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Oates

Titus Oates est un fanatique anglais, né à Oakham en 1649, mort à Londres le 12 juillet 1705. Fils d'un recteur, il se fait remarquer dès son enfance par son inconduite ; chassé de diverses écoles, il quitte l'Université de Cambridge après des études incomplètes. Cependant il prend les ordres et devient vicaire de Bobbing (Kent), puis curé à Hastings. Impliqué dans un procès louche, il est emprisonné à Douvres. Il s'échappe, s'engage comme aumônier sur un navire de guerre. Bientôt chassé de la flotte, il réussit à tromper la confiance du duc de Norfolk qui l'engage comme chapelain. Il se lie avec de nombreux catholiques et, tombé dans la pire misère, songe à tirer parti d'une conversion opportune. Il s'introduit dans les maisons jésuites de Valladolid et de Saint-Omer d'où sa mauvaise conduite le fait encore expulser. Par vengeance ou désir de battre monnaie, coûte que coûte, il conçoit un abominable projet. Ayant appris à Saint-Omer que les jésuites se disposaient à tenir à Londres une assemblée secrète, probablement une de ces réunions ordinaires où ils discutent les intérêts de l'ordre, il fait passer au roi, en 1678, l'avis que les papistes tramaient un grand complot contre le protestantisme et contre la vie de Charles II. Le roi accueille cette confidence avec incrédulité. Oates la rédige avec soin, entrant dans les détails les plus extraordinaires, et affirme par serment, solennellement reçu par un magistrat de Londres, la vérité de sa relation. Il est mandé devant le conseil privé (28 septembre) où il répète son histoire avec la plus incroyable assurance et en la corsant de nouveaux détails.

Il s'agissait, en un mot, de fomenter une insurrection en Irlande, de pénétrer en Ecosse sous le costume de cameroniens et d'assassiner le roi pour assurer le trône au duc d'York. Charles II se montrait de plus eu plus défiant. Mais au moment où Titus Oates allait être renvoyé avec le mépris qu'il méritait, la correspondance de Coleman, secrétaire de la duchesse d'York, tomba entre les mains du gouvernement. Coleman parlait d'un projet d'entente avec Louis XIV, dans le but de convertir les trois royaumes et de « vaincre complètement l'hérésie pestilentielle qui a si longtemps dominé dans une grande partie du Nord ». Cette découverte  donnait quelque couleur de vraisemblance au complot papiste imaginé par Oates. La situation fut savamment exploitée par Shaftesbury, pressé de ruiner la politique de Danby. Sur ces entrefaites; le magistrat devant lequel Oates avait déposé fut trouvé dans un champ des environs de Londres, le coeur percé de son épée. L'imagination populaire se monta. On eut la conviction d'un crime commis par les jésuites pour étouffer l'affaire. On fit à sir Edmundsbury Godfrey des funérailles solennelles.

Londres et la province connurent toutes les folles extrémités de la panique. Sous la pression populaire, la Chambre des lords et la Chambre des communes nommèrent des commissions pour faire une enquête sur les révélations de Titus Oates. Shaftesbury s'arrangea pour la diriger (1679). Il accepta sans contrôle toutes les accusations nouvelles que le dénonciateur se prit à forger. Cinq lords catholiques furent envoyés à la Tour, deux mille suspects furent jetés en prison. Une véritable terreur s'abattit sur le pays. Shaftesbury apparaissait comme un sauveur et il ne négligeait rien pour fortifier cette apparence, faisant chasser de Londres tous les catholiques, appelant les milices aux armes, faisant voter un bill excluant les catholiques des Chambres. Au bout de quatre mois de ce régime, on commença à concevoir des doutes sur la réalité du complot papiste. Mais un autre imposteur, nommé Bedloe, se mit à inventer des atrocités plus fortes que celles qu'avait conçues Oates. Il ne parlait rien moins que du débarquement d'une armée papiste et du massacre général des protestants, Oates ne voulut pas se laisser distancer et il accusa la reine d'avoir participé à la conjuration contre son mari. L'affolement de la population parvint à son comble. 

Les lords catholiques furent mis en jugement sons l'inculpation de haute trahison, et Shaftesbury fit procéder à une série de meurtres juridiques qui débuta par l'exécution de Coleman; mais il remplaça Danby à la tête du gouvernement. Il essaya encore de jouer du complot papiste pour lutter contre la réaction qui vint, inévitable. Ainsi, en 1680, il produisit de nouvelles révélations sensationnelles complot contre sa vie, affiliation du duc d'York lui-même aux diverses conjurations papistes, etc. Il ne réussit qu'à provoquer de grandes processions aux flambeaux qui, après s'être promenées dans Londres, brûlèrent l'effigie du pape. Le jury acquittait, coup sur coup, les victimes désignées par les dénonciateurs et, Titus Oates, qui vivait grassement du produit de ses mensonges, fut un beau jour arrêté, condamné à 100.000 £ de dommages-intérêts et mis aux fers (1684). Dès son avènement, Jacques II lui fit intenter un procès pour parjure. Oates fut condamné (1686) au pilori et à la détention perpétuelle. Guillaume d'Orange le fit, remettre en liberté (1689), et l'imposteur trouva encore moyen de faire des dupes en épousant une riche veuve, en obtenant son admission dans la secte des baptistes, d'où il se fit expulser d'ailleurs pour avoir sollicité un legs d'une dévote, etc. Il a laissé un abominable pamphlet contre Jacques II (Londres, 1696-1697, 4 vol.). (R. S.).

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Dictionnaire biographique
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