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Le saut

Le saut est un exercice naturel à l'humain, mais qui exige de la souplesse. Le principe dont il est nécessaire de se bien pénétrer, .avant de sauter, c'est qu'il faut « se recevoir » sur la pointe des pieds, les jambes fléchies et la tête droite; une chute sur les talons pourrait être très grave. Les différentes catégories de saut, en hauteur, en largeur, à la perche font partie des exercices athlétiques, réglementés et il existe pour chacun des championnats annuels. Dans les concours officiels de saut en largeur, la distance franchie est calculée du point de départ, à la plus proche empreinte marquée par le corps, c'est-à-dire que si, en retombant, on met les mains derrière soi, comme il arrive souvent pour rétablir son équilibre, la distance sera comptée à partir de l'endroit où cette main touche le sol. Pour le saut en hauteur, on ne se sert plus du tremplin, ce qui eut semblé, il y a un siècle seulement, une grave hérésie... Enfin on s'exerce également à sauter en arrière; on ne franchit alors que de petites distances. Notons que les Anciens, pour augmenter l'impulsion donnée au corps par les bras, sautaient avec des poids ou haltères dans les mains.

Le saut dans l'Antiquité.
En Grèce.
Chez les Grecs, le saut a été, de tout temps, en grand honneur. Il figure parmi les exercices que mentionnent les poèmes homériques et, dans les jeux gymniques, il était l'objet, à cette époque reculée, d'un prix spécial. Par la suite, il participa, avec la course à pied, le jet du disque, celui du javelot et la lutte, à constituer le pentathlon ou concours quintuple, série de cinq exercices que les Grecs considéraient comme partiulièrement propre à mettre l'athlète en valeur. C'était même par lui que les épreuves commençaient, et il s'effectuait, non plus les mains libres, combe au temps d'Homère, mais avec des haltères. Ces engins, qui nous apparaissent comme une surcharge plutôt nuisible, étaient, au contraire, pour le sauteur antique, grâce à un entraînement spécial, d'un grand secours. Il les lançait en avant en même temps que les bras et, sous l'impulsion de leur poids, franchissait des longueurs prodigieuses. On cite, notamment, Phayllos, l'un des athlètes les plus célèbres de la Grèce, qui, aux jeux Pythiques, sauta 50 pieds, c.-à-d. près de 16 m. Le saut en longueur n'était pas. du reste, le seul pratiqué. Le saut en hauteur comptait également au nombre des exercices courants, au moins dans les gymnases, et la figure 1, qui reproduit une peinture d'un vase grec, nous montre des éphèbes qui s'y entraînent. La position dû sauteur offre, on le remarquera, une analogie frappante avec celles données, de nos jours, par les photographies instantanées : les jambes, an moment du passage de l'obstacle, sont presque horizontales.
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Saut.
Fig. 1. - Ephèbes s'exerçant à sauter avec des haltères.
(d'après un vase grec).

A Rome.
A Rome où, comme on le sait, les jeux athlétiques n'ont jamais été très en faveur, l'exercice du saut revêtait nécessairement un caractère un peu différent. On le considérait, à la vérité, comme un excellent mode l'assouplissement et tous les jeunes gens le pratiquaient; mais apparaissait surtout comme d'une utilité très grande à la guerre et les légionnaires étaient entraînés, au Champ de Mars, à franchir, avec armes et bagages, des fossés très larges et des banquettes de terre très élevées.

Le saut chez les modernes.
Avec les siècles, le saut n'a pas perdu de son importance. On cite des exemples de sauts particulièrement remarquables. Ainsi le colonel Amoros créateur de la gymnastique française, dit avoir connu un Anglais capable de franchir une rivière de 10 mètres de large. Un nommé Irland, vivant au XVIIIe  siècle, sautait dix chevaux rangés côte à côte. Un auteur digne de foi conte que le sauteur Grimaldi donnait une représentation à la foire de Saint-Germain en 1742, quand il fit le pari de bondir jusqu'au lustre qui éclairait la scène de fort haut. Il s'élança d'un bond si furieux, que son pied, bousculant la suspension, envoya un des cristaux dans le visage de l'ambassadeur de la Sublime-Porte Mehemet Effendi. Quand Grimaldi s'approcha du haut personnage pour recevoir des félicitations bien méritées, un esclave de l'ambassadeur s'empara du pauvre histrion et lui administra une vigoureuse râclée de bois vert; on dit que le sauteur se consola difficilement d'avoir été pour un soir la tête de turc de ses spectateurs.

