.
-

Animaux > Mammifères > Ruminants > Bovidés > Caprinés
Les Caprinés
Les Moutons et les Mouflons
Le genre Ovis
Le Mouton est un genre de mammifères cavicornes ruminants, désigné aussi sous le nom de Mouflon, qui s'applique aux espèces sauvages, en latin par celui d'Ovis, et appartenant à la famille des Bovidés, sous-famille des Caprinés
Le mot mouton s'applique particulièrement du mâle châtré, que l'on engraisse pour la boucherie, les autres s'appelant béliers. Les femelles sont appelées brebis, les jeunes, dans leur première année, se nomment agneaux et agnelles; à un an on les nomme antenais ou antenaises.
Le genre Ovis, très voisin des Chèvres (genre Capra), s'en distingue à première vue par la forme des cornes qui sont enroulées en arrière et en dehors, de manière à à former un tour de spire à peu près, complet, la pointe étant dirigée en avant et en dehors. Les mâles n'ont pas de barbe au menton et ne répandent pas une odeur aussi violente que celle du Bouc. Les glandes suborbitaires et les fosses lacrymales sont petites : il y a une glande en outre à chaque pied.

Les Mouflons habitent les plus hautes montagnes de l'hémisphère Nord depuis le Maroc et la Corse jusqu'au Kamtchatka et aux Montagnes Rocheuses de l'Amérique du Nord. On en a décrit moins d'une dizaine d'espèces, mais il en existe de nombreuses variétés, chaque chaîne de montagne paraissant nourrir une forme qui lui est propre. 

Tous les Moufons ont les mêmes moeurs : ils vivent en famille sous la conduite d'un vieux mâle, grimpant et sautant avec agilité an milieu des rochers. On prétend qu'ils franchissent des distances considérables en se laissant tomber sur leurs cornes dont l'élasticité amortit le danger de cette chute. Ce qui est certain, c'est qu'à l'époque du rut les mules luttent ensemble, pour la possession des femelles, en se jetant l'un contre l'autre tête baissée, et l'on entend de loin le cliquetis de leurs cornes.

Paléontologie.
On suppose, mais sans preuve certaine, que le Mouton domestique descend de l'Ovis Gmelini (Ovis orientalis musimon Gmelini). Ce qui est certain, c'est que sa domestication doit remonter à une époque reculée, car les races domestiques ont presque entièrement perdu les habitudes grimpeuses, montagnardes, qui caractérisent les moutons sauvages, tandis que ces habitudes se retrouvent chez la Chèvre dont la domestication est évidemment plus récente et moins complète.

A l'époque quaternaire (Cénozoïque) il a existé de grandes espèces de Mouflon sauvage dans les Pyrénées (Ovis antiqua), en Moravie (Ovis argaloïdes) et jusqu'en Angleterre (Ovis Savini). Les débris de l'Ovis borealis se trouvent mêlés à ceux du Mammouth, dans les îles de la Nouvelle-Sibérie situées dans l'océan Glacial arctique. (E. Tr.).

Classification des espèces et sous-espèces du genre Ovis.
Le tableau suivant donne la liste la plus communément admises des diverses espèces du genre Ovis (Mouton domestique et Mouflons), ainsi que de leurs sous-espèces et de leurs noms vernaculaires :
-

Ovis aries (ou Ovis orientalis aries) = Mouton domestique.
Ovis orientalis
Mouflons méditerranéens

O. o. musimon = Mouflon européen (ou Mouflon de Corse);
O. o. ophion = Mouflon de Chypre;

O. o. orientalis = Mouflon asiatique;
O. o. isphahanica = Mouflon d'Ispahan;
O. o. laristanica = Mouflon du Laristan. 


Urials (Mouflons d'Asie centrale).

O. o. vignei = Urial du Ladakh;
O. o. arkal  = Urial Transcaspien;
O. o. cycloceros = Urial afghan.

Ovis ammon
Argali
Argalis de Chine

O. a. ammon = Argali de l'Altaï;
O. a. collium = Argali de Karaganda;
O. a. comosa = Argali de Mongolie (ou du Nord de la Chine);

