
Cranach était le chef d'une école rivale en Saxe. Dans la haute Allemagne ,
à Ulm, une autre école encore avait pour représentants Zeitblom
et Martin Schaffner. Enfin, Hans Holbein, d'Augsbourg,
avant d'aller se fixer en Angleterre ,
forma à Bâle une école qui a illustré la
Suisse, et qui compte parmi ses maîtres Asper, Amberger, Stimmer, Amman,
Meyer, les Füssli, etc.
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Saint-Jérôme
(détail d'un diptyque), par A. Altdorfer (1507).
Albrecht Dürer.
C'est chez A. Dürer (1471-1528)
que l'originalité de la peinture germanique du XVIe
siècle se manifeste avec le plus de force et d'originalité.
Il est né à Nuremberg, si pittoresque encore aujourd'hui, et qui était
alors une des villes les plus prospères de l'Allemagne. Il étudia dans
l'atelier de Wolgemut, à la fois peintre et sculpteur. A cette époque
l'école de peinture de Nuremberg se transformait sous l'influence des
Pays-Bas
: elle devenait plus énergique, plus réaliste. Son apprentissage terminé,
Dürer voyage quatre ans en Allemagne, peut-être même visite-t-il déjÃ
Venise.
En tout cas, si dès lors il connaît les gravures de Mantegna,
s'il fait des emprunts aux maîtres d'au delà des Alpes, l'art italien
n'exerce aucune influence profonde sur son talent déjà formé.
A partir de 1494,
sa vie s'écoule presque entière à Nuremberg. Longtemps on a répété
que l'humeur désagréable et cupide de sa femme, Agnès Frey, avait troublé
son existence; mais des recherches consciencieuses ont prouvé qu'A. Dürer
n'avait pas été si malheureux qu'on se l'imaginait. Deux voyages qu'il
fit, l'un à Venise (1505-1507),
l'autre aux Pays-Bas (1520-1521),
sont connus par ses lettres et son journal. Sa renommée l'y avait précédé,
ses estampes étaient recherchées à Venise,
et Marc-Antoine lui-même les contrefaisait. Giovanni
Bellini lui témoignait beaucoup d'amitié, Raphaël
fut en relations avec lui, et la jalousie d'autres artistes, dont il se
plaint, est une preuve même de la réputation qu'il avait conquise Ã
l'étranger. En Allemagne, l'empereur Maximilien le chargeait de nombreuses
commandes, assez mal payées, il est vrai, et notamment de dessins pour
des arcs de triomphe, des cortèges. Il adhéra à la Réforme dès ses
débuts et fut en rapports avec Luther, Melanchthon,
Zwingle.
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La
Mélancolie, par Albrecht Dürer (1513). Une gravure au burin qui
symbolise
d'une
façon puissante et originale le néant de la science humaine.
A. Dürer a exécuté un assez grand nombre
de tableaux. Parmi les meilleurs, on peut citer : l'Adoration des Mages,
de 1504 (Florence, musée des Offices),
la
Crucifxion, de 1506 (musée de
Dresde),
la
Madone, de 1516,
la Trinité
adorée par tous les saints (Vienne, Belvédère),
les
Quatre Apôtres (musée de Munich); mais
ses dessins et ses gravures le font mieux connaître. Allemand par la pensée
et par la forme, son imagination est puissante, mais sombre et fantasque;
il se plaît aux sujets douloureux, aux conceptions étranges (Mélancolie,
le Chevalier et la Mort ,
l'Apocalypse,
etc.). D'autre part, l'expression est chez lui d'un réalisme que rien
n'arrête : il introduit dans ses compositions les types les moins nobles,
les détails les plus familiers, mais pour en tirer des effets imprévus
de grandeur et de pittoresque.
Si ses oeuvres peuvent paraître parfois
rudes et sans harmonie, elles sont toujours pleines de vigueur et de sève.
Quand il traite des sujets chrétiens (Passion du
Christ, Scènes de la vie de la Vierge),
il leur donne un caractère local : types, costumes, moeurs, paysages,
tout y rappelle l'Allemagne, mais il y mêle une poésie intime qui transforme
la composition et la marque d'un caractère religieux. Ce sont bien les
personnages de l'Évangile ,
mais sous les formes réelles et concrètes que leur prêtait l'imagination
populaire. De même que Luther traduit la Bible
dans la langue commune, A. Dürer traduit les croyances chrétiennes dans
un art que, tous peuvent comprendre. Au point de vue technique, c'est encore
un grand maître. Dans ses gravures, il procède avec une sûreté et une
vigueur extraordinaires, en même temps qu'il sait s'attacher aux moindres
détails, quelquefois même avec une trop minutieuse complaisance.
