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Eu, Alga
ou Auga, est une commune de France ,
dans le département de la Seine-Maritime (Normandie ),
sur la Bresle, à 31 kilomètres au Nord-Est de Dieppe,
à 3 kilomètres de la mer, au milieu d'une vaste forêt,
8100 habitants.
Histoire.
L'existence de la ville d'Eu remonte au
moins à l'époque romaine .
Après la cession de la Normandie
aux Vikings, au commencement du Xe
siècle, elle paraît avoir été fortifiée
par le duc Rollon, puis devint en 996 le chef-lieu
d'un comté possédé par Geoffroy, fils naturel du duc
Richard Ier. Le fils de ce premier comte,
Gibert, fut dépouillé par son oncle, le duc Richard II, qui
donna le comté à son frère naturel Guillaume ler,
auquel succédèrent son fils Robert Ier,
puis, vers 1090, Guillaume II, fils du précédent. Le fils
de celui-ci, Jean, qui lui succéda vers 1140, concéda en
1150 à la ville une charte de commune sur le modèle de celle
de Saint-Quentin. Il mourut vers 1170
et fut remplacé par son fils Henri II, auquel succéda également
son fils Raoul Ier, en 1183. Celui-ci étant
mort sans enfant, en 1186, sa soeur Alix hérita du comté
qu'elle porta ainsi dans la maison de son mari, Raoul de Lusignan, dit
d'Issoudun. Leur fils, Raoul III, succéda à sa mère,
en 1227, dans le comté d'Eu. Comme il ne laissa qu'une fille, Marie,
épouse d'Alphonse de Brienne, le comté fut par elle porté
dans la maison de Brienne (avril 1249). Jean
de Brienne Ier (1252-1259), Jean de Brienne
II (1259-1302), Raoul de Brienne Ier (1302-1345),
Raoul de Brienne II (1345-1350), furent successivement comtes d'Eu de père
en fils. Le dernier, connétable de France ,
fut, comme on sait, décapité à Paris
le 19 novembre 1350.
Le comté d'Eu, réuni à
la couronne par confiscation, fut concédé en 1352 par le
roi
Jean à Jean d'Artois ,
fils de Robert d'Artois. Son fils, Robert
II d'Artois, lui succéda en 1387 et à celui-ci, son frère,
Philippe d'Artois, la même année. Il mourut dix ans plus tard
laissant le comté à son fils aîné Charles d'Artois,
en faveur duquel Charles VII, en août
1458, érigea le comté d'Eu en pairie; il mourut en 1472 sans
enfant. Pendant sa captivité en Angleterre ,
le comté d'Eu, conquis par Henri
V avec toute la Normandie ,
avait été concédé à un Anglais, Henri
de Bourgehier, qui le conserva jusqu'en 1450. Après la mort de Charles
d'Artois, le comté passa à son neveu Jean de Bourgogne ,
comte de Nevers .
A cette époque, le roi Louis XI, craignant
de voir la ville d'Eu tomber entre les mains du roi
d'Angleterre, Edouard IV, qui
projetait une descente en Normandie, décida d'incendier la ville.
Cette résolution fut rigoureusement exécutée le 18
juillet 1475 par Joachim Rohant, maréchal de France. Le château
et toutes les maisons furent réduites en cendres; les églises
seules furent épargnées. De cette époque date l'irrémédiable
décadence de la ville; Dieppe, Saint-Valery
et Abbeville
profitèrent de sa ruine.
Le comte Jean mourut à Nevers le
25 septembre 1491. Depuis, la ville d'Eu eut pour comtes les comtes de
Nevers et de Rethel
de la maison de Clèves
: Engilbert de Clèves, petit-fils du précédent (1492-1506);
Charles de Clèves (1506-1521); François Ier
de Clèves (1524-1562); François II de Clèves (1562-1563);
Jacques de Clèves (1563-1564); Catherine de Clèves, soeur
cadette du précédent, morte sans enfant, hérita pour
sa part du comté d'Eu, qu'elle porta dans la maison de Guise
par son mariage en secondes noces avec Henri le Balafré, duc de
Guise en 1570. Elle mourut à quatre-vingt-cinq ans, le 11 mai 1633,
laissant le comté d'Eu à son fils aîné Charles
de Lorraine, duc de Guise, qui le laissa lui-même en mourant (30
septembre 1640) à Henri II de Lorraine, qui le vendit en 1660 à
la fille de Gaston d'Orléans, Marie-Louise d'Orléans, qui
en fit don, comme prix de la liberté de Lauzun, en 1682, au duc
du Maine, fils légitimé de Louis XIV,
qui rétablit en sa faveur en 1694 le titre de pairie. Il passa ensuite
à ses fils, le prince de Dombes et le comte d'Eu; puis, comme ils
moururent sans enfants, au duc de Penthièvre ,
qui habita le château jusqu'en 1789.
