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Abbeville

Abbeville (Abbatis villa) est une ville de la France, dans le département
de la Somme, jadis capitale du comté de Ponthieu, en Picardie, sur la Somme qui s'y divise en deux bras, à 157 km au Nord-Ouest de Paris et à 44 kilomètres à l'Ouest-Nord-Ouest d'Amiens. Population : 24 600 habitants. Il existe à Abbeville une source d'eau acidulée, sulfatée, ferrugineuse faible. 

Pendant toute la durée du Moyen âge, Abbeville eut une grande importance commerciale et industrielle. C'était au XIIIe siècle l'une des villes drapantes affiliées à la Hanse de Londres. On estime qu'au moment de sa plus grande prospérité elle a compté jusqu'à 40 000 habitants. Son ancienne industrie lainière avait survécu aux misères de la guerre de Cent ans et aux désordres de la Ligue, quand, au XVIIe siècle, l'établissement, sous le patronage de Colbert, de la célèbre manufacture des draps fins, dite des rames, du hollandais Josse van Robais, la troubla profondément. La décadence date pour elle de la révocation de l'édit de Nantes. Aujourd'hui, elle fabrique encore des velours, des tapis, surtout des moquettes, et des toiles damassées. Son port maritime, à la tête du canal d'Abbeville à la mer, peut recevoir des navires de 200 à 300 tonneaux.

Histoire.
L'emplacement d'Abbeville est l'un des plus anciennement habités de la France. Aux portes mêmes de la ville, au faubourg de Thuison, on rencontra, en 1832, dans des alluvions pléistocènes, le premier silex taillé qui fut le point de départ des belles découvertes de Boucher de Perthes; depuis lors on a trouvé à diverses reprises, en faisant des fouilles dans la ville même, beaucoup d'instruments de l'époque chelléenne. De nombreuses antiquités romaines, découvertes aussi dans le sol de la ville actuelle, témoignent qu'il devait y avoir à cet endroit un établissement romain dans les premiers siècles de notre ère. Néanmoins Abbeville n'apparaît dans l'histoire qu'au IXe siècle. C'était alors une bourgade dépendant de l'abbaye de Saint-Riquier (abbatis villa). Hugues Capet en déposséda l'abbaye, en fit une forteresse pour défendre
l'embouchure de la Somme et en confia la garde à Hugues, comte de Montreuil, dont le fils prit le titre de comte de Ponthieu.
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Abbeville.
Abbeville au XIXe siècle, par C. F. Stanfield.

En 1130 les habitants acquirent de leur seigneur, le comte Guillaume Talvas, le droit de s'organiser en commune. Le 9 juin 1184, le successeur de Guillaume, Jean Ier, comte de Ponthieu, confirma cette acquisition et concéda à la ville sa charte communale. Philippe-Auguste ayant confisqué le Ponthieu en 1221, Abbeville demeura quelque temps sous la domination royale et reçut de ce roi la confirmation de ses privilèges. Dès 1225 elle fut restituée avec le reste du comté à la comtesse Marie.

Traité d'Abbeville -  On a donné ce nom à tort au traité entre Saint- Louis, roi de France, et Henri III, roi d'Angleterre, qui fut conclu à Parisle 4 décembre 1259. Ce traité rendait aux Anglais le Périgord, le Limousin et partie de la Saintonge, moyennant quoi le roi d'Angleterre renonçait à toute prétention sur la Normandie, l'Anjou, le Maine et le Poitou.
En 1279, le roi d'Angleterre Edouard Ier, gendre de la comtesse de Ponthieu, hérita du comté; Abbeville passa alors sous la domination anglaise et y resta jusque en 1345, date à laquelle les habitants se soulevèrent et forcèrent la garnison du château à capituler En 1361, elle redevint anglaise en vertu du traité de Brétigny, et ses privilèges furent confirmés par Edouard III. Au mois d'avril 1369, les bourgeois ouvrirent leurs portes aux troupes françaises et les aidèrent à chasser les Anglais. Après la mort de Charles VI, Abbeville reconnut Henri VI comme roi de France. Par le traité d'Arras (1435) elle fut engagée avec les autres villes de la Somme au duc de Bourgogne, puis rachetée en même temps qu'elles par Louis XI (19 octobre 1463); mais, deux ans après, le traité de Conflans fit retourner Abbeville et les autres places sous l'autorité de Charles le Téméraire (5 octobre 1465). 
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Rue d'Abbeville.
Une rue d'Abbeville.

En 1383, Abbeville fit partie de l'apanage de Diane de Valois, soeur naturelle de Henri III. Après les troubles de la Ligue, en faveur de laquelle la ville s'était déclarée, Henri IV, reconnu par le corps de ville le 16 avril 1594, proclama aussitôt l'entier oubli du passé, confirma les privilèges et maintint l'ancienne organisation municipale. L'édit d'avril 1594 devint pour les Abbevillois comme une nouvelle charte communale qu'ils ne cessèrent d'invoquer jusqu'à la Révolution. A la mort de Diane de Valois, en 1649, Abbeville fut cédée à un fils naturel de Charles IX, Charles de Valois, qui la garda jusqu'à sa mort, en 1650. En 1776 elle fut comprise dans l'apanage du comte d'Artois.