Le saut continue à figurer dans les programmes de la gymnastique scolaire, ainsi que parmi les épreuves des compétitions d'athlétisme. De nos jours, les épreuves d'athlétisme comportent quatre types de saut : le saut en hauteur avec élan, le saut en longueur avec élan, le triple saut en longueur avec élan et le saut à la perche. Mais l'athlétisme moderne a connu d'autres types d'épreuves au XIXe siècle et même pendant les premières décennies du XXe siècle : le saut s'est exécuté en hauteur, en longueur, en profondeur, avec ou sans élan, avec ou sans tremplin, avec ou sans le secours des mains. Les paragraphes qui suivent visent à donner une idée de ces différentes variantes "modernes", à défaut d'être toutes "contemporaines".

Lorsqu'on fait usage des mains, en prenant appui, soit sur l'obstacle à franchir, barre ou chevalet (discipline que l'on range aujourd'hui dans la gymnastique), soit sur une perche, le saut prend plus specialement le nom de voltige. Tous les sauts comportent, en général, quatre périodes principales : la période de préparation, durant laquelle on donne au corps l'attitude convenable en fléchissant les segments des membres inférieurs et en abaissant les bras; la période d'impulsion, qui, commencée par la détente des membres inférieurs et l'élévation vive des bras, se termine au moment où le corps quitte la terre; la période de suspension, au cours de laquelle le sauteur peut bien, en modifiant progressivement son attitude, déplacer son centre de gravité, mais sans arriver pour cela à lui faire parcourir une trajectoire autre aue celle invariablement déterminée par la direction initiale et par la vitesse d'impulsion due au coup de jarret; enfin la période de chute, qui se compose des actes musculaires les plus favorables à l'amortissement du choc.

Le saut de pied ferme.
Le saut de pied ferme en hauteur se prépare en se plaçant debout le plus près possible de l'obstacle, les talons joints, les bras élevés, puis en fléchissant les membres inférieurs et abaissant les bras, qu'on fait lentement osciller; on donne ensuite l'impulsion en changeant brusquement le sens de cette oscillation et en communiquant aux bras la plus grande vitesse d'élévation possible, en même temps que l'on imprime aux membres inférieurs une vigoureuse extension; enfin on passe l'obstacle, en ramassant le plus qu'on peut ces derniers, les bras d'abord maintenus horizontaux, puis abaissés, et on retombe sur la pointe des deux pieds, simultanément, en veillant à les conserver joints et en relevant vivement les bras pour maintenir l'équilibre. 

Pour le saut de pied ferme en longueur, la préparation est la même, mais la détente des membres inférieurs doit être plus énergique, leur extension complète et en coïncidence absolue avec une vive projection des bras en avant, l'impulsion commençant à l'instant où le corps dessine une chute en avant pour finir lorsque la ligne qui - joint le centre des pieds à la hanche fait avec l'horizontale un angle de 45°. Il est inutile d'ailleurs de se ramasser d'une façon exagérée : les jambes peuvent rester presque allongées, les cuisses ayant seules besoin d'être légèrement fléchies, et le pied se borne à raser le sol, touchant terre ensuite par le talon. 

Pour le saut en profondeur, qui ne s'effectue, en principe, que de pied ferme, on se place au bord de l'obstacle, face en avant ou en arrière; on s'accroupit le plus possible, les mains à l'appui, de façon à diminuer la hauteur de la chute; puis on abandonne l'obstacle, en lançant un peu le corps en avant, afin d'éviter une chute à pic, mais sans faire de saut en hauteur, pendant la suspension, on étend les membres inférieurs, qu'on laisse fléchir à nouveau au contact du sol; on assure l'équilibre final en balançant convenablement les bras.
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Saut en hauteur.
Fig. 2. - Saut en hauteur avec élan.

