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Les Arabes appellent
l'époque antérieure à Mahomet
(Mohammed) le temps de l'ignorance (al djâhiliyya);
appellation injuste, car, si on ne trouve aucun texte écrit
en langue arabe remontant au delà
du VIe siècle de l'ère chrétienne,
une littérature orale très ancienne était florissante
chez les Bédouins. Ceux-ci possédaient d'ailleurs aussi des
connaissances généalogiques assez étendues et les
quelques notions historiques qui s'y rattachaient; ils savaient observer
le cours des astres, mais surtout ils ont produit une poésie raffinée
et délicate qui ne peut se concilier avec la grossièreté
qu'on est tenté de leur prêter. D'autre part, il ne faut pas
oublier, en voulant trop généraliser, qu'il y avait aussi
des villes et une population sédentaire en Arabie et que les Arabes
des villes étaient arrivés à un degré assez
avancé de culture. Laissant de côté la science des
généalogies, l'astronomie, l'astrologie et l'onéirocritie
des anciens Arabes, nous ne voulons retenir qu'une chose, leur poésie,
première étape d'une littérature appelée à
devenir foisonnante.
La poésie
arabe.
Ce n'est guère qu'un peu avant
l'apparition de Mahomet que l'on trouve quelques poètes, sorte d'avant-coureurs
du prophète.
Pendant cette enfance de la littérature,
le peuple eut des tournois poétiques : tous les ans, les poètes,
réunis à la foire d'Okâzh, récitaient leurs
oeuvres; celles qui avaient obtenu les suffrages de l'assemblée
étaient suspendues au temple de la Mecque.
Un tel honneur avait quelque chose de sacré; car les poésies,
recevant asile dans la maison sainte, la Kaaba,
devenaient pour ainsi dire les objets d'un culte religieux.
II reste sept de ces anciens poèmes
appelés Moallakât .
Parmi ceux qui les ont composés, on distingue Imr-oul-Kays, supérieur
à tous dans la description des coursiers et des attraits de la femme;
Tharafa, par la beauté de ses comparaisons; et Antara ou Antar ,
remarquable par sa fougue. Les quatre autres, Zohaïr, Lébid,
Amrou-ben-Kolthoum, Harith-ben-Hilliza, ont été surpassés,
dans l'opinion des Arabes, par Nabigha, dont les vers pleins et sonores,
coulant de source, savent le mieux inspirer l'émotion et la crainte;
Càb, fils de Zohaïr, remarquable par la facilité et
la clarté du style; Alkama, par la
noblesse et la grandeur de sa poésie; El-Acha, par la variété
des sujets (il a touché à tous les genres).
A cette époque, on voit un petit
groupe de poètes-coureurs, aussi renommés pour leur
poésie mâle et farouche que pour leur agilité à
la course. De ce nombre sont Chanfara et Tabata-Charran. La poésie
antérieure à Mahomet a de grandes
qualités de style; elle est simple, nerveuse, et quelquefois sublime;
mais l'inspiration ne sort pas du cadre du désert, de la vie patriarcale
et guerrière : le cheval, le chameau, la lance, le sabre, sont les
objets des descriptions des poètes; l'hospitalité, la valeur,
le dévouement, la vengeance, l'amour, la
gloire, sont les sentiments qu'ils savent rendre.
Beaucoup d'autres poèmes de cette époque, mais d'une moindre
étendue, ont été recueillis dans les quatre ouvrages
suivants : El-Mofaddaliât ,
El-Hamaça ,
le Diwân des Hodheilites et le Kitâb el-aghâni .
Dans presque toutes ces pièces de vers, les querelles des tribus,
la valeur dans des expéditions de brigandage, l'amour-propre et
les jalousies des factions rivales forment les sujets principaux.
Lorsque Mahomet
arrive, la poésie semble s'éteindre.
II est vrai que, dans les combats livrés par le prophète
aux tribus pour les enrôler sous son étendard religieux, une
foule de poètes et de rapsodes périrent, et la tradition
poétique s'altéra : les poésies étant confiées
à la mémoire, un grand nombre disparurent avec ceux qui les
avaient conservées. Bien plus, Mahomet était l'ennemi des
poètes; et, pour justifier cette antipathie auprès d'un peuple
tout imprégné de poésie et qui pouvait regarder comme
une infériorité de n'être pas poète, il plaçait
dans la bouche de Dieu
ce verset du Coran
:
" Nous n'avons
pas appris à notre prophète l'art de faire les vers; il ne
lui est pas nécessaire."