Hans Holbein.
A. Dürer est le chef de l'école de Franconie,
l'école souabe, d'où sortent les Holbein, est
moins indifférente aux préoccupations de beauté et d'élégance. Ces
tendances s'accentuent chez son fils, et, s'il reste bien Allemand, il
subit plus que Dürer l'influence de l'Italie; elle est sensible notamment
dans l'architecture et dans les encadrements. Né en 1497
à Augsbourg, dès 1515
il est établi à Bâle. Les anecdotes qu'on a fait courir sur sa paresse
et son ivrognerie sont des légendes. De 1526
à 1528, il tente une première fois
fortune en Angleterre, il y retourne en 1532,
et, sauf un court voyage à Bâle en 1538,
il y reste jusqu'Ã sa mort (1543),
fort apprécié et, à partir de 1536,
employé par Henri VIII. Portraitiste,
il est d'une sincérité et d'une précision incomparables (plusieurs portraits
au musée de Bâle, portraits d'Érasme, d'Anne
de Clèves, au Louvre, etc.).
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Le
Maître d'école (miniature), par Holbein le Jeune (1517).
Peintre religieux, il a exécuté de nombreuses
madones; parmi les plus belles est celle de Darmstadt.
Son Christ mort du musée de Bâle (1521),
oeuvre réaliste, où le dessin et la couleur conspirent à accuser les
horreurs du cadavre, est effrayant de vérité. Mais, en même temps, l'expression
qu'ont gardé les traits du Christ au moment de
la mort est d'une beauté tragique. Tout s'y lit, les ardeurs passées,
les luttes douloureuses, la foi dans l'oeuvre, les angoisses de l'agonie
morale : la bouche est entrouverte comme pour un dernier cri, dernière
adjuration. Cette inspiration se retrouve dans d'autres oeuvres, et notamment
dans les dix dessins de la Passion (musée de Bâle), où toutes
les souffrances du Christ sont rendues d'une façon poignante.
Ces dessins
sont certainement ce qu'il a fait de plus puissant comme composition. Ses
portraits au crayon et à la plume, légèrement relevés de tons de chair,
sont merveilleux de précision, de souplesse et de vie; jamais la physionomie
n'a été saisie avec plus de simplicité et de naturel. Il avait abordé
aussi la grande décoration et les sujets antiques dans ses peintures
murales de la salle du Conseil à Bâle, qui, par malheur, ont presque
entièrement disparu. Enfin Holbein a composé de nombreux dessins pour
la gravure : les 83 dessins pour l'Éloge de la Folie d'Érasme,
l'Alphabet de la Mort, les Simulacres de la Mort, où il
retrace avec une verve inépuisable et une ironie lugubre les triomphes
de la Mort sur la puissance et la beauté comme sur la misère.
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Portrait
du Duc de Norfolk (1539),
par
Hans Holbein.
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Le
Vieil amoureux,
par
Lucas Cranach.
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Lucas Cranach.
Parmi les contemporains d'A. Dürer et
d'Holbein, Lucas Cranach (1472-1553),
sans les égaler, possède un talent original. Ses madones
sont de jeunes Allemandes, fraîches et fines, dont le visage séduit par
un mélange de candeur et de mièvrerie. En outre, il aime à peindre le
nu (plusieurs figures d'Adam et d'Ève) et emprunte des sujets Ã
la mythologie païenne (Vénus, au Louvre); mais, par la conception
comme par le style, il est étranger à l'art antique; ses figures, aux
formes souvent pauvres et trop longues, sont posées avec une élégance
maniérée.
Une influence
de la Réforme?
On a discuté l'influence qu'exerça la
Réforme
sur les arts. Sans doute les idées nouvelles ont parfois déchaîné contre
les anciens monuments religieux des bandes d'iconoclastes; cependant Luther
ne proscrivait pas les arts; A. Dürer, Holbein, Cranach étaient protestants
et ne renoncèrent ni à la peinture ni aux sujets sacrés. Peut-être
les doctrines qu'ils adoptèrent contribuèrent-elles à les affranchir
du respect des traditions et développèrent-elles chez eux la tendance
à donner à l'art chrétien une forme populaire; mais, avant Luther déjà ,
c'était de ce côté que se dirigeait l'école allemande.