O. a. darwini = Argali du Gobi;
O. a. hodgsonii = Argali du Tibet;
O. a. karelini = Argali du Tian-Chan;

O. a. polii = Argali de Marco Polo (ou du Pamir).


Argalis d'Asie centrale

O. a. severtzovi = Argali de Severtzov ;
O. a. nigrimontana = Argali de Kara Tau.

Ovis nivicola
Mouflon des neiges
O. n. nivicola = Mouflon des neiges du Kamtchatka;
O. n. borealis =  Mouflon de Yakoutie (ou de Putoran);
O. n. kodarensis = Mouflon de Kodar;
O. n. koriakorum =  Mouflon Koryak.
Ovis canadensis
Mouflon canadien
O. c. canadensis = Mouflon des Montagnes Rocheuses;
O. c. sierrae = Mouflon de la Sierra Nevada;
O. c. cremnobates = Mouflon péninsulaire (Californie et Basse Californie);
O. c. mexicana = Mouflon mexicain;
O. c. nelsoni = Mouflon du désert;
O. c. weemsi = Mouflon de Weems;

O. c. auduboni = Mouflon d'Audubon (espèce éteinte depuis 1925).

Ovis dalli 
Mouflon de Dall
O. d. dalli;
O. d. stonei;

Les Mouflons

Mouflons d'Europe.
Les véritables Moutons sauvages (Mouflons) sont représentés en Europe par le Mouflon de Corse (Ovis orientalis musimon), qui habite la Corse et la Sardaigne où il est confiné dans les montagnes rocheuses du centre de ces deux îles. Son pelage est roux avec la tête grise, la ligne du dos plus foncée, le museau, la croupe, les pattes et le ventre blanc. En hiver, il passe au marron avec une grande tache d'un blanc jaunâtre sur les flâncs. C'est une des plus petites espèces, bien qu'il dépasse encore la taille, du bélier domestique : le mâle n'a que 80 cm au garrot. D'autres espèces à peine plus grandes habitent la Crète et l'île de Chypre (Ovis orientalis ophion), l'Asie Mineure (O. orientalis anatolica), lran et la Transcaucasie (O. o. m. Gmelini), le Turkestan occidental (Ovis o. arkal), le Tibet occidental (Urial, Ovis vignei), etc. On n'en trouve pas dans le Caucase où quatre espèces de Bouquetins paraissent les remplacer. Cependant l'O. Gmelini s'avance jusque près de Kars et dans la province d'Erevan.
--
Mouflon d'Europe.
Argali.
Mouflon d'Europe (Ovis orientalis musimon).
Argali (Ovis ammon).

Mouflons d'Asie.
Mais le plateau central de l'Asie et la Sibérie possèdent une nombreuse série d'espèces de beaucoup plus grande taille, atteignant souvent les dimensions d'un Cerf.  Tels sont l'Ovis ammon ou Argali de Pallas (de l'Altaï et du Tibet septentrional), l'O. ammon jubata (Argali de la Mongolie, ou du Nord de la Chine), l'O. a. Darwini (du désert de Gobi), 

L'Ovis ammon Polii (ou Poloa), ainsi nommé en l'honneur de Marco Polo, le premier explorateur de l'Asie centrale, est remarquable par ses cornes qui divergent de chaque côté de la tête en formant une double spire, de telle sorte que leur envergure peut atteindre près de 1,40 m d'une pointe à une autre, la distance étant mesurée en ligne droite : un massacre de cette dimension pèse, avec le crâne, 36 kg, et l'animal lui-même plus de 300 kg. L'Ovis Polii vit à une hauteur de 3000 m.

Mouflons d'Amérique.
Dans l'Amérique du Nord, plus particulièrement dans les Montagnes Rocheuses, vivent le Mouflon du canada (l'Ovis canadensis), dont il existe plusieurs sous-espèces (Mouflon des rocheuses, Mouflon du désert, Mouflon péninsulaire, etc.), et le Mouflon de Dall (Ovis Dalli), dont le Mouflon de Stone est une sous-espèce. 
-

Mouflon du désert.
Mouflon du désert (Ovis canadensis nelsoni). Photo :  Lynn Starnes/USFWS.--
-
Mouflons de Dall (Fannins).
Mouflons de Stone.
Mouflons de Dall (Ovis d. dalli fannini).
Mouflon de Stone (Ovis d. stonei).

Les Moutons

Le mouton a la tête plus ou moins busquée selon les races; les cornes, en général bien développées chez les béliers, sont absentes chez les brebis et rudimentaires chez les individus châtrés. 

La denture de lait chez les Moutons se compose de 12 molaires et de 8 incisives, la denture permanente comprend 12 molaires de plus, ce qui porte le nombre total des dents à 32 comme chez les animaux de l'espèce bovine. La mâchoire inférieure ne porte pas d'incisives, elles sont remplacées par un bourrelet. 

