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Brest
Brest, Gesocribate (selon Walckenaer), et non Brivates, est une ville et port de France, dans le département du Finistère, à 500 kilomètres à l'Ouest de Paris; 145 900 habitants. Son port est un des plus sûrs de l'Europe; sa rade est vaste (35 km de circuit), mais elle est dangereuse en dehors de la passe qui l'unit à la mer, et qu'on nomme le Goulet. 

Brest se compose de deux parties séparées par un bras de mer, Brest proprement dit et le quartier de Recouvrance. Entre les deux, plusieurs ponts, à commencer par celui de la Recouvrance, le plus important pont levant d'Europe, avec sa porté de 87 m. On remarque le cours Dajot ou d'Ajot (belle promenade), la place d'Armes dite le Champ de bataille, les superbes établissements relatifs à la marine. Quais, bassins, dont un taillé dans le roc. La ville, bombardée pendant pratiquement toute la durée de la Seconde guerre mondiale, a du être en très grande partie reconstruite ensuite.

Histoire.
L'histoire de Brest s'est d'abord concentrée dans celle de son château sous les Romains et jusqu'au delà du Moyen âge. Le nom de Brest correspond au mot breton' Breiz, Bretagne. Dans la carte de la Gaule romaine de Ernest Desjardins, c'est Gesocribate qui tient la place où est Brest. La chronique de Nantes, écrite au XIe, siècle, mentionne le château de Brest en 874. 

Malgré sa situation, Brest est depuis très longtemps moins une ville bretonne qu'une sorte de colonie de fonctionnaires, du moins du côté le plus important, rive gauche. Déjà à la fin du XIXe siècle, la proportion des noms bretons des habitants était, approximativement, de 1/4 pour Brest proprement dit, de 2/5 pour Recouvrance, de 1/2 pour les environs.

L'histoire ne nous fournit que des données incertaines sur Brest à l'époque de l'occupation de la Gaule par les Romains. La légende veut que Conan Mériadec, à la fin du IVe siècle, ait continué l'oeuvre des conquérants, double intervention que semble indiquer pour le château la différence des travaux.

Après la domination romaine, il s'établit en Bretagne plusieurs comtés indépendants : le château de Brest était compris dans le territoire des comtes de Léon. Morvan II le restaura en 1065. 

Cependant les ducs de Bretagne, devenus puissants, songèrent à réduire les seigneurs de Léon. Le comte Hervé IV céda au duc Jean Ier, son suzerain et aussi son créancier, en 1239, la ville, le château et le port de Brest. Annexé au domaine des ducs, Brest acquit une sérieuse importance. « N'est pas duc de Bretagne qui n'est sire de Brest », disait plus tard un des conseillers de Montfort. En 1341 éclata la lutte entre Charles de Blois et Jean de Montfort; celui-ci s'empara de Brest, après avoir fait le siège du château, dans lequel périt son défenseur Gauthier de Clisson. 

Cette place tomba, par suite, en 1342, au pouvoir du roi d'Angleterre, Edouard Ill, allié des Montfort. Du Guesclin vint faire le siège de Brest, mais en vain; ce fut seulement le 28 mars 1397 que cessa l'occupation étrangère (La Guerre de Cent ans).

Sous la domination française, Brest devint tout d'abord le centre, sur l'océan Atlantique, des armements pour l'expédition d'Italie. Après la mort de Charles VIII, Louis XII, devenu le second époux de la reine Anne, prescrivit, en 1501, l'armement de sept vaisseaux, an nombre desquels étaient la Charente et la Cordelière. François ler ordonna à Brest quelques, constructions, malgré sa prédilection pour Le Havre, fondé par lui en 1518. 

Marc de Carné, lieutenant du château de Brest, repoussa, en 1543, une descente des Espagnols. Cependant, les Anglais continuaient de menacer Brest, et en 1558, une flotte anglaise renforcée de vaisseaux flamands vint débarquer près de Saint-Mathieu des troupes, qui saccagèrent les environs, mais qui furent complètement battues par les habitants.

Brest subit le contre-coup des guerres de la Ligue. Rosampoul, qui y exerçait les fonctions de la capitainerie, ayant embrassé le parti de la Ligue, s'aliéna les habitants, et il fut facile à Guy de Rieux, lieutenant général du roi Henri IV, de se faire livrer la place (1589). A la mort de Guy, l'année suivante, son frère René, seigneur de Sourdéac, lui succéda. Il augmenta les travaux de défense et il acheva au château le bastion qui porte son nom. Il repoussa vigoureusement, à diverses reprises, les Espagnols, que les ligueurs avaient appelés comme auxiliaires. 

Le fait d'armes le plus important fut la prise du fort que les Espagnols avaient bâti sur la pointe qui porta désormais leur nom (17 novembre 1594), et où périrent les capitaines des deux partis, l'Espagnol Praxède et le Gascon Romégou, qui furent inhumés ensemble dans une église de Brest.

