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Les Romains
n'ont pris qu'une part insignifiante aux progrès de l'astronomie.
Agrippa,
qui observait en Bithynie sous Domitien
n'était probablement Romain que de nom, comme les astronomes grecs
Geminus et Proclus
(Proculus). Quelques observations ont été faites en Italie,
mais sans doute dans la Grande Grèce
et certainement par des Grecs, par Eudoxe de Cnide,
par Métrodore de Chio (IVe
siècle av. J.-C.) et par Conon de
Samos (IIIe
siècle av. J.-C.). D'autres observations ont été
faites à Rome même, mais par le
Grec Ménélas (Ier
siècle ap. J.-C.).
Les Romains ont fait quelques emprunts
aux Grecs, dont ils n'ont jamais approfondi
les théories astronomiques. Ils apprirent des Grecs la construction
des cadrans solaires. Ils apportèrent
de Syracuse, à titre de butin, les
sphères du Grec Archimède, et
ils en firent faire une imitation par le Grec Posidonius.
Certains Romains empruntèrent à la Grèce et transportèrent
dans leur calendrier des indications de levers héliaques d'étoiles,
mais sans tenir suffisamment compte des différences de latitude.
Cependant Jules César,
aidé par le Grec Sosigène d'Alexandrie,
essaya de marquer dans l'année tropique, pour la latitude de Rome,
les dates des levers et des couchers héliaques
des principales étoiles, et Pline qui a
suivi ces indications du calendrier de Jules César pour le Latium,
a rapporté au climat de chaque auteur les indications du même
genre contenues dans les parapegmes grecs ; mais il n'a tenu aucun compte
des changements produits par la différence des époques. Quant
à la précession des équinoxes, cause de ces changements,
Pline, malgré son admiration pour Hipparque,
l'a ignorée, et il ne paraît pas que, depuis l'époque
d'Hipparque, auteur de cette découverte, jusqu'à la chute
de l'Empire d'Occident, aucun Romain
en ait pris connaissance.
Quelle qu'ait été l'admiration
des Romains pour la science universelle de Varron
et pour ses ouvrages astronomiques en particulier, ce ne fut pas lui, mais
le Grec Sosigène, que Jules César appela à son aide
pour réformer le calendrier romain,
et une nouvelle réforme fut nécessaire sous Auguste,
parce que les Romain; n'avaient pas su comprendre et appliquer l'intercalation
quadriennale d'un jour.
La réforme
du calendrier
Chez
les Romains, l'année primitive, divisée en mois, aspirait
à être purement solaire, mais n'y réussit à
peu près qu'à l'avènement de l'empire et par un emprunt
fait à l'astronomie grecque alexandrine.
Jusqu'à
l'époque de Jules César (Ier siècle avant notre ère),
le calendrier utilisé par les Romains, et que ceux-ci faisiaient
remonter Numa, était très compliqué et en outre inexact.
Au temps de César, on sentit la nécessité de mettre
l'année civile en rapport avec le mouvement du soleil, et, à
cet effet, le dictateur établit, un concours pour la fixation de
la durée de l'année.
Sosigène,
qui était venu exprès d'Alexandrie, remporta le prix, et
donna à l'année 365 jours 1/4 c'est-à-dire que, sur
quatre années, trois se composaient de 365 jours et la quatrième
de 366 jours. L'année réformée porta le nom d'année
julienne. Et c'est ce
calendrier julien qui fut en vigueur en Europe
jusqu'à la réforme préconisée au XVIe sièclepar
le pape Grégoire XIII, dont est issu notre calendrier grégorien. |
Rome ancienne a produit des astrologues.
tels que Tarutius Firmanus, qui tira l'horoscope
de la ville éternelle, et Nigidius Figulus,
qui tira l'horoscope d'Auguste; elle a produit des traités d'astrologie,
soit en vers, comme celui de Manilius (sous
Auguste), soit en prose, comme celui de Julius Firmicus
(IVe siècle);
mais rien n'indique qu'elle ait jamais produit aucun ouvrage astronomique
de quelque valeur.
On vantait beaucoup Sulpicius
Gallus (IIe
siècle av. J.-C.) comme disciple de l'astronomie grecque.