Cependant il savait apprécier la belle
poésie, et lorsque Càb, fils de Zohaïr, nouvellement
converti à l'islamisme, lui récita le poème où
l'on remarque ce vers :
" Le prophète
est un flambeau qui éclaire le monde;
c'est un glaive
que Dieu a tiré pour frapper l'impiété. "
Il détacha son manteau et le lui donna;
depuis lors cette pièce de vers prit le nom de Poème au
manteau. Sans aimer les poètes, Mahomet sut mettre à
profit leurs travaux, et son oeuvre, le Coran, calqué, quant
au style, sur celui des poètes païens, fut une véritable
synthèse de la langue, qui n'avait
eu jusqu'alors aucun monument en prose. Mais à cette époque
de reconstitution nationale, religieuse, linguistique même, le génie
poétique s'assoupit. Les califes'
Abou-Bekr,
Omar et Othmân furent
des hommes politiques, des fondateurs, et la poésie se tut. Ali
commença le réveil poétique de la nation : il nous
a laissé quelques fragments d'une touche forte et d'une pensée
élevée; ses vers ont été publiés et
traduits par Ger-Kuypers, et ses Sentences par Cornélius
van Waenen.
Sous la dynastie des Omeyyades, la poésie
conserve encore son cachet primitif. Les hommes du désert oubliaient
avec peine leur indépendance, et semblaient fuir le contact des
moeurs nouvelles introduites par l'islam .
On vit paraître alors plusieurs poètes d'un véritable
talent : Djarir, Farazdak, El-Akhtal, Hodba. La question du mérite
respectif des trois premiers poètes occupa vivement les esprits
sous le règne d'Abd-el-Mélik, et ce qui montre combien le
goût pour la poésie était commun chez les Arabes, c'est
que cette question était discutée non seulement parmi des
gens de lettres, dans le calme du séjour des villes, mais encore
parmi des soldats au milieu des fatigues et des dangers de la guerre. Les
poètes jouissaient d'une grande faveur auprès des califes'
Yézid,
Abd-el-Mélik, Héchâm; ils étaient admis dans
leur société intime et prenaient part à leurs libéralités.
Yézid fut le premier qui pensionna les poètes; ses successeurs
trouvèrent cet usage établi et le conservèrent. Dans
les idées de la nation, la honte ne consistait pas pour les poètes
à vivre des libéralités des grands, mais pour les
grands c'en était une de ne pas payer la louange.
Sous la dynastie des Abbassides,
la poésie se transforme. La société arabe bouleversée
perd son cachet original, les traditions littéraires du paganisme
semblent s'arrêter. La cour de Bagdad,
devenue le centre de la civilisation arabe, fait sentir son influence sur
la langue poétique, qui s'agrandit, s'adoucit, se perfectionne;
mais alors elle commence à prendre un air affecté, et les
vers maniérés apparaissent. Les principaux poètes
de cette époque furent Abd-allah, fils d'El-Motazz, Abou-Temâm,
El-Bohtori, El-Motenabbi, Omar Ibn-Faredh, Abou-Nowâs.
Lorsque le califat
de Bagdad perdit son prestige, les gouverneurs de provinces se rendirent
indépendants. Au XIIIe siècle
les Mongols envahissent les États
arabes; Houlagou-Khân
met fin à la dynastie des Abbassides en 1258. Les chants cessent;
les poètes sont dispersés. Seulement, en Égypte ,
sous le règne de Saladin en 1174, il y
eut un mouvement de renaissance, et l'on compte encore à cette époque
un grand nombre de poètes, sur lesquels on peut consulter la Kharida.
Puis, lorsque les Turcs bouleversent les
États arabes et s'emparent de l'Égypte en 1517, la poésie
n'est plus alors représentée que par des poètes du
dernier ordre. Les temps modernes arrivent; c'est l'époque de l'atonie
: alors les chants joyeux et les plaintes des Arabes d'Espagne
se font entendre pour la dernière fois. Dans cette contrée,
si chère aux conquérants, il y avait eu, dès le VIIIe
siècle, un mouvement littéraire très important : des
poètes de valeur, tels qu'Ibn-Zeidoun, Ibn-Hâni, avaient fait
briller sous un autre ciel l'ancien éclat de la poésie arabe.
Les
genres poétiques.
