 |
Psaume,
n. m. - Hymne hébraïque chantée
dans les offices divins du temple de
Jérusalem et passée, sous forme de traduction, dans les
différentes églises chrétiennes. Le psaume est formé
de versets ou strophes, composés généralement de deux
vers, quelquefois de trois. Dès les premiers siècles du christianisme;
se sont établies. simultanément deux manières de chanter
les psaumes. L'une, simple : le psaume est récité d'abord
par un seul lecteur; après une division, ou un psaume, ou une série
de psaumes, le choeur chante alleluia; c'est de ce genre qu'est
sortie la psalmodie à deux choeurs,
les strophes étant dites alternativement par chacun, après
quoi les deux choeurs réunis répètent l'alleluia,
ou un autre refrain ou antienne.
Dans la manière plus ornée,
le psaume est caractérisé par un chant
très mélodique, et alors le lecteur ou chantre
n'en dit plus qu'une, ou plusieurs strophes, dont le choeur répète
tout ou partie de la première en répondant au lecteur, c'est
le répons .
Les versets des Psaumes
ont inspiré en tous pays les compositeurs, dès que la musique
polyphonique eut porté ses premiers fruits. Déjà,
Dufay, dans ses Magnificat, utilisant le faux-bourdon
alterné avec des versets en trio, pose le principe. Josquin
Després semble le créateur du psaume en musique : son
Laudate pueri et son Miserere sont fameux. Un peu plus tard,
c'est pour la chapelle du duc de Bavière, que l'illustre musicien
belge Orlande de Lassus a composé sa célèbre série
des Psaumes de la Pénitence, publiés en 1565. En Italie,
après les maîtres de l'école contrepointique, tels
qu'Anerio, Allegri, on vit Marcello composer des psaumes dans le style
du solo vocal orné et accompagné. Mais les cinquante Psaumes
de Marcello sont écrits sur des paraphrases italiennes du texte
biblique. En Angleterre, la composition
des psaumes s'adapta, à partir du XVIe
s., à des textes anglais et sous le titre d'Anthem (antienne)
devint la base du répertoire musical religieux de l'église
anglicane.
En France,
le répertoire des « grands motets
» et des « motets à grand choeur » depuis Lulli
et La Lande; est presque uniquement basé sur les textes des psaumes
traités en forme de grande cantate
religieuse latine, avec soli, choeurs, et orgue
ou orchestre. Charpentier, Mondonville, etc. se sont illustrés dans
ce genre. Au XIXe s., en dehors de quelques
compositions faites dans un but surtout pratique pour le service des maîtrises
d'église, on a peu écrit de grands psaumes dignes d'être
cités. Toutefois; le Psaume XCXI de Meyerbeer,
à huit voix sans accompagnement, écrit sur une paraphrase
allemande, pour la première moitié du siècle; plus
tard, le Psaume CL de César Franck, à quatre voix
mixtes, orgue et orchestre, représentent des types intéressants.
Comme oeuvre toute moderne, une composition hors pair est le Psaume
XLVI, par Florent Schmitt, composé à Rome
en 1904 sur la traduction de Lemaistre de Sacy, pour choeur, grand orgue,
orchestre, grande composition en plusieurs mouvements, exécuté
aux Concerts Colonne le 27 février 1912.
Au XVIe
s., on se donna avec une ardeur sans égale à la paraphrase
des psaumes en vers français. Une célèbre oeuvre de
ce genre.fut commencée par Clément Marot
en 1533, achevée en 1539. Quelques traductions partielles avaient
précédé ce travail et commencaient à se répandre
parmi les huguenots français, qui les
chantaient privément sur des timbres de chansons Avant que la traduction
de Marot fût publiée, un recueil anonyme de 18 psaumes et
3 cantiques, dont 12 de la version de Marot, parut en français,
à Strasbourg, en 1539, avec la
mélodie notée au 1er couplet.
La 1re édition de Marot, contenant
30 psaumes, fut imprimée sans musique, à Paris, s. d., 1541.
