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Lucullus
(Lucius Licinius L. F. L. N.) est un célèbre général
romain ,
né vers 109 av. J.-C., mort entre 58 et 56. Il appartenait à
une branche de la gens plébéienne
Licinia,
était fils de Lucius Licinius L. F. Lucullus, préteur en
103, et de Caecilia, fille de L. Metellus Calvus. Il débuta par
l'accusation de l'augure Servius qui avait fait
bannir son père. Il se distingua dans la guerre sociale, fut choisi
par Sylla comme questeur
et l'accompagna en Grèce
pour combattre Mithridate (88). Pendant le
siège d'Athènes, il fut chargé
de rassembler une flotte avec laquelle il prit Chios
et Colophon ,
mais refusa de coopérer avec le général marianiste
Fimbria au siège de Pitane d'où il laissa échapper
Mithridate. Il défit la flotte ennemie, commandée par Néoptolème,
à Ténédos, et occupa l'Hellespont ,
préparant le passage de Sylla en Asie
(84). Quand son chef entra en Italie ,
il laissa en Asie Lucullus qui s'occupa de recouvrer les énormes
indemnités de guerre et le fit avec beaucoup de modération.
En 80, il revint à Rome et y exerça
avec son frère cadet Marcus l'édilité
curule (79). Les jeux qu'ils célébrèrent
furent splendides, innovant les combats d'éléphants contre
des chiens. Sylla légua à Lucullus le soin de réviser
ses commentaires et la tutelle de son fils Faustus, ce qui excita la jalousie
de Pompée.
Une loi spéciale l'autorisa à
occuper de suite la préture; il fut ensuite
gouverneur d'Afrique ,
puis élu au consulat pour 74 avec M. Aurelius
Cotta. Le guerre contre Mithridate recommençait.
Cotta obtint la province de Bithynie ,
Lucullus échangea celle de Cisalpine pour celle de Cilicie .
Laissant à son collègue le commandement des forces navales,
il entra en campagne avec cinq légions.
Mithridate se jeta sur la Bithynie avec 150.000
hommes, défit Cotta sur terre et sur mer et l'enferma dans Chalcédoine .
Lucullus laissa la grande armée du roi de Pont
s'user au siège de Cyzique ,
la détruisit en détail, l'avant-garde au passage du Rhyndacus,
l'arrière-garde au passage de l'Aesepus et du Granique .
Il rassembla ensuite une flotte et écrasa celle du roi en vue de
Lemnos. Il opéra ensuite sa jonction avec Cotta et Triarius à
Nicomédie et s'avança par la Galatie
sur le Pont jusqu'à Thémiscyre. Il passa l'hiver au siège
d'Amisus
qu'il dut charger Muréna de continuer.
En 72, la supériorité de cavalerie de Mithridate rendit le
succès douteux. Grâce à une panique, l'armée
pontique fut dispersée et le roi dut fuir en Arménie
auprès de son gendre Tigrane.
Lucullus occupa Cabeira et dépêcha près de celui-ci
Appius
Claudius, tandis qu'il achevait de soumettre le Pont, la Petite-Arménie,
les Babyloniens et Tibaréniens.
Amisus et Héraclée (assiégée
par Cotta) furent prises et le roi du Bosphore ,
Macharès, fils de Mithridate, fit sa soumission et coopéra
à la prise de Sinope. En même temps, Lucullus régularisait
l'administration de l'Asie ,
mettait un terme aux exactions des fermiers et officiers romains. Il gagna
l'estime des provinciaux, mais se fit des financiers de puissants ennemis
qui intriguèrent contre lui à Rome.
Tigrane avant refusé d'extrader
Mithridate,
Lucullus envahit l'Arménie
avec 12.000 fantassins et 3.000 cavaliers;
le roi de Cappadoce ,
Ariobarzane, l'assista. Traversant la Saphène, il franchit le Tigre
et marcha sur Tigranocerte. Pour la débloquer, le roi d'Arménie
s'avança la tête de 150.000 fantassins,
55.000 cavaliers, 20.000
frondeurs et archers. Cette formidable armée fut dispersée
aux bords du Nicéphore le 6 octobre 69, et la capitale livrée
par ses habitants grecs que le roi y avait transplantés de force.
