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Hôtel de Ville de Paris (IVe'arrondissement). - L'Hôtel de Ville actuel de Paris a été totalement reconstruit sur de nouveaux plans après l'incendie du 24 mai 1871, mais il n'a pas quitté l'emplacement que lui avait assigné, en 1357, le prévôt des marchands, Étienne Marcel; en tant que monument, il a donc une histoire intimement liée à celle des droits, des libertés, des insurrections de Paris, et, par conséquent, des défaites ou des victoires du pouvoir central, depuis le Moyen âge jusqu'à nos jours. Mais, antérieurement à la captivité de Jean le Bon, Paris n'eut ni hôtel de ville, ni maison de ville, ni maison commune; il ne formait point corps; il appartenait en propre au roi de France, comte de Paris, représenté pendant quelque temps par un vicomte, puis par un prévôt royal, dont la juridiction s'étendait d'ailleurs sur la banlieue : ce fief dominant, jusqu'en 1789, porta le nom de prévôté et vicomté de Paris.
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Hôtel de Ville, à Paris (4e arrondissement).
L'Hôtel de Ville de Paris. 

Il est vrai que la royauté n'empêcha pas, tout en le réglant et le subordonnant, le développement des corporations parisiennes, et que, dans le nombre, celle des marchands de l'eau, qui détenaient le monopole des grandes affaires et du commerce par la Seine, acquit à la longue une grande richesse et une véritable prépondérance. Mais, dans le bureau des marchands (rue Saint-Leufroy et sous l'arcade du grand Châtelet), puis dans le Parloir aux bourgeois (sur la montagne Sainte-Geneviève; près de l'enclos des Jacobins), l'on ne saurait voir qu'un centre d'affaires, de juridiction commerciale. Topographiquement, le Parloir aux bourgeois était même fort mal placé sur la rive gauche, près de l'enceinte, à l'extrémité de l'Université. Ce n'était qu'un misérable établissement, sans aucun rapport avec les magnifiques édifices dont s'enorgueillissaient les cités de Flandre. 

Étienne Marcel, prévôt des marchands, jeta son dévolu sur une belle maison de la Grève, qui, depuis trois ans, appartenait au dauphin Charles, devenu depuis régent de France, et plus tard roi sous le nom de Charles V. Ce prince, alors sans autorité, avait sans doute été instruit du dessein de Marcel, car il essaya de parer le coup en faisant don de sa maison à son conseiller, ancien receveur de la ville, Jean d'Auxerre. Mais une ordonnance des États généraux fit prévoir la révocation des donations faites aux dépens du domaine, qui ne seraient pas approuvées par la chambre des comptes, et le régent, révoquant lui-même son don à Jean d'Auxerre, confirma l'acquisition faite par Marcel, pour 2880 livres parisis, de la Maison aux piliers (7 juillet 1357). 
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Ancien Hôtel de Ville de Paris.
L'ancien Hôtel de Ville de Paris, par Bernhard Schmidt (1832).

C'est à la « meson de ville » que le prévôt des marchands fit transférer l'artillerie du Louvre (1358); c'est pour « l'adjoindre à l'ostel de ville » qu'il eut encore le temps de faire l'acquisition d'une maison voisine, vendue par Guillaume Le Chasteillon. Après la défaite et la mort de Marcel, la prévôté des marchands fut entièrement subordonnée à la prévôté de Paris. Son nouveau local, à la suite de la répression des Maillotins, fut attribué, pendant une vingtaine d'années, à la prévôté de Paris. Une ordonnance de 1403 appelle la maison aux piliers «-l'ostel du roi en Grève-».
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Commune de Paris : incendie de l'Hôtel de Ville.
L'Hôtel de Ville, après l'incendie du 23 mai.

La ville ne recouvra une partie de ses droits municipaux et son hôtel que par l'ordonnance du 12 janvier 1411, confirmée et développée en 1415. Les comptes du XVe siècle mentionnent des travaux de réparations exécutés dans la vieille Maison aux piliers. Elle menaçait ruine; elle était devenue tout à fait insuffisante. En 1529, les officiers municipaux demandèrent à François Ier de la reconstruire en l'agrandissant. Les immeubles voisins furent achetés et démolis aux frais de la ville, et, le 15 juillet 1533, fut posée la première pierre par le prévôt des marchands, Pierre Viole, sieur d'Athis, et les quatre échevins. 

« Pendant que l'on faisait l'assiette de cette pierre, sonnaient les fifres, tabourins, trompettes et clerons; artillerie, cinquante hacquebutes à crocq de la ville, avec les hacquebutiers d'icelle ville, qui sont en grand nombre. Et aussi sonnaient à carrillon les cloches de Saint-Jean-en-Grève, du Saint-Esprit et de Saint-Jacques-la-Boucherie. Aussi, au milieu de la Grève, il y avait vin défoncé, tables dressées, pain et vin pour donner à boire à tous venons, en criant par le menu peuple à haute voix : Vive le roy et messieurs de la ville! »
Le plan du nouvel Hôtel de Ville était dû à Dominique de Cortone, surnommé le Boccador; il est douteux que le « maître maçon » Pierre Chambiges ait fait autre chose que diriger les travaux. En 1541, on avait achevé trois corps du bâtiment, deux sur la place de Grève, et un parallèle à la Seine; sous Henri Il, on ne construisit qu'un seul pavillon. Henri IV fit reprendre la construction interrompue; il abandonna, pour en faire les frais, la moitié du produit des amendes prononcées par la juridiction de la ville; le prévôt des marchands, François Miron, y consacra son traitement; de 1606 à 1608, nous trouvons comme entrepreneurs Pierre Guillain et Marin de La Vallée; de 1613 à 1623, Augustin Guillain, le fils, qui acheva l'Hôtel de Ville. 

Rien ne fut changé au gros oeuvre jusqu'en 1837 : c'est alors que les architectes Godde et Lesueur furent chargés d'ajouter aux extrémités de la façade deux très vastes pavillons; disons que, nécessités par les besoins des services municipaux, ils dénaturaient et alourdissaient l'aspect du monument du XVIe siècle. Le second Empire associa à Lesueur Victor Baltard, resté seul de 1854 à 1870, et qui termina la décoration intérieure. 
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Hôtel de Ville, à Paris (4e arrondissement).
Partie centrale de la façade de Hôtel de Ville.  (© Photos : Serge Jodra, 2009).

L'incendie du 24 mai 1871 ayant détruit l'Hôtel de Ville, on crut d'abord pouvoir en partie utiliser les ruines; mais cela ne fut pas possible, et c'est un monument entièrement nouveau qu'ont élevé (de 1874 à 1878 pour le gros oeuvre) Ballu et Deperthes. Ces architectes ont surtout tenu, et ils ont réussi, à ressusciter l'Hôtel de Ville ancien dans des dimensions beaucoup plus considérables. Les façades sont ornées de statues de cent six Parisiens illustres. Une inscription, dont le texte est voté, doit prochainement rappeler à tous les grands traits de l'histoire du monument-

« Cet édifice  a été construit de 1874 à 1885 - par Théodore Ballu et Édouard Deperthes - sur l'emplacement - de l'ancien Hôtel de Ville - élevé par le Boccador - en 1533 - et de la Maison aux piliers - acquise par Étienne Marcel - le 7 juillet 1357. » 
(H. Monin).
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Dictionnaire Villes et monuments
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