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Le passé de la Terre
Le Néogène

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Le Néogène correspond à la période du Cénozoïque comprenant le Miocène et le Pliocène. On y a établi les subdivisions suivantes :
Miocène : Aquitanien, Burdigalien, Helvétien (Langhien, Serravillien), Tortonien, Messinien.

Pliocène : Zancléen ou Tabanien, Plaisancien / Astien, Gélasien.

Caractères généraux

Les terrains néogènes des régions situées en dehors de l'Europe seront traités à l'article Cénozoïque. En Europe, il existe une différence profonde entre le Néogène du Nord et celui des régions méridionales. Dès l'Aquitanien, c.-à-d. dès la période qui précède immédiatement le Burdigalien, un observe, dans les régions méditerranéennes, une transgression graduelle des mers, qui atteint son maximum à l'Helvétien (Langhien + Serravillien), et qui est suivie d'une régression, déjà très marquée à la fin du Tortonien, avec la phase dite sarmatique, atteignant son maximum au Messinien, qui est, pour le Sud et l'Est de l'Europe, une phase essentiellement lacustre. Au Pliocène, par suite d'une série de mouvements tectoniques, qui donnent à la Méditerranée une configuration voisine de sa forme actuelle, la mer reprend possession des régions de l'Europe méridionale.

Dans le Nord de l'Europe, les termes inférieurs du Miocène font défaut, et c'est au Tortonien que commence la transgression, par conséquent au moment même où dans le Midi débute la phase de régression. Sur les bords de la mer du Nord, contrairement à ce qui a lieu dans la région méditerranéenne, le Miocène supérieur et le Pliocène sont en continuité parfaite.

Les caractères paléontologiques du Néogène peuvent être ainsi résumés : disparition des Cérithidés des groupes de l'Echinoides, du Tricarinatum, du Trochleare, des grandes Nummulites, des Othophragmina; apparition des genres Strombus, Melongena, Proto, Murex, Nassa, etc.; abondance des Clypéastres, des Scutelles, des Amphiopes dans les régions méridionales.

Dans les eaux peu profondes de la région méditerranéenne vivent des faunes tropicales, dont les restes s'observent dans les faciès suivants : 

1° dans les grès tendres, gris ouverts, connus sous le nom de mollasse et caractérisés par l'abondance des Pectens, des Huîtres, des Panopées;

2° dans les calcaires zoogènes à Clypéastres et à Scutelles, ou phytogènes à Lithothamnium; 

3° dans les faluns. Pour la première fois, on voit pénétrer dans le fond des mers profondes de la région méditerranéenne des courants froids (Munier-Chalmas), qui y amènent une faune océanique, dont les restes se trouvent dans les argiles à Pleurostomes.

Dans le Nord, on rencontre surtout des faluns, désignés sous le nom de crag, et des argiles noires, contenant  des faunes boréales.

Le sédiments du Nord de l'Europe doivent être attribués à une mer dont l'emplacement coïncidait à peu près avec celui de la mer du Nord actuelle, avec une extension un peu plus considérable à l'Ouest et à l'Est; mais cette mer ne communiquait pas avec l'Océan Atlantique par la Manche. Les eaux de l'océan envahissaient une grande partie du bassin de l'Aquitaine, qui ne communiquait plus avec le bassin du Rhône, et formaient en Touraine et dans l'Armorique plusieurs golfes étroits. La communication de la Méditerranée avec l'Océan se faisait d'abord par le détroit nord-bétique, en Andalousie, le détroit de Gibraltar n'existant que depuis le Pliocène; plus au Sud, une seconde communication avait lieu certainement au Miocène par le Maroc.

Miocène des régions méridionales.