Deux genres se mêlent constamment
dans la poésie arabe : le genre lyrique
et le genre descriptif; le premier est
rarement employé seul. Quant au genre épique,
les Arabes ne pouvaient guère l'adopter : ils vivaient en tribus,
en familles; et lorsque Mahomet fit de ces tribus
une nation, l'idée religieuse prévalut, le joug du dogme
comprima l'élan poétique. La poésie ne pouvait pas
non plus être dramatique : le prophète
ayant défendu de représenter l'image de l'humain, soit avec
le pinceau, soit avec le ciseau, et la vie domestique étant cloîtrée,
l'étude de l'humain n'était pas possible; et puis la femme,
mise en dehors de la vie sociale, n'inspirait aucune de ces passions qui
font les héroïsmes, les dévouements, les catastrophes
de la littérature romanesque. Les
genres principaux de la poésie arabe se réduisent à
quatre :
El-fakhr, louange de sa
tribu et de soi-même; El-medih, louange des autres; El-Hidja,
la satire; En-naçib, le genre
érotique.
Dans la poésie des Arabes on remarque
l'abus de la langue au détriment de l'idée. Privé
de la ressource des fictions, le poète est forcé d'outrer
les figures, de prodiguer les traits subtils et raffinés. Toutefois,
en mettant à part ce luxe d'expressions exagérées,
de mots recherchés, on ne peut méconnaître que les
poètes arabes peignent avec bonheur les glorieux exploits, la grandeur
d'âme, la générosité. Dans l'élégie
ils se montrent vrais et touchants, graves et pathétiques quand
ils traitent des sujets de morale et de religion,
et on les voit rivaliser avec la Bible
pour l'expression et le sentiment.
Contes
et romans.
L'imagination des auteurs arabes, dégagée
de l'afféterie, du pédantisme, s'est montrée vive
et originale dans ces contes merveilleux connus
sous le nom de Mille et une Nuits .
Les hommes presque seuls y jouent un rôle; mais, dans les fables
de Lokmân et dans Calila et Dimna ,
les règnes animal et végétal sont mis en scène.
Ces ouvrages sont écrits en prose; les Mille et une Nuits
contiennent un assez grand nombre de pièces de vers. Un genre dans
lequel les Arabes ont excellé est la prose rimée. Les romans
d'Antar ,
d'Abou-Zeyd ,
de Delhemeh ,
de Dou Yazan ,
d'Ez-Zahir ,
sont en prose poétique ou rimée et en vers. Cette manière
d'écrire fut usitée dés les premiers siècles
de l'hégire .
La prose rimée fut portée peu à peu à un haut
degré de perfection. On y introduisit un parallélisme assez
semblable à celui des poésies hébraïques; mais
les Arabes allèrent sous ce rapport beaucoup plus loin que les Hébreux;
ils ne se contentèrent pas de mettre, dans les membres parallèles
de leur prose poétique, des mots synonymes; ils y firent abonder
les rimes, l'allitération, l'assonance;
ce qui donne à cette prose une symétrie parfaite. Malheureusement
on voit souvent dans ces compositions le fond sacrifié à
la forme. AI-Hariri (1054-1121) a employé
ces formes avec bonheur, et il a su les ennoblir par sa vive imagination
et par son esprit original : ses Makamât sont regardées
comme un chef-d'oeuvre d'éloquence. II avait pris pour modèle
Ahmed Hamadani ( vers 1000); mais il l'a surpassé. Hariri arrive
presque au déclin de la civilisation arabe en Orient. Il a donné
naissance à une sorte d'école littéraire : une foule
d'auteurs plus ou moins obscurs ont suivi son genre. Parmi les ouvrages
remarquables de la littérature des Arabes d'Espagne ,
on doit citer le Kalâyd-el-Ikiân.
Histoire et géographie.
Les historiens et les géographes
arabes sont, pour l'essentiel, des compilateurs, se bornant à enregistrer
des faits, parmi lesquels ils placent quelquefois les contes les plus fantasques.
Cependant Tabari, Masoudi, Djouzi, Nowairi,
Makrizi, Ibn-Khaldoun, Soyouti, AI-Makkari,
Ibn-el-Athir nous ont laissé des oeuvres sérieuses. Le bibliographe
Hadji-Khalfa
énumère 1300 ouvrages d'histoire.
Citons : l'Histoire des Sarrasins par al-Makin (1273); Les Annales
de Tabari; l'Encyclopédie historique de Masoudi; La Chronique
d'Alep de Kemal-Eddin; la
Vie de Saladin, écrite par
son ministre Boha-Eddin Ibn-Cheddâd (1234); L'Histoire des dynasties
d'Aboul-Faradj (1286), qui n'est qu'un abrégé
de la Chronique syriaque (1289) du même auteur; les Annales
d'histoire universelle du célèbre Abulféda
(Aboulféda dit lui-même dans sa préface que ses Annales
ne sont qu'un abrégé du grand ouvrage d'Ibn-al-Athir (1232),
qui se compose de 23 volumes); la Vie de Timour ou Tamerlan
par Ibn-Arabchah (1450), écrite en prose poétique et rimée;
les Prolégomènes d'Ibn-Khaldoun (1332); l'Histoire
de la Sicile sous le gouvernement des Arabes, par Nowairi.