L'évolution et l'usure de ces dents servent à déterminer l'âge des moutons dans la pratique. Les deux incisives du milieu appelées pinces se montrent à la naissance, les deux qui suivent ou premières mitoyennes évoluent vers huit ou dix jours : les secondes mitoyennes, vers le vingtième jour; enfin les incisives latérales ou coing apparaissent vers le trentième jour; mais ce n'est qu'à trois mois que les huit dents de lait sont à la même hauteur.  A partir de ce moment, jusqu'à l'âge de dix mois, c'est par d'apparition successive des molaires qu'on peut juger de l'âge. A dix-huit mois, les pinces de lait sont remplacées parles pinces permanentes, l'agneau devient alors antenais. A deux ans, c'est le tour des premières mitoyennes, de trois ans à trois ans et demi se montrent les secondes mitoyennes, enfin de quatre ans à quatre ans et demi les coins de lait sont remplacés à leur tour. A cinq aies, la dentition permanente est complète. A partir de ce moment, l'usure des incisives qui se fait dans le même ordre pourrait fournir des données sur l'âge si l'on avait intérêt à conserver les moutons aussi longtemps, ce qui n'est pas le cas. Chez les races précoces, les indications qui précèdent sont avancées de six mois. Les dents du mouton sont relevées, ce qui, joint à la minceur de la lèvre supérieure et à sa grande mobilité, lui permet de saisir l'herbe très près de terre. 

Comme tous les Ruminants, le Mouton a un estomac composé, il mâche deux fois ses aliments. Une particularité anatomique assez curieuse du Mouton consiste dans la présence entre les deux doigts d'une petite poche, s'ouvrant près de la division des phalanges, c'est le canal biflexe qui sécrète une humeur sébacée épaisse. L'inflammation de ce canal constitue une maladie spéciale appelée fourchet.

La peau de tout le corps est recouverte de laine; le brin de laine prend naissance dans un bulbe contenu dans l'épaisseur du derme qui est accompagné d'une petite glande sécrétant la matière grasse ou suint qui enduit la toison, La largeur et la forme de la queue chez ces animaux ont été adoptées par quelques auteurs comme signes distinctifs de certaines races; on a des races à queue longue, à queue courte, à queue grasse, etc. Cet organe qui mesure de 40 à 50 cm est généralement coupé à quelques centimètres de son origine, cela donne meilleure apparence à l'animal d'engrais, car la queue se charge toujours de boue.

La taille et le poids varient beaucoup suivant les races; pour la première il y a des oscillations entre 50 cm et 1,10 m au garrot; le poids moyen des races les plus répandues est de 30 à 40 kg pour les types à laine fine, de 40 à 70 pour les bêtes à viande. Le bélier a généralement plus de taillée de poids que le mouton et ce dernier en a plus que la brebis.

L'élevage du mouton donne quatre produits : la laine, la viande, le suif et le lait de brebis. Si l'on excepte quelques districts spéciaux, comme ceux où se préparent les fromages de Roquefort (Aveyron), de Montpellier (Hérault), de Sassenage (Isère), la production du lait de brebis a importance économique secondaire. Quant à la production du suif, elle est liée à celle de la viande; de telle sorte que le mouton n'a réellement que deux spécialités, la laine et la boucherie. 

Ce sont les variétés précoces qui conviennent le mieux à produire de la viande. Les reproducteurs auront la poitrine ample, la croupe large, la tête pas trop grosse. Ce sont principalement les mois d'octobre et de novembre que l'on choisit pour l'accouplement, afin de faire correspondre l'agnelage avec la nouvelle saison, la gestation étant d'une durée de 150 jours (5 mois). 

Les brebis mettent habituellement bas en janvier, février ou mars, selon les contrées. Dans quelques pays on s'arrange pour avoir des agneaux nouveau-nés en juin. Quelques brebis mettent au monde deux agneaux à la fois, on préfère n'en voir naître qu'un mieux constitué. Les mères allaitent leurs petits pendant 5 mois, puis ceux-ci sont sevrés et gardés à part pendant une quinzaine de jours. C'est pendant l'allaitement que l'agneau subit deux opérations : l'amputation de la queue et l'émasculation.
-

Brebis allaitant son agneau.
Brebis allaitant sont petit.