A l'époque de l'Aquitanien, on rencontre des dépôts marins dans le golfe du Bordelais, où ils sont en continuité avec le Tongrien; dans les régions méditerranéennes, on n'en connaît que sur la côte de Provence et en Vénétie, puis dans la région au Nord de Vienne (couches de Molt et de Loibersdorf), où ils passent insensiblement aux dépôts burdigaliens. C'est par l'Aquitanien que commence la transgression dans les régions méditerranéennes; dès le début du Burdigalien, elle s'accentue davantage, une partie du bassin du Rhône est sous les eaux, mais la mer ne s'étend pas au Nord de la Drôme; au Burdigalien supérieur, la mer envahit toute la plaine de la Suisse et de la Bavière, de sorte que le bassin du Rhône et le bassin situé au Nord de Vienne, entre les Alpes et le massif de Bohème, se trouvent réunis par un bras de mer qui longe toute la chaîne des Alpes sur son bord septentrional, mais sans pénétrer dans l'intérieur même de la chaîne. Pendant ce temps se déposent dans le bassin de l'Aquitaine les faluns de Léognan (Proto cathedralis, Ficula condita, Tudicla rusticula, Lucina columbella, etc.) et les faluns de Saucats (Oliva Basteroti), qui ensemble constituent le type de l'étage burdigalien (et langhien). Dans l'Armagnac, on rencontre des calcaires lacustres, formés dans des lagunes sur le bord du bassin. Dans le bassin du Rhône et sur le bord des Alpes, le burdigalien est presque partout à l'état de mollasses ou de sables, La base de l'étage est caractérisée par Scutella paulensis, Pecten rotundatus, etc.; la partie supérieure, qui se retrouve avec une constance remarquable depuis la Provence jusqu'à Vienne, contient Pecten praescabriusculus, P. subbenedictus, P. restitutensis, des Clypéastres, des Huîtres, des Nullipores. Dans le bassin de Vienne, la partie supérieure de l'étage correspond à des dépôts de mer plus profonde, argileux, riches en Ptéropodes et en coquilles d'un Nautilidé (Aturia aturi), connus sous le nom de « Schlier ». Cette formation termine la partie inférieure du Néogène, qui a été désignée par Suess sous le nom de premier étage méditerranéen.

Si ce premier étage méditerranéen est localisé, dans les environs de Vienne, à la région située sur le bord des Alpes, au Nord de la ville, il n'en est pas de même du deuxième étage méditerranéen, qui, au contraire; est localisé an Sud de Vienne et se trouve dans l'intérieur de la chaîne. Cette localisation différente, des deux étages tient à ce que, dans l'intervalle de leur dépôt, il s'est produit des accidents tectoniques très importants : certaines parties de la chaîne des Alpes ont laissé la mer pénéter dans des fossés en général limités par des failles; elle a pu prendre possession de régions inondées depuis longtemps, telles que le « bassin intra-alpin » de Vienne, certaines parties de la Styrie, les plaines de la Hongrie.

En France on répartit d'ordinaire les dépôts du deuxième étage méditerranéen dans deux étages successifs, l'Helvétien et le Tortonien. L'Helvétien est généralement divisé en Langhien et en Serravillie, mais plusieurs auteurs, à l'opposé, ont considéré ces deux subdivisions comme un tout, dans lequel on peut tout au plus distinguer plusieurs zones; Depéret les réunissait ainsi sous le nom d'étage vindobonien. 

Le faciès de mer peu profonde et à température peu élevée et le faciès de mer relativement profonde, à température plus basse, se trouvent souvent en superposition, le premier correspondant à l'Helvétien, le second au Tortonien; mais quelquefois, d'après Stefani, la succession serait inverse; enfin, d'autres fois, les deux faciès sont juxtaposés et synchroniques.

C'est avec l'Helvétien que la mer miocène atteint son maximum d'extension; la mer envahit le golfe de la Touraine et dépose des faluns jusqu'à Blois; dans le Bordelais, elle dépose les faluns de Salles, caractérisés par l'apparition de Cardita Jouanneti; dans le bassin du Rhône, l'étage est surtout représenté par des sables (Ostrea crassissima, Cardita Michaudi, etc.) et s'étend vers l'Ouest jusqu'à Lyon; dans le bassin de Vienne (Autriche), les sables de Grund, par lesquels débute la série intra-alpine, contiennent la faune des faluns de Salles.

Au Tortonien appartient la partie supérieure des faluns de Touraine, et la mer s'étend maintenant jusque dans l'Anjou. Dans le Bassin aquitain les couches à Pleurotomes de Saubrigues représentent le faciès océanique, correspondant à des eaux relativement froides; elles renferment Pleurotoma cataphracta, Ancilla glandiformis, Triton clathratum, etc. On retrouve le même faciès dans le bassin du Rhône, où les marnes de Cabrières d'Aigues se présentent au même niveau; à Baden, près de Vienne-Tegel-») et à Tortone, dans le Piémont, où Mayer-Eymar a pris le type de l'étage. Mais à coté de ce faciès océanique on rencontre également des mollasses, comme à Cucuron, à Berne et à Saint-Gall (Suisse), ou des calcaires à Clypéastres et à Lithothamnium, comme à Vienne (« Leitha-Kalk »), faciès correspondant à des mers chaudes, peu profondes. En Suisse, la partie supérieure du Tortonien n'est plus marine, c'est la mollasse d'eau douce, supérieure, qui, à la célèbre localité d'Oeningen, a fourni une flore extrêmement riche et des Vertébrés. Vers la fin de la période Tortonienne, des mouvements du sol déterminent le retrait de la mer dans la plus grande partie de la région méditerranéenne. En Italie et en Sicile, le bras de mer qui réunissait les Alpes à la région de l'Atlas se transforme en une série de bassins d'évaporation, dans lesquels se déposent des couches de gypse (« formazione gessoso-solfifera »). Dans le bassin de Vienne, en Croatie, dans les plaines de la Hongrie, en Roumanie, dans le Sud de la Russie, il se forme également des lagunes, dans lesquelles vit une faune spéciale, remarquable par sa richesse en individus, qui compense la faible variété des espèces. C'est une faune méditerranéenne appauvrie (Bittner). Les espèces les plus caractéristiques de cette faune sont les suivantes : Cerithium pictum, C. rubiginosum, Trochus podolicus, Mactra podolica, Ervilia podolica. C'est à tort que l'on a fait des couches qui contiennent cette faune un étage spécial, le Sarmatique; en réalité, elles ne constituent qu'un faciès spécial de la fin du Tortonien.