Les géographes
arabes ont suivi, en général, la méthode de Ptolémée.
L'équateur, disent-ils, divise la Terre
en deux hémisphères; tout l'hémisphère méridional
est couvert d'eau, ainsi que la moitié du septentrional. Le reste,
qui est découvert, est appelé par eux roba meskoun
( = le quart habité); ce quart se divise en sept parties, qu'ils
appellent akâlim ( = climats); chaque climat est renfermé
entre deux lignes qui s'étendent de l'orient à l'occident.
La longueur et la largeur des climats va toujours diminuant. Le premier,
qui commence un peu au-dessous de l'équateur, est le plus vaste.
La plupart des géographes se contentent de cette division, et, dans
chaque climat, ils énumèrent pêle-mêle, et quelquefois
par ordre alphabétique, les pays, les villes et les îles qu'il
renferme, sans les partager en royaumes ou en provinces.
Dans la fixation des limites, ils trahissent
souvent la plus grande ignorance relativement à la position des
différents pays. Malgré ces défauts, ils nous fournissent
des détails précieux sur l'intérieur de l'Afrique
( La découverte de l'Afrique ).
L'ouvrage qui paraît être le plus complet est le Dictionnaire
géographique de Yâkout al-Hamavi (1229). Aboulféda
(1273), pour sa Géographie, a beaucoup emprunté à
Yakout, à Ibn-Haukal (920) et à
Edrisi
(1150). S'il est vrai que son ouvrage ne soit qu'une maigre compilation,
pourtant cet écrivain a fait progresser la géographie, en
introduisant un ordre plus systématique, et en fixant le premier
les longitudes et les latitudes des lieux dont il parle.
Le droit et la
législation.
Les Arabes ont poussé très
loin la science du Droit. ( Le
Droit musulman). Parmi les ouvrages importants de jurisprudence (Ibn
el-fikh), il faut citer l'Hedâya ou Guide; le Précis
de jurisprudence de Sidi Khalil, selon le rite malékite. Ce
précis longtemps suivi en Algérie ,
était déjà tombé en désuétude
au milieu du XIXe siècle. L'ouvrage
de jurisprudence le plus estimé à cette époque dans
le nord de l'Afrique était celui du cheik Omar, natif de Fès,
écrivain du XVIIe siècle.
La langue et la
grammaire.
Le nombre des grammairiens,
des lexicographes, des commentateurs du Coran ,
est prodigieux. Le plus ancien grammairien est Aboul-Aswad-el-Douli, qui
écrivit à la fin du Ier siècle
de l'hégire .
Golius a composé son Dictionnaire d'après celui d'Ahmed-ben-Farez,
surnommé El-Bazy, lexicographe du Xe
siècle. Al-Djauhari, mort en 1009, composa un dictionnaire
de la langue arabe sous le titre d'Al-Schah
( = la Pureté); on en possède un autre de Firouzabady (mort
en 1414) sous celui d'Al-Kamous ( = l'Océan), publié
à Calcutta en 1817.
Les mathématiques.
Les Arabes traduisirent de bonne heure
les ouvrages célèbres des Grecs
sur les mathématiques .
Les oeuvres d'Euclide, d'Archimède,
d'Apollonius, de Ptolémée,
servirent de base à leurs études. Euclide fut traduit plusieurs
fois, et expliqué dans un grand nombre de commentaires : la plus
célèbre des versions d'Euclide est celle de Naçir
Ed-din de Kous, imprimée à Rome
à la fin du XVIe siècle.