Le XVIIe
et le XVIIIe siècle
La peinture en Allemagne, dès la seconde
moitié du au XVIe
siècle. Ce déclin s'accentura encore au au XVIIe
siècle : Schwartz, Goltzius, Rottenhammer, Heinz, Elzheimer,
Sandrart, Screta, Kupetski, Joseph Werner, Brandel, Pierre de Strudel,
se proposèrent les Italiens pour
modèles. Zingelbach, Kneller, Poelenburg, Mignon,
Dietrich, s'attachèrent de préférence aux maîtres flamands
et hollandais. Puis l'école
française du temps de Louis XIV trouva
aussi des imitateurs, Brandmuller, Rugendas, Huber, etc.
L'école
néo-classique.
Au XVIIIe
siècle, deux artistes, d'un goût très
différent, voient le jour en Allemagne .
Le premier, Chodowieki (1726-1801),
médiocre peintre d'histoire, se
montre fin observateur et quelque peu ironiste dans les sujets de genre,
dont s'emparent les graveurs; l'autre, Raphaël Mengs
(1728-1779),
imbu des idées de Winckelmann,
son ami, est l'un des champions de la renaissance néo-classique, dont
le succès s'affirme dans les divers pays durant la seconde moitié du
XVIIIe
siècle. Pris au sérieux pour un temps,
et à Rome même où il décora la villa Albani et dota de fresques la
bibliothèque du Vatican, Mengs a vu sa réputation
décroître avec les années, son art étant rejeté comme convaincu d'aridité
académique.
-
Le
Jugement de Pâris, par Raphaël Mengs (1757).
On cite encore J.-A.
Tischbein (1722-1789),
rallié aux mêmes principes, et dont le musée de Kassel
conserve un caractéristique Ecce homo. Bref, si l'Allemagne, en
ce siècle de grâce et de spirituelle observation, veut participer Ã
un art de séduction, force lui est de demander la collaboration d'artistes
étrangers, français comme A. Pesne
(1683-1757)
et Ch.-A.-Ph. Van Loo (1719-1795),
ou italiens comme Canaletto
et J.-B. Tiepolo, décorateur prestigieux du
château
de Wurtzbourg.
Le XIXe
siècle
Les Nazaréens.
Sous l'influence
du romantisme grandissant, au XIXe
siècle, le Viennois Moritz von Schwind
(1804-1871)
fut le premier à traiter des épisodes du Moyen âge .
Mais la principale réaction partit, vers 1810,
d'un groupe d'artistes, catholiques ardents,
surnommés les Nazaréens, qui vivaient à Rome : Overbeck
(1789-1869),
Cornelius
(1783-1867),
Fürich (1800-1876),
Schnorr von Carosfeld (1794-1879),
travailleurs et instruits, mais au talent limité. Overbeck n'a exécuté
que des pastiches maladroits de primitifs italiens.
Cornelius et Kaulbach ont peint à Berlin
et à Munich des cycles d'oeuvres à tendances philosophiques, lourdes
de pensées et d'intentions.
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La
Bataille de Salamine, par Wilhelm von Kaulbach (1868).
Des Nazaréens prirent
la tête des deux grands centres artistiques allemands : Munich et Dusseldorf.
L'école de Munich fut fondée par Cornelius, qui en fut avec Kaulbach
(1805-1874)
le principal protagoniste. Ils servirent les desseins de Louis Ier
qui les avait appelés, car il voulait faire de sa capitale une Athènes
allemande, bâtie avec des copies de temples grecs et de palais florentins.
A la génération
suivante, cette école se continue par des peintres
d'histoire tels que Piloty (1826-1886),
inféodé aux Français et à Delaroche,
et Makart (1840-1884),
virtuose imitateur des Vénitiens
qui joua plus tard un grand rôle à Vienne. Ensuite, elle subit une éclipse.
Un autre Nazaréen avait fondé, en 1826,
l'école de Dusseldorf, imprégnée de
romantisme
rhénan, de vieilles légendes que traduisent Hildebrandt (1804-1874),
Sohn (1805-1867),
Steinbrück. Ils avaient été précédés dans ce genre par Rethel
(1816-1859),
auteur de la Salle impériale à Aix-la-Chapelle,
et par Moritz von Schwind, déjà cité, qui avait traité des sujets romantiques
à Stuttgart,
Munich
et Vienne.
C.-D. Friedrich.
Caspar David Friedrich,
souvent rattaché au romantisme, mais qui
occupe une place singulière, est un peintre paysagiste allemand. Il est
né à Greifswalde le 5 septembre 1774 mort à Dresde
le 7 mai 1842. Il étudia à Copenhague
sous Ouisdorf. Ses ouvrages les plus connus sont deux toiles au château
de Berlin, d'autres au château de Tetschen en Bohème et surtout le Wanderer
über dem Nebelmeer (ou le Promeneur au-dessus de la mer de nuages).