Le Miocène supérieur est marqué par un retrait général de la mer dans toutes les régions où se font sentir les mouvements orogéniques qui donneront naissance aux Alpes. Ce n'est qu'en Algérie qu'il existe peut-être des dépôts marins de cette époque, et ces dépôts formeraient alors un passage insensible du Tortonien au Pliocène inférieur. Dans l'Est de l'Europe, et en particulier dans la région aralo-caspienne, sur les bords septentrionaux de la mer Noire, dans le bassin du Danube, il existait de grands lacs plus ou moins salés, qui communiquaient entre eux par des cours d'eau et qui contenaient une faune vraisemblablement d'origine orientale et composée de Congéries, de Dreyssensia, de Cardium sans dents, de Melanopsis, de Valenciennesia. Ces couches à Congéries constituent l'étage Messinien (ou Pontien). On les connaît également, avec une étendue moindre qu'en Orient, dans la vallée du Rhône, où elles occupent le fond de dépressions creusées dans le Miocène moyen; en Corse, où elles reposent immédiatement sur le Tortonien marin; sur le versant Nord-Est de l'Apennin, et en particulier aux environs de Bologne; enfin, dans les environs de Barcelone.

L'émersion de l'Europe méridionale à l'époque messinienne est encore attestée par la grande extension que prennent les graviers fluviatiles en de nombreuses localités, où souvent ils contiennent une riche faune de Mammifères terrestres (Pikermi, Luberon, Eppelsheim, etc.).

Pliocène lacustre et aralo-caspien.

Au pliocène, les lacs de la vallée du Danube possédaient une extension bien moindre que pendant la période précédente; ils étaient entièrement dessalés et habités par une faune composée surtout de Paludinidés (Tylotoma, Vioipara) et d'Unionidés, dont les proches parents vivent encore actuellement dans certains lacs de l'Asie centrale, comme par exemple dans le lac de Tali-fou, dans le Yun-nan. Dans les dépôts lacustres de Slavonie (Nord de la Serbie) et de Croatie, on a pu distinguer huit niveaux successifs dans lesquels on a pu suivre la phylogénie de certaines espèces de Paludines, ayant évolué sur place.

Quoique ces dépôts pliocènes lacustres aient reçu, en raison de leur grande extension en Orient (Roumanie, Macédoine, Grèce, îles de la Mer Egée), le nom d'étage levantin, on connaît des formations tout à fait analogues dans le bassin du Rhône. La Bresse était occupée au pliocène par un grand lac, dans les sédiments duquel Depéret et Delafond ont pu reconnaître plusieurs niveaux à Paludines correspondant aux niveaux de Croatie. Ces dépôts lacustres sent recouverts par une grande nappe de cailloutis fluviatiles datant du pliocène supérieur.

En Crimée, et dans la région aralo-caspienne, les lacs salés ont continué à exister pendant tout le Pliocène; ils étaient habités par une faune analogue à la faune messinienne, riche en Cardiums; les dépôts correspondants ont reçu le nom de dépôts thraciens. La mer Caspienne, le la mer d'Aral, le lac Baïkal ne sont autre chose que les restes  actuels de ces lacs néogènes. Une des espèces les plus caractéristiques de la faune aralo-caspienne, Dreyssensia polyrmorpha, s'est répandue dans le courant du XIXe siècle siècle depuis la mer Caspienne jusque dans l'Europe occidentale, en suivant les fleuves et les canaux, reprenant ainsi possession du domaine qu'elle occupait à l'époque messinienne.