Henri IV accorda aux habitants de Brest droit de bourgeoisie, par lettres-patentes du 31 décembre 1593, qui complétèrent et régularisèrent la situation de la ville sous le double rapport administratif et judiciaire, en séparant leurs attributions. Ainsi fut créée la communauté de Brest, comme l'avaient été celles de Nantes en 1559, de Morlaix en 1568, de Rennes en 1592. Sous l'administration de Sourdéac, un règlement fut conclu devant notaires le 6 décembre 1618, entre le gouverneur et les habitants de Brest, acte détaillant leurs obligations réciproques, lors de l'installation des maires. La pompe déployée dans cette cérémonie symbolisait l'autorité morale du premier magistrat.

Le 29 mars 1631, fut organisée la marine du Ponant, par un règlement qui faisait de Brest un centre d'opérations maritimes, avec Le Havre et Brouage, qu'il ne tarda pas à surpasser, grâce surtout à Colbert. Après la visite des ports par de Seuil, en 1661, Duquesne, de concert avec lui à Brest, fut investi de pouvoirs militaires et administratifs et fit exécuter tout d'abord divers travaux de défense. 

Plus tard, à la suite de la mission de l'ingénieur de Clerville, qui déclara que la population même était à créer à Brest, le port reçut une nouvelle impulsion et il put fournir de nombreux contingents aux flottes de J. d'Estrées et de Château-Renault.

C'est à cette époque que Colbert institua (1670) les Gardes de la marine. Des travaux de défense furent exécutés en 1674 par Lavoye, sous l'impulsion d'une alarme, causée par les Hollandais, mais ce n'étaient que des terrassements, et l'ingénieur Sainte-Colombe proposa un projet de nouvelles fortifications, qui fut adopté par Seignelay, lors de sa mission de 1681.

Malgré les travaux du port, Brest était encore fort peu développé, ne renfermant pas même trois cents maisons; la réunion des deux parties de la ville fut ordonnée, ainsi que le rappel du siège de la justice royale, transféré depuis 1592 à Saint-Renan. 

Au moment de la guerre de la ligue d'Augsbourg, les travaux furent de nouveau activés. Un danger plus grand vint ensuite menacer Brest, Guillaume III ayant tenté de l'enlever de vive force. Comme l'avait prévu Vauban, ce fut à Camaret que la flotte anglo-hollandaise, le 17 juin 1694, vint tenter un débarquement; mais les dispositions étaient prises, et les alliés essuyèrent une défaite complète. Vauban, le sauveur de Brest, quitta la ville en 1695. 

C'est en 1752, sous le ministère de Rouillé, que fut fondée à Brest, l'Académie royale de la marine, qui devint aussitôt célèbre, par l'importance des mémoires publiés. Machault, son successeur, ordonna les armements nécessités par la guerre de Sept ans. Déjà, sous le ministère de Moras, en 1757, une épidémie apportée de Louisbourg ravagea la ville et fit périr jusqu'à dix mille personnes. Dans la période suivante furent construits à Brest, dont la population croissait rapidement, de nombreux édifices pour la marine. 

En 1778, les préparatifs de la guerre d'Amérique donnèrent au port une grande activité. Dix mille ouvriers travaillaient dans l'arsenal, des flottes y étaient armées, les vaisseaux y étaient commandés par des capitaines tels que d'Estaing, Lamotte-Piquet, Suffren. C'est de Brest que partirent, le 1er août 1785, La Pérouse et Fleuriot de Langle, sur la Boussole et l'Astrolabe. De ce même port partira plus tard (en 1791) une autre expédition scientifique, celle de d'Entrecasteaux.

La prise de la Bastille (La Révolution française) eut son contre-coup à Brest. Un conseil général s'organisa et s'attribua tous les pouvoirs. Puis une nouvelle association rivale de ce conseil et de la municipalité se fonda, c'était la Société des amis de la Constitution. La rébellion était partout, jusque sur les vaisseaux; l'ordre y lut rétabli, pour un temps, par Bougainville, envoyé à Brest à cet effet (novembre 1790). Mais les officiers de marine, presque tous nobles et suspects, ne sont pas seulement en lutte avec les équipages de la flotte, qui se désorganise, plusieurs sont maltraités par la population et se décident à émigrer; l'anarchie est à son comble. On fait aux soldats de Châteauvieux, condamnés aux galères pour rébellion en 1790, une ovation, qui fut reproduite à Paris, et qui fut flétrie en vers indignés par André Chénier (février 1792).

