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Suger, moine,
chroniqueur et homme d'État français, né en 1081,
peut-être à Saint-Denis ou
à Argenteuil ,
mort le 13 janvier 1151 (et non 1152). Entré à l'abbaye
de Saint-Denis comme écolier, il resta d'abord dix ans au prieuré
de Saint-Denis de l'Etrée (1094-1104?), puis passa quelque temps
dans une école du centre de la France, assez probablement à
Saint-Benoît-sur-Loire .
Revenu à Saint-Denis vers 1106, il commença de prendre part
à l'administration de l'abbaye. Il eut l'honneur en 1107, à
la Charité-sur-Loire, de défendre son monastère
auprès du pape Pascal II contre les accusations de l'évêque
de Paris; à Châlons-sur-Marne,
la même année, étant avec son abbé, il assiste
à l'entrevue du pape avec les envoyés de l'empereur. Il prend
part aussi aux conciles de l'époque.
Familier de Louis
VI, qu'il avait connu à Saint-Denis,
il l'accompagne dans la plupart de ses expéditions, et c'est lui
qui est chargé de négocier avec Hugues du Puiset en 1112,
année ou il se rendit à Rome,
au concile de Latran. Quand il devint, en 1122, abbé de Saint-Denis,
il était l'ambassadeur que le roi envoyait auprès des papes.
Par l'influence de saint Bernard, à
partir de 1127, il se consacra d'ailleurs davantage à l'administration
de son abbaye. En 1131, il décide le roi à faire couronner
son second fils; il réconcilie celui-ci en 1135 avec le comte, Thibaut
de Champagne et le suit deux ans après dans son voyage d'Aquitaine .
Son rôle politique augmente encore à l'avènement de
Louis
VII, et pendant la deuxième croisade
il est régent du royaume (1147-49); à son retour, le roi
lui donna le titre, de Père de la patrie.
Cet homme d'État, que deux rois
ont honoré du nom d'ami et qui a gouverné seul la France
durant deux ans, est en somme une grande figure. Il est l'auteur principalement
d'une Vie de Louis VI, écrite peu après la mort de
ce prince, mais avant 1145, et qui n'est qu'un panégyrique ayant
cependant le caractère d'une composition littéraire et le
grand mérite d'être l'oeuvre d'un témoin qui était
initié à tous les secrets. Mais dans cet ouvrage, qui s'étend
de 1093 environ à 1137, il n'y a pour ainsi dire pas de date; son
auteur aurait pu dans bien des cas se montrer moins discret, lorsqu'il
s'agissait de faire connaître son rôle propre, et la période
de 1131 à la fin y est particulièrement écourtée.
Suger se préparaît, au moment
de sa mort, à entreprendre à ses frais et à diriger
lui-même une expédition en Terre sainte. L'église de
Saint-Denis
lui doit sa reconstruction. Prévôt aussi de Berneval en Normandie ,
puis de Toury en Beauce ,
il fit preuve, dans ces fonctions, d'une réelle activité,
et on a pu le considérer comme un rénovateur de l'agriculture
en France. Petit et chétif, il unissait à une vive intelligence
beaucoup de bon sens. Doué d'une remarquable facilité de
parole, il a joué dans le palais en quelque sorte le double rôle
de procureur du roi et de maître des requêtes.
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Suger
(1081-1151). Statue de la façade du pavillon Richelieu
du musée du Louvre.
©
Photo : Serge Jodra, 2009.
Suger a passé tout entier, traduit
en français, dans les Grandes chroniques de France
et a été mis à contribution presque exclusivement
par tous les chroniqueurs du XIIe au XIVe
siècle qui ont parlé de Louis le Gros,
entre autres Guillaume de Nangis; on voit par
l'un d'eux, qui est anonyme, que Suger avait peut-être à la
fin de sa vie entrepris une nouvelle oeuvre historique qui comprenait un
remaniement de la Vie de Louis VI.
Il est l'auteur également de la
première partie de l'histoire de Louis VII, Historia gloriosi
regis Ludocici, réunion de plusieurs fragments faite vers 1172
et qui a été découverte en 1573. On a de lui encore
un Libellus de consécration ecclesiae a se aedificatae de
1143 et un Liber de rebus in administratione sua gestis, commencé
en 1145, ouvrages surtout précieux pour l'histoire des moeurs et
celle aussi de l'architecture. On possède enfin vingt-six de ses
lettres appartenant à la période comprise entre 1146 et 1151.
Le style de Suger est souvent emphatique, mais souvent aussi pittoresque
et peu banal. (M. Barroux). |
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