Il fut nommé professeur à l'Académie de Dresde en 1807 et en 1840 membre
de l'Académie de Berlin. Il a aussi gravé sur cuivre.
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Le
Promeneur au-dessus d'une mer de nuages,
par
Caspar David Friedrich (1818).
Naturalisme et
réalisme.
Ensuite, le centre
artistique de l'Allemagne
du Nord se déplaça. Berlin voulut être
une capitale de l'art. C'est dans le milieu berlinois plus précis et moins
rêveur que s'élabora la réforme réaliste de Menzel
(1815-1905);
il rompt avec ses prédécesseurs par ses tableaux de genre qui l'apparentent
à Meissonier et par ses scènes de la vie contemporaine. Il a pour lieutenants
Werner (né en 1843),
Gussow et Max Michel. Après Menzel, le chef du réalisme
dans l'Allemagne du Nord sera Max Liebermann
(1849-1935).
Cependant, Munich redevient la capitale de l'art. Ses deux sociétés aux
nombreux membres. ses expositions, les plus célèbres de toute l'Allemagne,
lui assurent de nouveau l'hégémonie artistique. Un groupe d'artistes,
les élèves d'Arthur de Ramberg, au premier rang desquels se place Leibl
(1844-1900),
le champion du réalisme en Allemagne, reçoit triomphalement Courbet.
De même, en 1879,
c'est Munich qui révèle les impressionnistes
à l'Allemagne.
Après Leibl, Lenbach
(1836-1904)
est à Munich le principal représentant du réalisme.
Intelligent et érudit, ce serait uniquement un virtuose ayant su analyser
et s'approprier les manières de plusieurs grands maîtres, si ses portraits,
notamment ceux de plusieurs célébrités de I'Allemagne
contemporaine, Bismarck, Moltke, etc., n'étaient
remarquables par leur acuité psychologique. Cependant l'idéalisme reprend
ses droits.
Retour à l'idéalisme.
C'est Munich qui
lance le Bâlois Boecklin (1827-1899),
inventeur d'un nouvel art aux yeux des Allemands, sur qui il exerça une
profonde attraction non point tant par ses paysages
que par ses mythologies pesantes au trait alourdi, parfaitement germaniques
d'inspiration. Hans von Marées (1837-1887)
est, avant tout, un décorateur dont les compositions, notamment ses fresques
à l'Aquarium de Naples, montrent des recherches
originales, quoique desservies par un dessin
sans force et un coloris sombre et terne. Le sculpteur Klinger se montre,
dans ses tableaux, raffiné et poétique. Hans Thoma
(1839-1924)
interprète de vieux contes dans une manière
naïve calquée sur les primitifs allemands. Plus jeune, Fritz
von Uhde (1848-1911
) mêle le réalisme à l'idéalisme dans
des scènes évangéliques à costumes modernes. Franz Stuck (né en 1863),
chef de la jeune école munichoise, procède de Boecklin
(Böcklin) avec un style plus synthétique.
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Le
Péché, par Franz Stuck (1893).
Les
Sécessions et les autres groupes.
Avec Trübner, Uhde
et Stuck fondent, Ã Munich, en 1892,
le mouvement et la revue Sécession en réaction contre l'art académique
du moment. Munich verra aussi naître quelques années plus tard (1901),
le groupe die Phalanx ( = la Phalange), initié par Kandinsky,
d'où sortira la Nouvelle Association des Artistes (Neue Künstlervereinigung),
plus connue sous le nom de Cavalier Bleu (der Blaue Reiter).
De son côté, Gustav Klimt crée à Vienne
une autre Sécession, orientée vers l'Art Nouveau en 1897.
Enfin, une Sécession berlinoise se crée en 1899,
à l'initiative de Lieberman, de laquelle naîtra une Nouvelle Sécession
(expressionniste), en 1910.
Parmi les autres mouvements nés de cette effervescence, on doit aussi
nommer, dans les premières années du XXe
siècle, le groupe die Brücke
( = le Pont), constitué en 1905
par E.-L. Kirchner, E. Heckel, F. Bleyl, K. Schmidt-Rottluf, et qui a certaines
affinités avec les Fauvisme, tout en constituant, avec le Cavalier
Bleu, l'un des jalons de l'Expressionnisme.
Ailleurs, dans
l'espace germanophone.
