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Janin

Jules Gabriel Janin est un écrivain français, né à Saint-Etienne (Loire) le 16 février 1804, mort à Passy (Paris) le 20 juin 1874. Fils d'un avoué, il vint terminer à Paris, au collège Louis-le-Grand, les études qu'il avait brillamment commencées dans sa ville natale, et, lorsqu'elles furent achevées, il vécut fort modestement de répétitions à 2 F le cachet jusqu'au jour où il débuta dans la petite presse libérale. Il abandonna bientôt le Figaro pour la Quotidienne qu'il ne tarda pas à quitter lorsqu'elle devint l'organe de Polignac. Présenté aux frères Bertin, il fit d'abord partie de la rédaction politique du Journal des Débats; mais, chargé un jour de suppléer Duviquet, successeur de Geoffroy, comme critique dramatique, il apporta dans cette tâche nouvelle tant de verve et de fantaisie qu'elle lui fut désormais exclusivement confiée. 
Janin.
Jules Janin (1804-1874).

Durant quarante et un ans, Janin ne cessa pas un seul lundi d'entretenir son public, non seulement des pièces nouvelles et de leurs interprètes, mais encore de réminiscences ou d'affaires personnelles, dont quelques-unes sont demeurées célèbres par les polémiques ou les procès dont elles furent l'origine. C'est ainsi qu'à l'occasion du mariage du critique (16 octobre 1841), il initia le public, alors peu habitué à ces sortes de confidences, aux joies que lui promettait son union avec Mlle Huet, fille d'un magistrat, et s'attira de la part d'Hippolyte Rolle, et sous le même titre, une verte riposte; ou bien encore, à propos d'une reprise du Tibère de Marie-Joseph Chénier (décembre 1843), Félix Pyat répondit dans la Réforme aux critiques des Débats en mêlant à ses arguments de telles personnalités que Janin le fit condamner pour diffamation à six mois de prison. Il eut encore d'autres démêlés où le papier timbré joua son rôle avec Alexandre Dumas (à propos de Mlle de Belle-Isle), avec Théodore de Banville, avec le Figaro de Villemessant.

Si ponctuel qu'il fût à remplir sa tâche hebdomadaire et sans parler d'une collaboration assidue à l'Artiste et à la Revue, de Paris (où il rompit des lances contre D. Nisard et contre Balzac, à propos de la littérature « facile » et d'Un Grand homme de province à Paris), Janin s'était révélé comme romancier par : l'Ane mort et la Femme guillotinée (1829, 2 volumes); la Confession (1830, 2 volumes); Barnave (1834, 4 volumes); Contes fantastiques et Contes littéraires (1332, 4 volumes); Contes nouveaux (1833, 4 volumes); le Chemin de traverse (1836, 2 volumes); Un Coeur pour deux amours (1837). L'Ane mort est demeuré fameux par la bizarrerie de son titre et de son contenu; la publication de Barnave, dont Auguste Barbier, Félix Pyat, Théodore Burette, Edgar Quinet, avaient fourni leur quote-part, fut un événement plus politique encore que littéraire, car la préface, rédigée par Etienne Béquet, attaquait avec véhémence Philippe-Egalité, et provoqua une réplique intitulée la Branche royale d'Orléans ou le Barnave de M. J. Janin réfuté par l'histoire (1831). A partir de ce moment, Janin, dont jusque-là « l'opposition avait été la vie », témoigna en toute occasion le zèle le plus bruyant en l'honneur de la branche cadette et garda, disons-le à sa louange, la même attitude après l'exil et la mort de Louis-Philippe. 

A considérer non le résultat définitif, mais l'effort, on ne saurait contester que Janin n'ait été l'un des plus infatigables polygraphes de son temps, même en tenant compte de quelques plagiats plus on moins déguisés et de la complaisance avec laquelle il prêtait son nom à des éditeurs embarrassés ou peu scrupuleux. Une énumération détaillée ne saurait en être tentée ici, et il suffira, pour donner une idée de cette activité quelque peu stérile, de rappeler les principales excursions du « prince de la critique » dans les directions les plus diverses.

Il faut citer en première ligne : Deburau, histoire du théâtre à quatre sous pour faire suite à l'histoire du Théâtre-Français (1832), pimpante fantaisie; Histoire de la littérature dramatique en France (1853-1858, 6 volumes), choix pratiqué par l'auteur dans ses feuilletons remaniés et modifiés; Rachel et la Tragédie (1859); Béranger et son temps (1865, 2 volumes); puis de nouveaux romans-: la Religieuse de Toulouse (1850, 2 volumes); les Gaités champêtres (1854, 2 volumes); la Fin d'un monde et du neveu de Rameau (1861); Contes du chalet (1859); Contes non estampillés (1862); les Oiseaux bleus (1864); le Talisman (1866); les Amours du chevalier de Fosseuse (1867 ); Circé (1867); l'Interné (1869); Petits Romans d'hier et d'aujourd'hui (1869), etc. 

On retrouve un écho des événements contemporains dans divers écrits de circonstance : Fontainebleau, Versailles, Paris (1837), relation des fêtes du mariage du duc d'Orléans; le Prince royal (1842); le Roi est mort 1850); la Muette, le Château et les désastres (1871), etc.

Enfin Janin a écrit on signé le texte de plusieurs publications illustrées, telles que : Un Hiver à Paris (1842); la Normandie historique, pittoresque et monumentale (1812), et son pendant, la Bretagne historique, pittoresque et monumentale (1848); les Petits Bonheurs de la vie (1856); les Symphonies de l'hiver (1858); la Révolution française (1862-1865, 2 volumes), etc.

Janin avait, pour se constituer des titres sérieux au fauteuil académique, a traduit ou plutôt paraphrasé à sa manière Horace (1860), et réuni, sous le titre de la Poésie et l'éloquence à Rome (1863), diverses études sur les classiques latins, mais il échoua, en 1865, contre Prévost-Paradol et s'en consola en publiant son spirituel Discours de réception à la porte de l'Académie française. Elu cinq ans plus tard en remplacement de Sainte-Beuve, il eut lui-même John Lemoinne pour successeur. Sa bibliothèque, très vantée de son vivant et qu'il dut tour à tour léguer à sa ville natale, à l'Institut et à l'Arsenal, a été dispersée en 1877 après la mort de sa veuve et causa quelque déception aux amateurs. 

Sous le titre d'OEuvres choisies (1875-1878, 12 volumes), A. de La Pizelière avait rassemblé quelques-uns des écrits cités plus haut, ainsi qu'une partie de la correspondance d'un écrivain qui ne méritait peut-être ni les louanges excessives que lui ont prodiguées ses contemporains ni l'injurieux oubli dont il a payé cette célébrité éphémère. (M. Tx.).

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