Cependant, sur les distances de la Lune
et du Soleil
à la Terre ,
ce n'était ni à son illustre contemporain Hipparque
de Rhodes, ni à Aristarque
de Samos, qu'il s'en rapportait, mais c'était
à Pythagore, c'est-à-dire à
l'enfance de la science grecque : il y avait, suivant Sulpicius, 126,000
stades (23,285 kilomètres) de la Terre
à la Lune, et le double (46,570 kilomètres)
de la Terre au Soleil. Avec des notions aussi fausses, il avait bien pu
écrire un ouvrage sur la cause des éclipses ,
mais il ne pouvait pas calculer d'avance les éclipses de Lune et
de Soleil, comme mi prétendit. plus tard qu'il l'avait fait. Pourtant
une éclipse de Lune contribua beaucoup à sa renommée.
Les auteurs les plus dignes de foi et les
plus
rapprochés de son temps, suivis en cela par la majorité des
écrivains anciens qui ont mentionné ce fait, se bornent à
dire que, le lendemain de l'éclipse, pour rassurer des soldats romains
effrayés de ce prodige, il les harangua et leur expliqua la cause
physique du phénomène. Mais, an bout d'un siècle,
on commença à ne plus parler ni de la frayeur des soldats
causée par ce phénomène imprévu, ni de l'explication
donnée le lendemain par Sulpicius; mais à dire qu'il avait
prédit l'éclipse la veille.
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Aux confins
du ciel et de la Terre
Lucrèce,
à l'exemple d'Épicure, rejette
comme impossible et absurde l'existence des antipodes Au siècle
d'Auguste, Virgile, dans un poème didactique,
dans un passage concernant l'astronomie, hésite entre la tradition
d'après laquelle l'hémisphère opposé à
celui que nous voyons serait plongé dans d'éternelles ténèbres,
et la doctrine d'après laquelle le soleil se lève pour cet
autre hémisphère, quand il se couche pour nous; et ailleurs
le même poète suppose qu'au delà des lieux où
Atlas
soutient le ciel sur ses épaules s'étend une terre en deçà
de laquelle finit la course des astres et du soleil.
Sous
Néron,
Lucain, poète philosophe, né en
Espagne, dits qu'aux extrémités occidentales de la Libye,
la terre brûlante reçoit l'Océan échauffé
par le soleil, qui y descend, et il s'imagine que les nuages apportés
par le vent d'est sur l'Espagne se trouvent arrêtés et comprimés
par la voûte du ciel, qui touche à l'Océan. Sous Vespasien,
Pline constate que la doctrine savante d'après laquelle les astres
passent sous la terre, rencontre encore des contradicteurs. A la même
époque, Silius Italicus croit que l'Afrique
s'étend au sud depuis le centre du disque terrestre jusqu'au bord
de la voûte du ciel.
Le
Soleil, dans sa course diurne au-dessus de la Terre, semble se rapprocher
beaucoup plus du midi que du nord de la surface terrestre : trompés
par cette apparence, Horace, Lucain, Pline lui-même, Claudien
et Sextus Rufus expliquent les chaleurs excessives des contrées
méridionales en disant que le Soleil y est trop près de la
surface de la Terre. |
Hipparque aurait pu faire cette prédiction;
mais il est très douteux qne jamais un citoyen de l'ancienne Rome
ait su calculer d'avance une éclipse. Pline parle de l'astronomie
grecque avec une admiration emphatique, mais en des termes qui prouvent
qu'il ne la comprend pas bien, par exemple lorsqu'il confond des expressions
d'astrologie avec des expressions astronomiques,
ou lorsqu'il mêle à des lambeaux de la science grecque de
fausses notions empruntées à la cosmographie populaire.
Quelque, écrivains romains, par
exemple Hyginus, Vitruve,
Manilius, Pline, Censorinus, Macrobe,
Martianus
Capella, Chalcidius, ont traité
en passant quelques questions astronomiques mais en suivant les Grecs pas
à pas, sans se hasarder au delà des premiers éléments
de la science, et non sans commettre des fautes.
En somme, si toutefois on peut dire qu'il
y ait eu une astronomie romaine, elle n'a été qu'un écho
très faible et très infidèle de l'astronomie grecque.
(Th.-H. Martin). |
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