Pliocène de la région méditerranéenne

Le début du Pliocène est marqué par un retour de la mer dans les régions méditerranéennes, mais, au lieu d'occuper, comme au Miocène moyen, de longues dépressions coïncidant avec l'emplacement des chaînes plissées du système alpin ou tout au moins avec leur bord, la mer pliocène pénètre dans de profondes dépressions résultant de l'effondrement de masses continentales qui formaient des îles pendant les périodes géologiques précédentes, telles que l'île bétique, située entre la chaîne bétique et l'Atlas, et dont le Rif marocain et les massifs cristallins du littoral algérien sont les derniers restes; puis la Tyrrhenis et l'Adria de Suess. C'est au début du Pliocène qu'il faut vraisemblablement faire, remonter l'ouverture du détroit de Gibraltar. La faune qui vivait dans la Méditerranée pliocène est presque identique avec celle de la Méditerranée actuelle et du Nord de l'Atlantique, et contient une forte proportion d'espèces qui vivent encore de nos jours.

Le type du Pliocène méditerranéen peut être pris en Italie, où l'on distingue deux termes quelquefois superposés, comme par exemple au Vatican, mais que l'on tend généralment à considérer comme deux faciès d'un même étage. Il s'agit du Plaisancien, représenté par des argiles de mer profonde (Flabellum, Ceratotrochus, Nucules, Dentales, grands Strombes, Nassa prismatica), et de l'Astien, généralement à l'état de sables (Pecten latissimus, P. Jacobaeus, Terebratula ampulla) déposés dans des eaux peu profondes;

Dans le Roussillon le plaisancien est argileux à la base, sableux et saumâtre (Potamides Basteroti) au sommet; dans les environs de Montpellier il est entièrement sableux. Dans la vallée du Rhône, la mer pliocène formait un fjord étroit s'étendant jusqu'à Lyon et correspondait à une vallée d'érosion post-tortonienne. Le Plaisancien débute par des marnes à Nassa prismatica, il se continue par des marnes à fossiles saumâtres (Potamides Basteroti, Melanopsis Newmayri, Congeria subbasteroti) et se termine par les marnes à Syndosmyes. 

L'Astien est représenté par les marnes d'Hauterive, caractérisées par des Mollusques terrestres (Hélix, Planorbes, Clausilies). Le Pliocène est constitué dons tout le Sud-Est de la France par des dépôts de transport. Dans l'Ouest on trouve en de nombreux points, à une faible distance des rivages actuels, en particulier dans la Vendée, la Loire-Atlantique, l'Ille-et-Vilaine, la Manche, des dépôts pliocènes marins avec Nassa prismalica, Patamides Basteroti. Leur faune est la même que celle de la Méditerranée, ce qui indique l'absence d'une communication par le Pas-de-Calais avec la nier du Nord, dont la faune est toute différente.

Néogène du Nord de l'Europe

C'est seulement à partir du Miocène supérieur que l'on rencontre des dépôts marins néogènes dans le Nord de l'Europe; à cette époque, la mer envahit l'espace occupé par la mer du Nord actuelle, et vers l'Est elle empiète sur le sol de la Belgique, de la Hollande, du Hanovre, du Schleswig-Holstein et du Mecklembourg, déposant des argiles noires micacées ou des sables, dont le type est le « crag noir d'Anvers ». Cette formation contient des Mollusques marins (Conus Dujardini, Chenopus pespelecani, Turritella subangulata, Venus multilamella, Lucina borealis, des dents de Squales (Carcharodon) et de nombreux ossements de Cétacés.

En Angleterre, on ne connaît pas de dépôts miocènes, le Pliocène repose dans l'Est du pays sur la surface ravinée de la craie ou de l'Eocène; il est représenté par des sables coquilliers connus sous le nom de « crag », dans lesquels on a reconnu les subdivisions suivantes :

1° « Coralline crag » on çrag blanc à Bryozoaires, contenant dès la base une faune de mers froides (Cyprina islandica, Lucina borealis, Isocardia cor, Astarte Omaliusi, Terebratula grandis);

2° « Red crag » ou crag rouge de Suffolk, transgressif et ravinant soit la Craie, soit le crag blanc, caractérisé par Fusus contrarius;

3° « Crag fluvio-marin » ou crag de Norwich, contenant une faune très voisine de la faune actuelle et constituée par un mélange d'espèces marines et d'espèces terrestres;

4° « Forest-bed », dépôts d'estuaire compris entre deux couches d'eau douce, à Végétaux et Mollusques actuels, passage au Pléistocène.

En Belgique, on rencontre près de l'embouchure de l'Escaut, par conséquent juste en face des comtés de Norfolk et de Suffolk, des sables, dont les géologues belges ont fait l'étage scaldisien. A la base les sables à Isocardia cor et Terebratula grandis correspondent au crag blanc, tandis que les sables supérieurs à Trophon antiquum sont l'équivalent du crag rouge. Ici encore les restes de Cétacés sont très abondants. Ces dépôts pliocènes s'étendent sur tout le rivage oriental, de la Mer du Nord jusqu'au Schleswig. (E. Haug).
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