Le commandement de la marine venait d'être remis au vice-amiral Thévenard, qui prit pour la défense de la ville les mesures nécessaires. Au commencement de 1793, la nouvelle administration du district arrêta l'envoi d'un bataillon de fédérés chargé d'assurer contre la Montagne l'inviolabilité de la représentation nationale. Il dispersa les sans-culottes, puis alla combattre l'insurrection de Vendée

La nouvelle de l'exécution de Louis XVI plongea la ville dans un morne abattement. Brest, qui ne reconnaissait plus l'autorité de la Convention, ayant expulsé ses représentants, la Montagne décréta la mise en accusation des administrateurs du Finistère, puis envoya de nouveaux représentants à Brest, au nombre desquels Jean-Bon Saint-André. Celui-ci se refusa d'abord à rétablissement d'un tribunal révolutionnaire. Il sut aussi contenir dans le devoir les ouvriers du port et les équipages de la flotte, mais quand il fut rappelé à Paris, son collègue Laignelot, à Brest, se hâta de nommer un tribunal révolutionnaire, qui fit exécuter soixante et onze personnes dont la plupart des anciens administrateurs du département. 

J.-B. Saint-André, revenu à Brest, s'occupa avant tout de sa mission, l'armement des forces destinées aux croisières, dont  plusieurs furent avantageuses, notamment celle où s'immortalisa le Vengeur. C'est de Brest que partirent, pour une descente en Irlande, la flotte qui conduisit Hoche (1795) et, trois ans après, la division Bompard; on sait comment échouèrent ces deux tentatives. En 1799, Bruix partit également de ce port et y revint après sa belle croisière.

Lorsque Caffarelli, qui fut le premier préfet maritime (27 avril 1800), vint prendre le service, il eut à pourvoir à divers besoins, concernant la situation précaire des marins, de même que l'état matériel. Brest fut négligé par Napoléon, qui dirigeait son attention sur Anvers et sur Cherbourg. Une des deux écoles spéciales de la marine fut étable à Brest en 1811, l'autre étant placée à Toulon. C'est en 1830 que l'école d'Angoulême résultant de leur réunion en 1816, fut instituée à Brest, sous le nom d'école navale, sur l'Océan, puis sur le Borda.

Les crédits de la marine ayant été réduits par les événements de 1815, les travaux des arsenaux furent suspendus jusqu'en 1820, époque où le ministre Portal s'occupa de reconstruire la flotte. Le port de Brest prit part dans une large proportion à la guerre d'Espagne, puis à l'occupation de la Morée et à l'expédition d'Alger (L'histoire de l'Algérie).

Durant la longue période qui comprend presque le XIXe siècle , l'histoire de la ville se déroule plus calme, et sa prospérité croissante se subordonne à celle du port de guerre. Durant le règne de Louis-Philippe, le port fournit sa part pour les différentes expéditions, du Tage, d'Anvers, de Saint-Jean d'Ulloa, de la Plata, de Tahiti, de Tanger et de Mogador. 

Les crédits diminuèrent, pour la marine, de 1849 à 1855, les travaux furent ralentis. Cependant, le ministre Ducos fit avec une grande activité les premiers armements de la guerre de Crimée, pour laquelle le port de Brest fournit soixante-quatre bâtiments, dont dix-huit vaisseaux. Plus tard, les allocations croissantes dues à la transformation de la flotte doublèrent l'importance de ce port, sous les ministères Hamelin et de Chasseloup-Laubat. Il a participé aux campagnes d'Italie, de Chine et du Mexique, dans la proportion de soixante-treize bâtiments, dont douze vaisseaux. 

Durant la guerre de 1870, Brest a servi de refuge aux trésors de la capitale.
C'est après la visite de Napoléon III, en 1858, que la ville et le port prirent un nouveau développement. Les projets relatifs au port de commerce et à l'escale des transatlantiques (qui ne dura que de 1865 à 1878), avaient même fait concevoir, dès 1860, les espérances les plus grandioses. Si elles ne se réalisèrent pas en ce qui concerne les mouvements commerciaux maritimes, cela n'empêcha pas la ville de se transformer par la reconstruction des vieux quartiers (1866) et par l'adjonction de quartiers nouveaux (annexion de 172 hectares en 1861), ainsi que par l'édification de plusieurs monuments. 

En 1869 eut lieu la pose du câble télégraphique de Brest à New-York. Quant au port militaire, les expéditions de Tunisie, de Madagascar, du Tonkin (1881-1887) ont nécessité une augmentation dans les armements, mais ce sont surtout les transformations incessantes des bâtiments, cuirassés et torpilleurs, qui ont provoqué de nouveaux travaux et l'accroissement des dépenses.

Armoiries.
Les armes adoptées, en 1683, rappellent l'union de la Bretagne à la France. On les trouve ainsi désignées dans l'armorial de Guy le Borgne : parti le premier d'azur à trois fleurs de lys d'or, le deuxième d'argent sente de mouchetures d'hermine de sable. (C. Delavaud).

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Dictionnaire Villes et monuments
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