La
rue de la Grande-Mademoiselle, à Eu.
La Révolution
confisqua le domaine comme bien national, mais il n'en fut aliéné
que quelques fois, et, en 1814, Louis XVIII
en rendit la propriété à la duchesse douairière
d'Orléans qui le transmit en 1821
à son fils, devenu plus tard le roi Louis-Philippe.
Celui-ci habita souvent le château et en reconstitua le domaine.
Le décret du 22 janvier 1852 confisqua le domaine d'Eu, ainsi que
tous les autres biens de la famille d'Orléans, à laquelle
ils ont été restitués, comme on sait, après
la guerre de 1870, par l'Assemblée nationale. Le domaine d'Eu devint
la propriété du comte de Paris,
et le titre de comte d'Eu fut porté par le fils aîné
du duc de Nemours .
Monuments.
Le château d'Eu (mon. hist.)
occupe l'emplacement de l'ancienne forteresse féodale. La construction
actuelle, commencée par Henri de Guise en 1578, était loin
d'être achevée quand Mlle de Montpensier en prit possession
en 1661. Elle y séjourna souvent, continua la construction et les
aménagements du domaine, et y réunit une belle collection
de peintures. Pendant la Révolution,
il servit d'hôpital, puis devint sous l'Empire la résidence
du titulaire de la sénatorerie de Rouen;
ce fut alors qu'on détruisit une grande partie des bâtiments.
Louis-Philippe
le fit remanier de fond en comble par l'architecte Fontaine.
Il fut encore une fois dépouillé de ses meubles et de ses
oeuvres d'art sous l'Empire, et a été restauré depuis
par le comte de Paris. C'est un vaste bâtiment
en briques rouges, à pilastres de
pierre, dont la façade a plus de 90 m de long. La chapelle
a de beaux vitraux modernes, d'après
Chenavard et Paul Delaroche.
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Le
château d'Eu.
L'église
Saint-Laurent (mon. hist.), restaurée par Viollet-le-Duc,
est un édifice gothique construit
de 1186 à 1190, mais considérablement remanié aux
XVe et XVIe
siècles. Avant d'être église paroissiale, elle dépendait
d'une abbaye d'augustins,
fondée en 1119. L'archevêque, de Dublin
saint Laurent, y mourut en 1181 et devint plus tard le patron de l'église.
On y remarque surtout le portail principal,
composé de trois portes, dont celle
du milieu a une belle voussure soutenue
par des colonnes de marbre
Le choeur est soutenu par une armature de
contreforts à trois étages, ornés de balustrades,
de clochetons et de pinacles
sculptés du plus gracieux effet. Les fenêtres
sont du gothique flamboyant, sauf la grande rosace
du portail Nord qui est du XIIe siècle.
La
voûte de la nef
a été reconstruite en 1839. Dans la chapelle
de la Vierge ,
on conserve une vierge en bois qui passe pour avoir été le
« chef-d'oeuvre » de l'un des Anguier.
Les autres chapelles contiennent une foule d'oeuvres d'art et notamment
de tombeaux, en partie anciens, en partie reconstitués sous le règne
de Louis-Philippe.
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L'église
Saint-Laurent, à Eu. Ci-dessous, le chevet et la nef.
La chapelle de l'ancien collège
des Jésuites (mon. hist.) est l'ancienne église des jésuites,
établis par Catherine de Clèves .
Elle a été construite de 1622 à 1624; c'est un bâtiment
de brique et de pierre, intéressant spécimen de l'architecture
de cette époque. Elle renferme deux tombeaux magnifiques celui de
Catherine de Clèves et celui de son mari Henri de Guise. On les
a longtemps attribués sans raison suffisante à Germain
Pilon. Le collège lui-même est un bel édifice en
brique et pierre de la fin du XVIe siècle.
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La
chapelle de l'ancien collège des Jésuites. A droite, l'entrée
du collège.
©
Photos : Serge Jodra, 2010.
La ville d'Eu a aussi conservé quelques
vestiges de ses anciens remparts du XIIIe
siècle, notamment deux vieilles tours construites en galet.
(GE). |
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