Dans certains élevages, on laisse les agneaux se sevrer d'eux-mêmes, ce qui a toujours lieu avant l'âge de 6 mois. Dès leur deuxième année le bélier et la brebis peuvent donner des agneaux, mais on préfère avec raison que le bélier devienne père seulement à 3 ans; la brebis doit être mère à 2 ans. Il suffit dans un troupeau de 1 bélier par 30 brebis. 

Les moutons sont des animaux assez délicats et que de nombreuses maladies viennent attaquer. L'une des plus redoutables est la pourriture ou cachexie aqueuse . Le mal de Sologne, maladie rouge ou maladie d'été, est une affection plus prompte qui, en 6 à 10 jours, peut tuer un mouton après une enflure des membres antérieurs, un écoulement de matière épaisse par les narines et de bave écumante par la bouche. Vers les derniers jours, beaucoup d'animaux malades boivent abondamment et rendent un peu de sang par le nez ou par l'anus; alors ils survivent rarement. La maladie paraît due à une nourriture trop pauvre, à des soins insuffisants et à l'influence de l'humidité. 

Les races de moutons

Le mouton domestique (Ovis aries) est voisin de l'Argali de l'Asie occidentale et du Mouflon d'Iran (Mouflon d'Ispahan), encore plus que du mouflon de Sardaigne (Ovis orientalis musimon). Il semblerait que sa domestication ait été faite  en Inde occidentale; cependant, on a trouvé des restes de moutons, sans doute domestiques, dans les stations lacustres de la Suisse. Au reste, le mouton se modifie si facilement par l'élevage qu'il est impossible de savoir quelles sont les races primitives les plus anciennes.

Le Mouton est de longue date une des richesses de plusieurs peuples pasteurs d'Asie et d'Afrique. On est peu d'accord sur l'origine du Mouton domestique, et en présence de certaines singularités de conformation observées dans plusieurs régions de l'Orient, on a pu penser que plusieurs espèces avaient contribué à former les troupeaux de bêtes à laine des diverses contrées. Le Mouton morvant, Mouton. du Fezzan, ou Mouton à longues jambes originaire de la Guinée est monté sur des membres singulièrement longs. Transporté au Maghreb, en Afrique du Sud et de là aux Pays-Bas, il s'est mêlé, dit-on, aux grandes races ovines de la Flandre et du Texel. Le Mouton à grosse queue, déjà indiqué par Hérodote dans la haute Egypte, a sur les côtés de la queue de telles loupes graisseuses, que cet appendice est transformé en une masse énorme plus large à sa base que le corps lui-même. 
-

Moutons à grosse queue.
Moutons à grosse queue.

On retrouve ce trait à un moindre degré dans une race des steppes de la Russie et dans le Mouton d'Astrakhan, dont l'agneau mort-né fournit au commerce une pelleterie recherchée. Une autre race, de la Boukharie, a la queue si longue qu'elle traîne à terre. Les moutons de la race de Valachie portent des cornes qui s'élèvent au-dessus de la tête en longues spirales pyramidées; on trouve dans l'île de Chypre une race dont les béliers ont 4 cornes, 2 s'élèvent droites sur le sommet de la tête, les 2 autres se recourbent latéralement derrière l'oreille. Une race, particulière à l'Islande et aux Féroé, présente ainsi jusqu'à 6 cornes, toutes recourbées en arrière et de médiocre longueur. Quelque variées que soient les races européennes, elles ont entre elles beaucoup moins de dissemblances et on les a groupées sous le nom de Mouton commun.

Les races et variétés de moutons sont très nombreuses. Sanson les a groupées en trois catégories :

1° Races brachycéphales. Les animaux de cette classe sont caractérisés par un front large; les deux diamètres, longitudinal et transversal, du crâne, sont presque égaux. Les principaux types de cette catégorie sont ceux du Dishley, du New-Kent, du Southdown et du Limousin;

2° Races dolichocéphales. Dans ce groupe sont rangées les types ayant la boîte cranienne plus longue que large; le front est relativement étroit. On y trouve les variétés suivantes : cottswold, flamande, berrichonne, solognote, du Larzac, mérinos, barbarine et leurs dérivées;

3° Races métisses. Les métis ont des caractères individuels fort variables. Ils représentent une population ovine nombreuse. Les dishley-mérinos, les new-kent-berrichons, les moutons de la Charmoise, etc., sont issus de métissages.