Mais les Arabes ne se contentèrent pas de traduire et de commenter
les auteurs grecs, et de puiser à la science indienne; ils y ajoutèrent
beaucoup d'éclaircissements tirés de leurs propres recherches;
ils simplifièrent les méthodes,
et préparèrent la voie aux découvertes importantes
des mathématiciens modernes. Si l'on réfléchit où
en serait l'arithmétique sans l'usage
des chiffres et sans le système décimal que les Arabes avaient
reçu de l'Inde ,
et dont ils ont doté l'Occident; combien les opérations trigonométriques
ont été simplifiées par l'introduction des sinus
au lieu des cordes; combien enfin la géométrie
a gagné par l'application de l'algèbre,
on conviendra que nous devons la plus grande reconnaissance aux Arabes,
et que sans leur secours on n'aurait pas vu surgir aux XVIe
et XVIIe siècles toutes ces découvertes,
qui ont changé la face de la science. On cite parmi les mathématiciens
arabes : Thabit ben Korra (900); Mohammed ben
Mouça, le premier qui ait écrit sur l'algèbre; Omar
al-Khayyami, du XIe siècle, auteur
d'un traité sur l'algèbre, et qui prouve que les Arabes s'étaient
occupés des équations du troisième
degré; Al-Karkhi, du XIe siècle,
auteur d'un ouvrage, qui contient la seule théorie du calcul algébrique
chez les Arabes, une traduction d'un livre entier de Diophante,
et, ce qui est plus remarquable, 60 problèmes d'algèbre indéterminée.
Médecine,
physique.
La médecine et les sciences physiques
furent pour les Arabes de la première nécessité; c'est
ce qui explique leur étude des livres grecs. Djourdjis, médecin
du calife' Al-Mançour,
et Yahia ben Mesoué (857), tous deux chrétiens,
furent chargés de la traduction d'ouvrages grecs. Le disciple de
ce dernier, Honain ben Ishak (873), suivit les traces de son maître.
Kosta ben Loukâ, sous Moktadir-Billah, était le plus savant
et le plus habile des traducteurs. Les musulmans, grâce à
leurs travaux, purent bientôt lire les oeuvres d'Hippocrate,
de Galien et d'Aristote.
Ces traducteurs étaient eux-mêmes des médecins très
distingués, qui composèrent divers traités estimés.
Les Arabes cultivèrent la médecine avec le plus grand zèle
et y firent de grands progrès. Un préjugé religieux
les empêcha de se livrer à l'anatomie ;
mais leurs efforts furent couronnés de succès dans la botanique ,
la pharmacologie et la chimie .
On peut même en quelque sorte les regarder comme les inventeurs de
cette dernière science. Les spéculation alchimiques,
si répandues parmi les Arabes, découlaient sans doute d'une
théorie inadéquate sur la formation des métaux; mais
il faut remarquer aussi que plusieurs de leurs grands auteurs, et entre
autres Avicenne, se sont vivement prononcés
contre cette science et en ont démontré la nullité.
La physique, traitée métaphysiquement
et comme une science a priori, ne pouvait point être portée
par les Arabes à un haut degré de perfection. Dans l'histoire
naturelle, ils ont souvent mêlé des descriptions fabuleuses
à des observations pleines de justesse et dignes des naturalistes
modernes.
Parmi les auteurs qui ont écrit
sur la médecine, l'histoire naturelle et les sciences qui s'y rattachent,
il faut signaler les suivants : Iakhtichon, fils de Djabraïl (869),
médecin du calife El-Motewakkel; Abou-bekr Er-râzi (Rhazès)
(932), surnommé le Galien arabe, et le premier, dit-on, qui
écrivit sur la petite vérole; Ishâk ben Soleiman, israélite
de Kairouan (941), célèbre par son ouvrage sur la fièvre;
Abou Djàfar Ahmed, son élève, auteur du Zâd
eI-Mocâfir, traité de thérapeutique estimé;
Abou-ali-Hoçaïn Ibn Sina, dit Avicenne
(1036), dont le Canon, publié à Rome
(1593), fut longtemps regardé, même en Europe ,
comme la base de toute science médicale; Aboul-Kaçi al-Zahravi
(1106), auteur d'une Méthode universelle, dans laquelle on
distingue surtout d'excellents traités de chirurgie; Abou Merwân
Ibn Zohar, israélite (1198); Aboul-Walid Ibn Rochd, dit Averroès
(1198), et son disciple, le rabbin Mouça
ben Maïmeoun (1208); Abd-allah ben Beiter (1248), célèbre
surtout dans la botanique, pour laquelle il fit de grands voyages; Abou
Yahia Zakaryya al-Kaswini (1283?), le Pline des
Orientaux, célèbre par son grand ouvrage sur les Merveilles
de la nature; et Kemal-eddin Mobammed ben Mouça Damiri (1405),
auteur d'une Histoire des animaux.
Pour se rendre compte du mouvement intellectuel
qui se manifesta chez les Arabes et, plus largement dans le monde arabo-musulman,
il suffit de se rappeler les noms des grands centres de civilisation que
furent : Bagdad, Bassorah,
Samarcande,
Boukhara,
Koufa,
Damas, Le Caire,
Kairouan,
Fès,
Grenade,
Cordoue,
etc. |
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