Le saut avec élan.
Le saut avec élan est celui dans lequel l'appel du pied est précédé d'une course préalable. La vitesse ainsi acquise augmente sensiblement la hauteur et la longueur du saut, cette dernière surtout. Pour sauter en hauteur avec élan (fig. 2), on ne fait que quelques pas de course, et on donne l'appel d'un seul pied, le tronc vertical ou légèrement incliné en arrière; pendant la suspension, on réunit les deux jambes, qu'on étend, au passage de l'obstacle, le plus horizontalement possible, le tronc fléchi sur les cuisses, et on tombe sur la pointe des pieds. Pour sauter en longueur avec élan (fig. 3), on débute par une course de 10 à 20 m, aussi vive et accélérée que possible, on fait, comme pour le saut en hauteur, l'appel d'un seul pied, le tronc incliné légèrement en avant, mais on ne se ramasse pas et on vient toucher terre par le talon.
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Saut en longueur.
Fig. 3. - Saut en longueur avec élan.

Les sauts en longueur et en hauteur s'exécutent suivant d'autres principes encore, qu'il serait trop long de décrire. Nous mentionnerons seulement, pour les seconds, trois variantes, qui viennent de Grande-Bretagne et qui ont donné de très bons résultats : le saut écossais (scotch style) ou saut d'enjambée de coté (sidestride jump), dans lequel le sauteur, s'élançant latéralement, écarte les jambes en arrivant à la hauteur de la corde ou de la barre et passe dessus, en quelque sorte, à califourchon; le projeté droit (straight-shoot), dans lequel le passage s'effectue presque assis, en pliant brusquement et subitement le corps en deux; le roulé par-dessus (roll-over), ou le passage a lieu horizontalement et est accompagné d'un demi-tour complet qui fait retomber le sauteur presque à plat sur le dos. A signaler encore le mode de sauter très original imaginé par l'Américain Schoenfield, lequel on s'élève à pieds joints, jusqu'à moitié du corps au-dessus de l'obstacle, puis, par un coup de reins, on jette le haut du corps en avant et en bas de l'autre côté, les pieds en l'air, et on arrive, le bras gauche allongé, sur le sol, où on roule sur l'épaule droite et sur le flanc.
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Saut à la perche.
Fig. 4. - Saut à la perche.

Le saut à la perche.
La voltige à la perche (fig. 4) accroît considérablement la hauteur et la longueur du saut. La perche est tenue horizontalement avec les deux mains; le sauteur, après avoir fait deux ou trois pas de course, appuie à terre le bout inférieur, en la tenant droit devant lui; en même temps il donne un appel du pied qui est en avant, soulève le corps en s'aidant des mains sans es laisser glisser, lance les jambes à gauche on à droite, suivant le sens du saut, puis franchissant, les jambes dans la position horizontale, l'espace voulu, retombe face à la perche, en fléchissant les membres inférieurs, et, finalement, se redresse en relevant le bout inférieur de l'engin. Il n'y a, au surplus, que peu de différence entre le saut en hauteur et le saut en longueur à la perche : dans le premier, l'impulsion doit permettre de porter les pieds à la hauteur de la tête; dans le second, l'élan et l'appel doivent être particulièrement énergiques.
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Fig. 5. - I. Baxter, champion du monde de saut
en hauteur en 1900 franchit 1,90 m.

Les autres types de sauts.
Les sauts avec appui des mains ont lieu par-dessus une barre, une poutre (cheval d'arçon), une barrière, etc., avec ou sans élan. Il y a plusieurs façons de les exécuter. L'une des plus usitées consiste à poser les deux mains sur l'obstacle, les bras tendus, en même temps qu'il est donné un appel, les deux pieds joints, le ventre contre l'obstacle, puis à lancer pardessus celui-ci les jambes réunies, à lâcher la main du coté où passe le corps et, l'obstacle franchi, à retomber suivant les règles ordinaires du saut. L'obstacle peut être aussi passé de face, les mains réunies et les jambes écartées, comme dans le saut de mouton, si cher aux enfants.

Mentionnons encore le saut avec tremplin, dans lequel, l'impulsion est considérablement accrue et aussi, par suite, la longueur et la hauteur de l'espace franchi, le-saut pardessus un chevalet, les courses, de barrière ou de haies.. qui ne sont qu'une série de sauts successifs en hauteur avec élan, enfin le saut périlleux.

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