Les mérinos.
L'extrémité sud-ouest de l'Europe est formée par l'Espagne, péninsule montagneuse qui a pour centre et pour partie culminante le plateau des Castilles ou Meseta (700 mètres au-dessus, du niveau de la mer). Autour de cette vaste plate-forme s'échelonnent de toute part des montagnes en descendant vers la mer eu vers le pied des Pyrénées. Des pâturages naturels se déroulent au loin sur ce plateau des Castilles et se retrouvent encore sur le sommet des divers échelons qui l'entourent. Des plaines fertiles et bien cultivées s'épanouissent au niveau le plus bas entre leurs derniers contre-forts. Tandis que les gras pâturages de ces plaines basses nourrissaient des moutons de grande taille, à laine longue et commune, les pâturages secs, fins et largement ouverts des contrées hautes modelaient peu à peu une race destinée à une célébrité sans, égale, la race des Mérinos, originaire du Nord de l'Afrique et introduite en Espagne par les Maures, d'où elle s'est répandue dans le monde entier. 

Les mérinos sont des  moutons de petite taille (hauteur au garrot 0,65 en moyenne), courts de corps (longueur 1 m en moyenne), longs de membres et d'encolure, étroits de poitrine et de dos, avec une tête volumineuse, à large face, à chanfrein arqué, mais non tranchant. Les béliers ont des cornes épaisses, rugueuses, contournées en spirale fort longue; les brebis n'ont pas de cornes. Le squelette est massif, la chair peu abondante; mais ce corps assez défectueux au point de vue de la boucherie est revêtu d'une toison merveilleuse. La laine couvre toute la surface du corps depuis le bord des sabots jusqu'au tour des yeux et aux bords des lèvres; elle est douce, extrêmement fine et formée de brins menus (diamètre 0,025 mm), nombreux, pressés, ondulés (8 à 10 ondulations sur la longueur), élastiques, résistants, longs de 6 cm environ. Un suint abondant unit les mèches de la laine, les assouplit, s'oppose à l'introduction des corps étrangers entre ses brins; agglutinant la poussière à la surface de la toison, il forme une croûte grisâtre, sorte de cuirasse qui enveloppe l'animal et s'ouvre en craquelant lorsqu'il remue, pour se refermer promptement dans le repos. Souvent la peau, participant de ce magnifique développement du pelage, forme des plis autour du cou, au haut des jambes; ce qui, d'ailleurs, ajoute à la quantité de la laine, mais en altère la qualité. La laine est d'une entière blancheur; les mérinos noirs ou tachés de noirs sont exceptionnels.

La toison en suint pèse de 4 à 5 kg chez les mâles, de 2 à 3 chez les femelles; au lavage elle perd habituellement 60% de son poids. Traditionnellement, l'immense majorité des mérinos (90%) ont été élevés dans des troupeaux dits transhumants, c'est-à-dire qui, par une migration périodique, recherchent une nourriture à peu près toujours la même. Cantonnés l'hiver au sud du Guadiana sur les confins de la Nouvelle-Castille, de l'Estramadure et de l'Andalousie, ils se mettent en mouvement en avril et mai pour remonter en pâturant vers le nord, les uns dans le Léon et les Asturies (mérinos léonais infantados, négrettis, etc.), les autres dans la Vieille-Castille par Madrid et Soria (mérinos sorians). En septembre et octobre les troupeaux, débarrassés de leur toison par la tonte, mais ralentis par l'état de gestation des brebis, regagnent peu à peu, vers le midi, leurs cantonnements d'hivernage. Une petite portion des mérinos de race pure vivent stationnaires dans des fermes, principalement aux environs de Ségovie, de Soria, d'Avila. Tel est le type développé en Espagne un peu par l'homme et beaucoup par la nature des choses. 

On ne connaît pas avec certitude l'étymologie du mot mérinos. On sait seulement que, dès le XIe siècle, entre les mains des Maures, la race mérine avait atteint sa perfection et alimentait des milliers de métiers à tisser la laine. Dès le XIIe siècle, le commerce des laines établissait des relations entre l'Espagne et l'Angleterre qui, plus tard (vers le milieu du XVe siècle), échangeait ses laines longues contre les laines fines et courtes des mérinos. Bien que l'administration despotique et peu éclairée des successeurs de Charles-Quint eût entièrement ruiné l'industrie du tissage, l'Espagne continua jusqu'à la fin du XVIIIe siècle à fournir à toute l'Europe des laines fines à carder (en 1796, l'exportation annuelle était de 5,500,000 kg). Malgré les interdictions sévères prononcées contre l'exportation des mérinos hors de l'Espagne, la Suède parvint à en obtenir un troupeau dès 1723; la France, en 1750; la Saxe, en 1765; l'Autriche, en 1770; la Prusse, en 1776; le Wurtemberg, en 1786; la Bavière, le grand-duché de Bade; en 1789. 