Capitale du comté de Ponthieu depuis le XIe siècle, Abbeville devint au XIVe siècle le siège d'une sénéchaussée; au XVIIe siècle elle fut comprise dans le gouvernement, de Picardie. Au point de vue financier, elle était l'une des six élections de la généralité d'Amiens. Elle possédait avant la Révolution une collégiale, seize paroisses, sept couvents d'hommes, huit de femmes et neuf hospices ou hôpitaux. Les murailles du Moyen âge, plusieurs fois reconstruites, avaient été remplacées par Vauban. Le château, élevé par Charles le Téméraire, avait été détruit par le duc d'Aumale en 1591. Les fortifications de Vauban ont subsisté jusque vers la fin du XIXe siècle. 

C'est à Abbeville que se concentrèrent en 1096 les troupes du duc de Normandie et des comtes de Flandre et de Ponthieu avant de partir pour la croisade. Les chefs de la seconde croisade s'y réunirent également. Le mariage de Louis XII avec Marie d'Angleterre y fut célébré (11 octobre 1514). Louis XIII y voua le royaume à la Vierge (15 août 1637). En 1766 le chevalier de la Barre y fut condamné par le présidial pour crime de sacrilège et exécuté. Lors de la guerre franco-allemande de 1870-1871, la préfecture de la Somme fut transférée à Abbeville après la prise d'Amiens (27 novembre 1870) et la ville fut mise en état de défense. Après l'armistice elle fut quelque temps occupée par un détachement prussien.

L'organisation municipale d'Abbeville, établie par la charte de commune de 1184, était en partie empruntée à Amiens. Elle subsista avec peu de modifications jusqu'à la Révolution. Un mayeur ou maire et vingt-quatre échevins renouvelés chaque année constituaient la Loi ou le corps de ville. Au XIVe siècle les chefs élus des corps de métiers, nommés mayeurs de bannières, au nombre de soixante-quatre, furent associés à l'administration de la ville. La justice civile et criminelle et la juridiction gracieuse furent exercées par l'échevinage jusqu'en 1789. Les jurés ou bourgeois formaient un corps de milice communale. Le pouvoir seigneurial y fut d'abord représenté par un vicomte ; plus tard le sénéchal de Ponthieu, le bailli et le capitaine de la ville y furent les représentants de l'autorité royale.

Les armoiries d'Abbeville étaient : de Ponthieu au chef de France. La ville a vu naître les géographes Briet, Duval, N. Sanson, le médecin Hecquet, le graveur Aliamet, le compositeur J. F. Lesueur (qui y a une statue), le poète Millevoye, etc.

Monuments.
Saint-Vulfran. Ancienne église collégiale fondée en 1121. L'édifice actuel, commencé en 1488, interrompu en 1539, n'a été achevé qu'au XVIIe siècle. C'est une église à une nef étroite avec bas côtés et six chapelles latérales. Au-dessous des fenêtres de la nef court un triforium avec balustrades à jour. La façade qui date du début de la construction, est un remarquable spécimen de l'architecture gothique la plus ornée. Les vantaux du grand portail, sculptés en 1550, représentent la vie de la Vierge
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Eglise saint-Vulfran, à Abbeville.
L'église Saint-Vulfran, à Abbeville.
© Photos : Serge Jodra, 2010.

Eglise Saint-Gilles. Edifice à trois nefs construit en 1485 et restauré au XIXe siècle; la flèche du clocher détruite en 1765 a été reconstruite. 

Eglise du Saint-Sépulcre (XVe siècle). Les voûtes ont été reconstruites en 1864.

Eglise Saint-Jacques, bâtie de 1869 à 1876 dans le style du XIVe siècle. 

L'Hôtel de Ville n'a conservé de ses constructions anciennes que le befroi, élevé en 1209, tour quadrangulaire dont la toiture bizarre date de 1807. 

Musées : musée d'histoire naturelle et d'archéologie (vestiges préhistoriques et de l'époque gallo-romaine); musée Boucher de Perthes, légué à la ville avec l'hôtel qu'il occupe par l'illustre archéologue (collections préhistoriques, herbier, bibliothèque, faïences, porcelaines, meubles, sculptures, tableaux); musée Duchesne de la Motte (collections d'histoire naturelle). 

Bibliothèque communale fondée en 1690; Archives communales très riches à l'hôtel de ville.

On remarque dans les rues d'Abbeville un grand nombre de maisons anciennes. Nous citerons la Maison de François Ier (rue de la Tannerie), où l'on dit que ce prince a séjourné en 1527. (A. Giry).

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Dictionnaire Villes et monuments
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