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Jean Philopon

Le nom de Jean Philoponus ou Jean Philopon semble devoir être attribué à plusieurs auteurs grecs des VIe et VIIe siècles. La confusion qui a longtemps existé (et qui n'est toujours pas complètement dissipée) entre les divers homonymes,  tient à la banalité du prénom et aussi du surnom de Philoponos ( = qui aime le travail, ami du labeur), qui pouvait s'appliquer à beaucoup d'intellectuels de l'époque. Le plus connu était Jean le Grammairien, natif d'Alexandrie, et qui a été un important commentateur d'Aristote.

Philopon(t) et Philopon(d).
Il y a eu un Jean Philopon théologien, qui attaqua un discours prononcé en 566 par Jean le Scolastique; patriarche de Constantinople, et fut condamné en 576 comme trithéiste. De ce Jean Philopon ou d'un autre théologien du même nom subsistent Sept discours exégétiques sur la cosmogonie de Moïse (édités à Vienne, in-4, 1630, grec-latin) qui sont dédiés à Sergius, patriarche de Constantinople de 610 à 639 leur auteur pourrait être le Philopon qu'Aboul-Faradj fait assister à la prise d'Alexandrie par les Arabes, en 610, et essayer vainement de sauver la bibliothèque (il aurait obtenu d'Amrou, général d'Omar, la conservation de cette bibliothèque; mais Omar la fit brûler). 

Les sept livres sur la Cosmogonie de Moïse forment un ouvrage dont le fond est curieux : il y a là autre chose que de la théologie, quoique la théologie n'y manque pas, et même la théologie la plus hypothétique par exemple quand il parle des anges. Mais habituellement c'est le physicien, le géographe, le naturaliste l'érudit que l'on trouve. Ce n'est pas que sa physique, sa géographie soient toujours exactes  : il prétend que l'Océan ne fait pas le tour de la Terre; il affirme que le déluge a couvert tout le globe en même temps; il croit que la sphéricité de la Terre n'implique pas la sphéricite des masses aqueuses occupant une portion de sa surface. Cependant il serait facile d'en tirer des faits très intéressants pour l'histoire des sciences.

L'attribution est incertaine pour une Discussion sur la date de la Pâque (éditée avec à la suite de la Cosmogonie, et dans la Bibliothèque des Pères), et pour des ouvrages purement grammaticaux (un livre sur les accents  [in-8, Wienberg, 1615; in-8, Leipzig, 1825]; 2° trois petits ouvrages sur les dialectes grecs [in-4, Venise, 1512, 1540, 1557]), et il semble y avoir eu encore un Jean Philopon, grammairien, d'Asie Mineure, non d'Alexandrie, comme le suivant : 

Philopon, le Grammairien d'Alexandrie.
Le Jean Philopon grammairien (commencement du VIe siècle ap. J.-C) qui, d'après son propre témoignage, quoique chrétien, fut disciple du philosophe païen Ammonius, fils d'Hermias, dut professer les belles-lettres à l'école d'Alexandrie, d'où la surnom de Grammaticos qu'il prit expressément. Son Commentaire sur la physique d'Aristote est fixément daté de 517; Ses Dix-huit discours contre Proclus sur l'éternité du monde (Venise, 1535) sont postérieurs à 529; mais, ayant été réfutés par Simplicius, ils ne peuvent avoir été écrits beaucoup après. On a sous son nom des commentaires sur presque toute l'oeuvre d'Aristote; tous existent, sept ont été publiés à part en grec, et sept en latin :

1° le Commentaire sur les Premiers Analytiques, in-f°, Venise, 1536 (trad. lat. : in-f°, ib., 1541, 1544, 1553 1555. 1560); 

2° les Commentaires sur les Seconds Analytiques, in-f°, ib., 1504, 1534 (éd. lat. in-f°, b., 1542, 1559, 1568; Paris, 1544); 

3° le Commentaire sur le premier livre des Météorologiques, in-f°, Venise, 1551 (trad. : Camozzo, in-f°), ib., 1551, 1567); 

4° le Commentaire sur les quatre premiers livres de la physique, ib., 1535 (trad. lit.: in-f°, ib., 1539, 1541, 1558, 1569, 1581); 

5° le Commentaire sur les livres du Traité l'Âme, ib., 1535 (trad.: in-f° ib.,1544, 1554, 1558,1568, 1581; Lyon, 1548, 1558); 

6° le Commentaire sur la Génération des animaux, in-f°, Venise, 1526; 

7° le Commentaire sur la Génération et la Corruption, in-f°, ib., 1527, avec celui d'Alexandre d'Aphrodise sur la Météorologie;

8° des Notes (plutôt que des commentaires) sur les quatorze livres de la Métaphysique (en latin seulement : on ne sait où est le texte grec, ni s'il existe encore). 

A ces huit ouvrages doit être jointe, peut-être une Vie d'Aristote, souvent donnée comme d'Ammonius, mais qui n'est pas de ce dernier, et que quelques manuscrits attribuent formellement à Philoponus : elle se trouve en tête du Commentaire sur les Catégories d'Ammonius . 

Cette oeuvre représente un travail considérable qui a singulièrement contribué à l'assimilation de la philosophie d'Aristote par la doctrine chrétienne.

On a encore, du même Jean Philopon d'Alexandrie, deux traités mathématiques, un Commentaire sur l'arithmétique de Nicomaque  de Gérase, édité par Hoche (Berlin, 1864 et 1867) et un Traité sur l'usage de l'astrolabe, publié par Hase (Bonn, s. d.), qui mentionnent tous deux Ammonius comme maître de l'auteur, et dont le second fournit
la plus ancienne description de l'instrument astronomique qui a servi dans l'Antiquité à la détermination de l'heure. Il a donc une importance historique considérable. On veut enfin que Philoponus ait annoté ou commenté la Grande composition (l'Almageste) de Ptolémée; qu'il ait laissé des scolies sur Hésiode.

Comme philosophe, Philopon a les défauts de son temps : prolixité rebutante, subtilité de détail excessive, impuissance à saisir le véritable noeud d'une question; mais il vaut bien Simplicius, et les historiens de la philosophie ancienne ont eu le tort de l'écarter systématiquement, comme chrétien, alors qu'il représente toujours, et peut-être mieux que les néo-platoniciens, la tradition exégétique d'Aristote. S'il met un peu le Stagirite à la mode chrétienne, il ne le défigure pas plus pour cela que ne l'avaient fait déjà Alexandre d'Aphrodisie, Porphyre ou Themistius. (Paul Tannery / Val. P.).

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