En prenant à l'Espagne cette race, ces divers États ne lui pouvaient prendre ni son sol et ses pâturages, ni ses moeurs quasi-pastorales. Aussi y eut-il bien des tâtonnements, des insuccès, des erreurs; mais la Saxe, en s'attachant dans ses tentatives à maintenir entièrement pure la race qu'elle voulait s'approprier, s'assura bientôt une supériorité complète même sur l'Espagne. Elle donna à l'industrie la fameuse laine électorale dont la réputation a été durable. Peu à peu; à son exemple, les parties voisines de l'Allemagne surent acquérir, la précieuse race et le mérinos allemand devint un producteur, éminent de laines à carder fines et superfines. 
-

Mérinos.
Mérinos.

Les mérinos en France.
Le premier essai d'importation de mérinos en France a été fait par Colbert, mais il échoua. La France, au temps de Buffon (Hist. nat.), n'avait que des laines inférieures à celles de l'Espagne et de l'Angleterre. Dès 1750, des, mérinos d'Espagne introduits dans le Béarn, par Etigny, puis dans le Blaisois par Perce, en Provence par la Tour-d'Aigues, avaient amélioré par croisement quelques troupeaux indigènes. Sans bien connaître ces faits, Trudaine, en 1767, chargea Daubenton d'instituer des expériences sur l'amélioration des races ovines française; elles furent installées à Montbard, en Auxois (Côte-d'Or). Six races y furent soumises : la race locale bourguignonne, la roussillonnaise, la flamande, une race anglaise, une du Maroc, une du Tibet

En 1776, Daubenton reçut enfin des béliers et des brebis de race mérine espagnole. Les résultats de ces expériences furent publiés dans les Mémoires de l'Académie des sciences, de 1768 à 1789. Daubenton donna comme conclusions les propositions suivantes : 

1° les races françaises indigènes de bêtes à laine peuvent être améliorées par elles-mêmes;

2° une race étrangère importée en France peut s'y maintenir sans dégénérer; 

3° le croisement d'une race commune avec des béliers d'une race à laine superfine donne promptement des métis à laine superfine; 

4° enfin, se fondant sur quelques faits seulement, il admit que les métis à laine superfine pouvaient entre eux donner des produits à laine superfine et même améliorer par croisement une race commune. 

Des conclusions qui précèdent cette dernière était seule contestable; ce fut elle qui prévalut aux yeux de la majorité des éleveurs toujours épris des prétendus avantages des croisements. Cette conception compromit le succès que dès lors on pouvait atteindre.

De 1768 à 1780, Barbançois, sur sa terre de Vilgongis (Indre), fit, avec le secours de Turgot et de Louis XVI, des essais analogues à ceux de Daubenton; Il arriva aux mêmes conclusions, elles furent aussi mal interprétées par le public. Enfin en 1786, Louis XVI, sur le conseil de Tessier, fonda la bergerie de Rambouillet et y installa un beau troupeau de près de 300 mérinos léonais venus d'Espagne. Tessier, Gilbert sacrifièrent tous leurs soins, et ce dernier jusqu'à sa vie, à importer en France de nouveaux mérinos espagnols; mais pour prix de tant d'efforts, la belle race  fut définitivement naturalisée en France dès 1811 et elle se répandit promptement par tout le pays. L'esprit de routine s'attacha d'abord à dénigrer la race mérine; mais de 1820 à 1825, les laines mérinos produites en France eurent une vogue sans égale et rapportèrent de gros bénéfices; ces succès convertirent les plus rebelles. Le troupeau de mérinos de Naz, près de Gex (Ain), uniquement élevé en vue de la laine, atteignit une finesse extrême; dans celui de Rambouillet on rechercha moins exclusivement la finesse de la laine, on resta plus exigeant sur le poids de la toison. 

A la fin du XIXe siècle on trouvait le mérinos français dans le Roussillon, le bas Languedoc, la Bourgogne, la Champagne, la Brie, l'Ile-de-France (bassins du Rhône, de la Marne et de la haute Seine). Il a donné avec les races locales de nombreux métis-mérinos à laine fine. On doit à Graux, de Mauchamp (Aisne), une famille fort intéressante de mérinos à laine soyeuse propre à être peignée. Elle eut pour origine un bélier de race mérine pure, né en 1828 dans le troupeau de cet éleveur; au lieu de le réformer à cause de sa mauvaise conformation, Graux le conserva à cause de sa toison à brins inégaux, à peine ondulés, lisses et soyeux. Unis plus tard avec les mérinos de Rambouillet, les mérinos Mauchamp ont donné les beaux Mauchamp-Rambouillet du troupeau de la bergerie de Gevrolles (Côte-d'Or), transportée par la suite à Chambois (Haute-Saône).