Lucullus hiverna en Gordyène, rétablit en Syrie le roi Antiochus,
et négocia avec Arsace, roi des Parthes.
Il voulait combattre celui-ci, mais les soldats de son lieutenant Sornatius,
qu'il avait laissé dans le Pont ,
refusèrent de venir renforcer l'armée de Lucullus; celle-ci
se mutina également, redoutant la guerre parthique. Mithridate et
Tigrane assemblèrent de nouvelles forces qui furent battues sur
les rives de l'Arsanias (été 68). Mais les troupes victorieuses
refusèrent de s'engager dans ces âpres montagnes pour occuper
Artaxata. Lucullus se tourna vers le Sud et s'empara de la forte place
de Nisibis .
L'insubordination de l'armée ne fit que croître, sous l'influence
de P. Claudius. On accusait le général de prolonger la guerre
par ambition et cupidité. On s'indignait de le voir amasser d'énormes
trésors, alors qu'il interdisait le pillage aux soldats. En 67,
il fut immobilisé à Nisibis, tandis que Mithridate rentrait
dans le Pont et y battait Fabius et Triarius.
Quand Lucullus marcha contre lui, son armée refusa de nouveau de
poursuivre les opérations. A ce moment survinrent dix légats
envoyés de Rome pour organiser la province
du Pont .
Ils le trouvèrent aux mains de son roi. Les rancunes de l'ordre
équestre, qui avait fomenté les troubles, eurent beau
jeu, et le commandement fut transféré à Acilius
Glabrio, gouverneur de Bithynie .
Celui-ci ne fit rien que d'inviter les soldats de Lucullus à cesser
d'obéir à leur chef. Au printemps de l'an 66, Pompée
fut, par la loi Manilia, substitué à Glabrio et à
Lucullus. Il eut avec ce dernier une entrevue qui dégénéra
en violente querelle.
De retour à Rome,
Lucullus demanda le triomphe ;
il fut retardé par les machinations de ses adversaires et ne put
le célébrer qu'en 63, avec une grande magnificence. Il avait
été énergiquement soutenu par Caton,
dont il avait épousé la soeur Servilia,
et par le parti oligarchique des nobles, qu'alarmait la morgue de Pompée.
Lucullus fut avec Metellus Creticus et Caton le chef de ce parti dont l'opposition
retarda de deux ans la ratification des actes de Pompée
en Asie
et aboutit à la formation du premier triumvirat. Lucullus était
l'ennemi personnel de Crassus et de César
(amis de son détracteur Clodius) aussi bien que de Pompée.
Il fut obligé de s'humilier pour mettre un terme aux attaques de
César contre sa gestion en Asie. Il se retira de la politique, se
contentant de jouir des énormes richesses qu'il avait rapportées
d'Asie. Son luxe est demeuré légendaire. Ses jardins
dans les faubourgs de Rome éclipsèrent tout ce qu'on avait
vu ; il y avait fait planter des cerisiers
rapportés, si l'on en croit Ammien Marcellin,
de Cerasus
(Pont) et qu'il acclimata en Europe .
Ses villas et ses parcs de Tusculum et de Naples
les surpassaient encore. La grandeur de ces travaux d'art et la magnificence
de ses fêtes le fit qualifier de Xerxès
romain; un souper lui coûtait 50.000
deniers. Aux plaisirs de la table, Lucullus enjoignait de plus délicats.
Il avait le goût des arts et des lettres;
en Grèce
et en Asie, il avait fait sa compagnie des philosophes; l'académicien
Antiochus
d'Ascalon l'accompagnait dans ses campagnes. A Rome, il rassembla dans
son palais l'élite intellectuelle, prenant une part active aux débats
métaphysiques.
Il fut le patron du poète Archias, et
du sculpteur Arcésilas. Sa mémoire était célèbre.
Il écrivit en grec une histoire
de la guerre sociale (qui est perdue). Il mit sa bibliothèque
à la disposition du public.
Marié d'abord à Claudia,
fille d'Appius Claudius Pulcher, il divorça à son retour
à Rome et épousa Servilia, fille de Q. Servilius Caepio,
demi-soeur de Caton. Il en eut un fils, Marcus
ou Lucius. (A.-M. B.). |
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