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Guez de Balzac

Jean-Louis Guez de Balzac est un des écrivains qui ont le plus contribué à former la langue française, né à Angoulême en 1594, mort en 1655. Après avoir passé à Rome deux années (1621-1623) comme agent du cardinal Lavalette il vint à Paris, s'y fit bientôt connaître par ses écrits, obtint les bonnes grâces de Richelieu, qui lui fit donner les titres d'historiographe et de conseiller d'État avec une pension de 2000 livres, et fut un des premiers membres de l'Académie française. Dégoûté du séjour de Paris à cause des attaques dirigées contre ses ouvrages, il se retira dans sa terre de Balzac et se livra presque entièrement à des exercices de piété. Il avait légué à l'Académie française 2000 livres pour fonder un prix d'éloquence, et à l'hospice d'Angoulême une somme de 12 000 livres. 
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Guez de Balzac.
Guez de Balzac (1594-1655).

Les oeuvres de J.-L. Guez de Balzac se composent de Lettres, adressées à Conrart, à Chapelain et autres; de Discours, d'Entretiens ou Dissertations littéraires, de petits traités, dont les principaux sont Aristippe ou la Cour, le Prince (apologie de Louis XIII et de Richelieu), le Socrate chrétien; de quelques poésies françaises et de vers latins. Ces oeuvres, qui pour la plupart avaient été publiées séparément par les Elzevir, ont été réunies par l'abbé Cassaigne en 2 vol. in-fol., Paris; 1664, et réimprimées en 1854 par L. Moreau, 2 vol, in-12.

Le principal fondement de la réputation de Balzac, ce sont ses Lettres, dont il parut un premier recueil en 1624, et un deuxième en 1636 : il y donna à la langue française une élégance et une harmonie qu'on n'avait rencontrées jusque-là dans aucun ouvrage en prose. Voltaire et La Harpe reprochent à cet auteur de s'être plus occupé des mots que des pensées. Campenon a publié en 1806 un choix de Lettres de Balzac, Voiture et Boursault. 2 vol. in-12; Mersan a donné les Pensées de Balzac, 1 vol. in-12. Paris, 1807, et Malitourne ses Oeuvres choisies (moins les Lettres), 1822, 2 v. in-8.
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La vie à la campagne

« J'ai été assez longtemps dans le monde, mais je n'ai vécu qu'autant que dura l'automne passé; et parce qu'il n'est pas possible de faire revenir ces jours bienheureux et qui me furent si chers, je tâche le plus que je puis de les regoûter par le souvenir et par le discours. La liberté en laquelle je me trouvais, après une captivité de trois ans (j'appelle ainsi le séjour que j'avais fait à la ville), la pureté de l'air que je commençais à respirer, et que je recevais avidement, comme une nourriture qui m'était nouvelle, et la face riante de la campagne qui montrait encore sur soi une partie de ses biens et se parait des derniers présents qu'elle devait faire aux hommes, me donnaient des pensées si douces et si tranquilles que, sans être agité de l'émotion qu'excite la joie, j'avais tout le plaisir qu'elle cause.

Les autres maladies de l'âme plus importunes, qui tourmentent les cours et les assemblées, n'approchaient point de notre village. Je ne savais ce que c'était de craindre ni d'espérer, et ne connaissais plus le soupçon, la défiance, ni la jalousie. Toutes mes passions se reposaient, et celles d'autrui ne parvenaient point jusqu'à moi.

En cet état bien différent du tumulte d'où j'étais sorti, et sous la sérénité d'un ciel si bénin, il me semblait visiblement de renaître et d'assister au renouvellement de toutes les choses. Et à la vérité, quand nous aurions eu durant cette saison la direction du monde, et que nous eussions fait nous-mêmes les jours, nous n'en pouvions pas avoir de plus beaux ni dispenser l'ombre et la lumière, le froid et le chaud avec une plus égale mesure.

La première partie de l'après-dînée se passait en une conversation familière, d'où nous avions banni les affaires d'État, les controverses de la religion et les questions de philosophie. On ne se mettait point en peine d'accorder les princes chrétiens pour faire une ligue contre le Turc; on ne débattait point à outrance qui était le plus grand capitaine, du marquis de Spinola ou du comte de Tilly. Personne ne réformait les royaumes, ni ne voulait changer leur gouvernement; nous ne parlions que de la bonté de nos melons, de la récolte de nos blés et de l'espérance de nos vendanges. »
 

(Guez de Balzac).
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Dictionnaire biographique
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