Terminons en disant
deux mots des autres pays de langue allemande. Outre Boecklin, la Suisse
allemande a donné Hodler (1853-1918),
de Zurich, qui a surtout évoqué l'histoire
de Suisse en des compositions au dessin très appuyé et aux couleurs
extrêmement vives. Quant à l'activité de I'Autriche,
on l'a vu déjà avec la Sécession viennoise, elle se confond en partie
avec celle de l'Allemagne. C'est là que sont nés Moritz von Schwind,
Makart, Gabriel Max. Il faudrait aussi nommer Ferdinand
Georg Waldmüller ou Friedrich von Amerling,
parmi beaucoup d'autres. C'est chez Piloty que se forma le Hongrois Munkacsy
(1844-1900),
auteur du Christ devant Pilate, qui connut en son temps, Ã Paris,
un triomphe éclatant suivi de défaveur. Son compatriote Lazlo (né en
1869)
a fait son éducation à Paris. (B. / HGP).
La peinture en Allemagne,
en Autriche et en Suisse depuis 1900
Allemagne.
L'Expressionnisme
(1905-1920) est représenté par Die Brücke (1905-1913), un groupe d'artistes
, basé à Dresde et fondé par Ernst Ludwig Kirchner, Erich Heckel, Karl
Schmidt-Rottluff et Fritz Bleyl. Les oeuvres de Die Brücke se caractérisent
par leurs couleurs vives et leurs représentations déformées. Der Blaue
Reiter (1911-1914) est un autre mouvement expressionniste. Il a été fondé
à Munich par Wassily Kandinsky et Franz Marc et est tourné vers l'abstraction
et la spiritualité dans l'art.
La Nouvelle
objectivité (1920-1933) est un courant représenté par Otto Dix et George
Grosz. Ces artistes critiquent la société de Weimar avec un réalisme
incisif, mettant en lumière les problèmes sociaux et les horreurs de
la guerre.
L'art moderne est
qualifié d'art dégénéré (Entartete Kunst) par le régime
nazi (1933-1945). De nombreux artistes sont persécutés ou contraints
de fuir.
Dans la seconde moitié
du XXe siècle, Joseph Beuys (1921-1986)
est une figure majeure de l'art conceptuel et performatif. Il aborde des
thèmes de guérison et de transformation sociale. Gerhard Richter (né
en 1932) se signale par sa polyvalence stylistique, et sa manière de mêler
l'abstraction et le réalisme. Plus récemment, Neo Rauch (né en 1960),
représentant de la Nouvelle École de Leipzig, peint des oeuvres surréalistes
et narratives.
Autriche.
La Sécession
viennoise continue son chemin au début du XXe
siècle, toujours Gustav Klimt (1862-1918) comme chef de file. Egon Schiele
(1890-1918), protégé de Klimt, est connu pour ses dessins et peintures
audacieuses, souvent de nature érotique. L'Expressionnisme est
représenté par Oskar Kokoschka (1886-1980), dont les portraits et les
paysages saisissent des émotions intenses. Vient ensuite Actionnisme
viennois des années 1960 et 1970, qui est un mouvement radical de
performance art, avec des artistes comme Hermann Nitsch et Günter
Brus, qui bousculent les limites du corps et de l'art. De nos jours, on
doit nommer Erwin Wurm (né en 1954), connu pour ses One Minute Sculptures
et ses oeuvres humoristiques et conceptuelles, et Valie Export (née
en 1940), arrtiste féministe et performeuse, qui aborde les thèmes de
l'identité et du corps.
Suisse.
Le cabaret Voltaire
à Zurich, fondé par Hugo Ball, est le berceau du mouvement Dada
(1916-1920), une réaction contre la guerre et la culture bourgeoise, représenté
par des écrivains et des poètes, mais aussi par des peintres comme Jean
Arp (1886-1966) et Marcel Janco (1895-1984). L'Art concret
vient ensuite et est représenté notamment par Max Bill (1908-1994), architecte,
peintre et sculpteur, qui se concentre sur la pureté des formes géométriques.
Jean Tinguely (1925-1991), représentant du Constructivisme, est connu
pour ses sculptures mécaniques et cinétiques, interrogeant le mouvement
et le hasard. Parmi les contemporains, citons : Pipilotti Rist (née en
1962), vidéaste et artiste multimédia, qui se signale par ses installations
immersives et psychédéliques, et Fischli & Weiss (Peter Fischli et
David Weiss), un duo d'artistes célèbres pour leurs oeuvres humoristiques
et conceptuelles, notamment le film expérimental Der Lauf der
Dinge (Le Cours des choses, 1987). |
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