Calvin,
qui s'était lui-même essayé à un travail analogue,
abandonna son entreprise dès qu'il connut celui de Marot. Les éditions
mélangées ou non, notées où non, commencèrent
à se multiplier. Celle d'Anvers, 1541,
contenant les 30 Psaumes de Marot et 15 anonymes, indique les timbres de
dix pièces : le
Psaume C est sur Avanturiers de France,
le Psaume XLIII sur Jouissance vous donnera, le Psaume
CL sur Voulez-vous ouïr chanson.
L'origine profane des airs est donc avérée
et les psaumes huguenots ne se différencient pas du vulgaire cantique.
Les airs, comme les traductions, varient d'ailleurs
d'une édition à l'autre. Mais très vite se fixe le
principe du caractère huguenot de toute tentative de ce genre. Avant
que la liturgie des églises réformées soit ordonnée,
avant qu'elle n'ait ensuite prévu et approuvé l'introduction
du chant dans le culte, c'est un acte d'adhésion à la Réforme,
ou bien c'est une bravade ou un dilettantisme frondeur chez les catholiques,
que de répéter les paroles françaises du psautier
nouveau et de les chanter sur tel ou tel air. Six éditions en furent
mises à l'index par la Faculté de théologie de Paris,
pendant l'hiver seulement de 1542-1543. Marot mourut en août 1544.
En 1547, le musicien Louis Bourgeois, s'emparant de ce qui était
jusque-là préparé, fit paraître en deux recueils
un total de 74 psaumes harmonisés à plusieurs voix. En 1550,
Théodore
de Bèze commença son travail de traduction, suite et
complément de celui de Marot. En 1553, d'après Florimond
de Rémond, le chant des psaumes « divisés par petites
sections » fut prescrit pour accompagner le culte dans les «
assemblées » calvinistes.
La part revenant à chaque musicien
dans la composition des mélodies du psautier est incertaine. L'origine
profane d'un nombre plus ou moins grand d'entre elles ne fait pas de doute.
Les autres émanent, partie de Louis Bourgeois; partie de Guillaume
Franc, qui travaillèrent tous deux momentanément à
Genève.
Mais Bourgeois, mal vu de Calvin, revint à Paris en 1557, où
il publia en 1561 un recueil de toute son oeuvre huguenote, contenant 83
psaumes, (avec le Cantique de Siméon, le Décalogue,
etc.). D'autres musiciens dans le même temps mettaient au jour des
travaux semblables. Les 150 Psaumes de David, traduits par Marot
et de Bèze, mis en musique à quatre et cinq parties par Philibert
Jambe-de-fer, parurent en 1565 et la même année. en deux versions
musicales différentes de Claude Goudimel.
Plus ou moins remanié ou mutilé, le psautier de Goudimel
s'est répandu et maintenu en France,
en Suisse, en Hollande par une traduction néerlandaise, en Allemagne
par l'arrangement et la traduction de Lobwasser. Non content d'avoir traité
deux fois coup sur coup le texte et les mélodies calvinistes,
Goudimel a laissé une suite de psaumes développés
en forme de motets.
Le plus illustre parmi les musiciens qui
se vouèrent après lui à des tâches analogues
fut Claudin Le Jeune, duquel on fit paraître en 1601, comme
oeuvre posthume, un psautier complet à
quatre voix, et qui avait adopté la forme du grand motet pour ses
12 psaumes à six voix, imprimés en 1598 sous le titre de
Dodécacorde.
Mais la forme du motet ne put s'acclimater dans le culte protestant. Nombreuses
furent les autres paraphrases de psaumes en français parues concurremment
avec les précédentes et qui eurent leur temps de faveur.
Les plus connues sont celles de Ph. Desportes, mises en musique par Caignet
et Signac, et plus tard, la Paraphrase des psaumes de David, versifiée
par Godeau, évêque de Vence, qui parut en 1659 avec musique
de Gobert : elle avait déjà paru en 1650 avec musique à
quatre parties de Jacques de Gouy, qui, dit être le premier à
traiter ce texte. (M. Brenet). |
|