Pendant que la production de la laine fine absorbait ainsi tous les efforts des Allemands et des Français, que devenait la production de la viande de mouton? Les Anglais y avaient pourvu merveilleusement. Les races de l'Angleterre, proprement dites, ont-elles, ainsi qu'on l'affirme, reçu jadis (aux temps d'Henri VIII et d'Élisabeth Ire) du sang des mérinos d'Espagne? Il est permis d'en douter. Mais ce qui est certain, c'est que, dans le XVIIIe siècle, les éleveurs anglais se sont façonné des moutons de première valeur pour la boucherie et qu'ils en tirent des laines que l'industrie ne dédaigne pas.

Les éleveurs français, parvenus enfin à s'approprier les admirables laines de la race mérine, ne tardèrent pas à remarquer aussi les produits des éleveurs anglais. Par les progrès des procédés industriels et par les vicissitudes de la mode, la vogue des laines superfines tomba et la valeur des laines mérines en général diminua peu à peu. Alors, sans abandonner cette belle production, les Français se préoccupèrent avec raison de l'introduction des races anglaises dans leur pays en vue de relever la production de la viande de mouton. En 1833, un petit troupeau de new-leicester fut acheté par le gouvernement et placé à Alfort. Croisés avec la race flamande, les béliers de ce troupeau donnèrent des produits excellents. Le concours universel de 1850 fit connaître la belle race southdown, qui ne tarda pas à être introduite dans les bergeries particulières. Sous Napoléon III, la bergerie impériale du Haut-Tingry (Pas-de-Calais) a eu pour mission d'élever des moutons de races anglaises au milieu des contrées les mieux préparées pour la production des moutons de boucherie. Malingié Nouel a consacré 30 ans de sa vie à introduire dans le Berry, à sa ferme de la Charmoise (Loir-et-Cher), les new-kent, en les croisant avec la vieille race berrichonne, déjà croisée de mérinos.

Ce qui caractérise essentiellement le mérinos français, c'est sa taille élevée, son corps trapu, pesant de 80 à 100 kg, ses membres forts, sa laine fine et douce en zigzags rapprochés, forte, élastique et disposée en mèches carrées. Le mérinos est fort, énergique et vigoureux, il supporte mieux les chaleurs que l'humidité; il est peu difficile sur la qualité, mais demande beaucoup de nourriture.

Les races anglaises.
On a l'habitude assez peu rationnelle de partager les races anglaises améliorées en Moutons à laine longue et Moutons à laine courte ou plutôt à laine moyenne. Ces races, toutes élevées en vue de la boucherie, ne donnent pas de véritable laine courte et le brin est toujours moins fin que celui des mérinos. 

Races anglaises à longue laine.
La plus celèbre des races de moutons anglais à longue laine est la race de Dishley, plus généralement nommée aujourd'hui New-Leicester (nouvelle race de Leicester). Elle doit ses mérites aux améliorations profondément intelligentes du célèbre Robert Bakewell, fermier à Dishley Grange (Leicester), de 1755 à 1795. Prenant pour point de départ la vieille race de moutons de son pays, cet éleveur se proposa d'en faire des animaux de boucherie. Il comprit qu'il lui fallait choisir pour reproducteurs des animaux d'une taille modérée, mais pourvus d'os menus, peu chargés de toison (elle pesait communément dans la race locale 4 à 5 kg, avec des brins longs de 0,25 m à 0,35 m). Il les nourrit abondamment sur ses riches pâturages. Puis il unit ses béliers et ses brebis les mieux conformés au point de vue indiqué, et par une sélection absolue obstinément poursuivie, sans tenir compte de la parenté, il fit produire toujours entre eus les animaux nés de ces premières unions. Au bout de 5 ans, ses moutons étaient assez améliorés pour que la location des béliers comme reproducteurs lui donnât déjà des revenus.

Le Mouton New-Leicester a la tête fine et étroite; cou médiocrement long; poitrine large, descendant bas, saillante; corps arrondi en forme de tonneau; dessus du corps formant table du garrot à l'origine de la queue; cuisses musculeuses et écartées; jambes courtes et minces; charpente osseuse légère; viande abondante (poids net de la viande : brebis adulte grasse, 50 à 65 kg; mouton adulte gras, 75 à 80 kg); poids de la brebis grasse, 70 à 90 kg; du mouton gras, 120 à 150 kg; la toison est douce, brillante, lisse à la première tonte, de moins en moins fournie aux suivantes, le brin a 0,18 m à 0,22 m de longueur et le poids moyen de la toison lavée à froid est de 3 kg à 3,2 kg; l'engraissement est facile et précoce; tout le corps est enveloppé d'une couche de graisse placée sous les muscles peauciers. Cette belle race de boucherie s'est répandue dans toutes les parties de l'Angleterre et dans maint pays étranger.

Après les New-Leicester, on peut citer encore avec parmi les races anglaises améliorées dites à longue laine : 

La race costwold (cabanes en plein champ), élevée primitivement sur les collines du comté de Glocester où de simples cabanes en bois lui donnaient  abri l'hiver, plus rustique et plus grande que les new-Leicester, presque aussi remarquable pour la boucherie, et qui s'est répandu du Norfolkshire au comté de Glamorgan;

La race New-Kent ou du Romney-marsh, plus féconde et meilleure laitière, plus haute de taille et à toison plus lourde que les new-leicester, mais beaucoup moins bien conformée pour la boucherie.

Races anglaises à laine moyenne.
Au premier rang des races anglaises dites à laine moyenne se place la race de Southdown (des collines du Sud). Son amélioration est due principalement à un éleveur moins célèbre que Bakewell, mais non moins distingué, John Ellmann, fermier à Glynde (Sussex), de 1780 à 1832. L'oeuvre a été continuée par Jonas Webb, fermier à Brabaham, qui a porté cette race à sa perfection. Le Southdown de J. Webb est le type du mouton de boucherie. Cette race se reconnaît assez facilement à la coloration gris noirâtre de la face et des pattes et à la toison épaisse assez courte et frisée oui enveloppe tout le reste du corps. Le poids de l'animal vivant est de 60 à 70 kg sans jamais dépasser 80; le rendement net en viande est d'un peu plus de 53 pour 100 et près de 10 pour 100 en suif. La toison lavée à froid pèse 3,2 kg à 3,8 kg; le brin de laine est frisé, mais gros et rude, de médiocre finesse et long de 3 cm à 1 cm . 

Les autres races à laine moyenne que l'on pourrait citer sont celles du Hampshire, du Shropshire, de l'Oxfordshire.

Races écossaises.
Quant aux races écossaises, race à face noire (black-face) et race Cheviot, ce sont les rudes produits des montagnes inhospitalières du nord de la Grande-Bretagne.

Les races Françaises.
C'est dans les départements de la creuse, de l'Aveyron, de la Corrèze, de l'Indre, et dans les plaines de la Brie et de la Beauce que l'on rencontre en France le plus de moutons. On remarque que les régions pauvres en moutons sont les plus riches en gros bétail (Normandie, Bretagne). 

Parmi les anciennes races françaises de moutons, on peut distinguer deux groupes, au Nord et au Sud de la Loire :

Au nord de la Loire, de la Côte-d'Or et du Jura, ainsi que dans le Poitou et l'Aunis, elle produisait des races ovines de grande taille à laine longue et lisse : races flamande, artésienne, picarde, cauchoise, normande, race bretonne, mancelle, poitevine, ardennaise, Iorraine, bourguignonne. 

Au sud de la Loire, sur le reste du  sol français, les races ovines étaient de petite taille et donnaient une laine courte, et frisée, mais grossière : races roussillonnaise, provençale, berrichonnes, solognote, bourbonnaise, marchoise, race du Larzac, limousine, auvergnate, béarnaise. 

+ Race berrichonne, qu'on trouve surtout dans l'Indre; les formes sont régulières et amples, le poids vif atteint jusqu'à 50 kg, la toison tassée est abondante, toujours blanche. Moutons très estimés en raison de la saveur délicate de leur chair. 

+ Race solognote, caractérisée par sa tête et ses jambes roussâtres, sa laine frisée; ils sont de petite taille.  (E. Trouessart/ Ad. F. / NLI / C. Chenu).

.


Dictionnaire Les mots du vivant
A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z
[Aide][Recherche sur Internet]

© Serge Jodra,  2010 - 2015. - Reproduction interdite.