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La Révolution française
La législation de la Ire République
Aperçu Causes Constituante Législative Convention Directoire
La Première République est la période de l'histoire de France qui va du 21 septembre 1792, jusqu'au 18 mai 1804, date de la création de l'Empire. Elle se divise en trois époque : la Convention, le Directoire et le Consulat. Seules les deux premières relèvent de l'histoire de la Révolution

Sous la république, la constitution de 1791 ne pouvait plus durer, puisqu'elle organisait une monarchie parlementaire. La souveraineté nationale solennellement proclamée avait trouvait dans le roi un obstacle qu'elle avait été obligée de briser. Ni Louis XVI ni la cour n'avaient sincèrement accepté le nouvel ordre de choses. Ils avaient juré la constitution, mais conspiraient pour sa ruine, d'accord avec l'étranger. Leurs menées avaient provoqué la révolution du 10 août; le roi avait été suspendu et des ministres avaient été élus par l'Assemblée législative pour exercer provisoirement le pouvoir exécutif. Une nouvelle assemblée, qui fut la Convention nationale, devait procéder à une réorganisation.

Le décret du 11 août 1792 relatif à la formation de la Convention nationale supprima la condition du cens, et établit, par conséquent, le suffrage universel. Ce décret décida que pour être électeur du premier ou du second degré il suffirait d'être Français, âgé de vingt et un ans dans le premier cas et de vingt-cinq ans dans le second, domicilié depuis un an, vivant de son revenu ou du produit de son travail, et n'étant pas en état de domesticité.

Le décret du 12 août 1792 conservait à chaque département le nombre de députés prescrit par la constitution de 1791. De plus, la Législative fonda la représentation coloniale attribuant dix-huit députés à Saint-Domingue, quatre à la Guadeloupe, trois à la Martinique, deux à l'île France (Ile Maurice), deux à l'Inde française; Sainte-Lucie, Tobago, la Guyane, l'île Bourbon (île de La Réunion) en eurent un chacun.

La Convention nationale élue après la journée du 10 août 1792, abolit la royauté par un décret du 21 septembre; elle se trouva donc immédiatement, par le fait de l'avènement de la République, en dehors de la constitution de 1791, qu'elle dut remplacer. Elle fit trois oeuvres constitutionnelles. Une première qu'elle créa progressivement selon les besoins du moment, et qu'elle modifia jusqu'au jour ou elle l'abolit nous voulons parler du gouvernement révolutionnaire; celle-ci a conservé dans l'histoire un renom légendaire : c'est elle qui organisa la France et prépara la défaite de l'Europe; c'est elle qui concentra la puissance française à un degré auquel nul gouvernement n'a pu depuis atteindre. La seconde oeuvre constitutionnelle de l'Assemblée, par une timidité trop fréquente dans l'histoire de la France, ne fut jamais appliquée, bien qu'elle eût été sanctionnée par un plébiscite, et bien qu'elle fût intervenue avant le complet développement du gouvernement révolutionnaire: c'est la constitution de 1793 qui représente l'idéal démocratique tel que le concevaient les philosophes et les imitateurs de l'Antiquité; elle reste encore, dans ses lignes générales, le plus parfait modèle de la République radicale. Enfin, la troisième oeuvre de la Convention fut la constitution de l'an III, qui fonctionna sous le Directoire; celle-ci fut rédigée à une époque où la Convention était déjà très affaiblie; c'est la première tentative de ces républiques parlementaires savamment combinées, qui n'ont jamais pu réussir en France et qui paraissent presque condamnées par l'expérience.

Nous expliquerons d'abord le fonctionnement du gouvernement révolutionnaire, ensuite la conception de la constitution de 1793, et nous réserverons un chapitre spécial pour la constitution de l'an III.

La Convention, ayant proclamé la République, dut se préoccuper sur-le-champ de l'organisation du pouvoir exécutif, auparavant confié au roi. Elle décréta (29 septembre 1792) que les ministres qui continuaient d'avoir l'exercice du pouvoir exécutif provisoire ne pourraient être pris parmi ses membres. Cette mesure, qui contraignit Danton à abandonner le portefeuille de la justice, donnait aux ministres un caractère particulièrement administratif, et attribuait les responsabilités, donc les influences politiques, aux membres mêmes de l'Assemblée. Tontes les autorités furent ensuite renouvelées. Pour faire face aux dangers qui grandissaient à l'extérieur et à l'intérieur, la Convention dut promulguer une série de mesures d'exception, destinées en partie à contenir ses adversaires par la crainte. Tant pour appliquer ces lois que pour concentrer toutes les forces nationales, il fallut créer de nouveaux agents. Ce qu'il y a de caractéristique, c'est que ces nouveaux instruments du pouvoir exécutif furent des agents collectifs. On a très justement défini ce gouvernement, le gouvernement des comités.

Nous indiquerons d'abord sommairement les principales lois qui ont produit l'état révolutionnaire et valu à cette époque le nom de Terreur. La plupart visant la liberté individuelle, il en sera question ailleurs. La peine de mort fut édictée (5 décembre) contre quiconque tenterait de rétablir la royauté ou tout pouvoir attentatoire à la souveraineté nationale. Le 5 février 1793, on institua les certificats de civisme; ils devaient être accordés par le conseil général de chaque commune; tous les fonctionnaires non élus par le peuple devaient en obtenir.

La loi du 19 mars créa la mise hors la loi; ceux qui avaient part aux émeutes contre-révolutionnaires ne profitaient.pas des dispositions des décrets concernant la procédure criminelle et l'institution des jurés : s'ils étaient pris les armes à la main, ils étaient livrés dans les vingt-quatre heures à l'exécuteur des jugements criminels pour être mis à mort, après que le fait incriminé avait été reconnu ou déclaré constant par une commission militaire de cinq membres.

La loi du 26 mars déclara suspects les ci-devant nobles, les ci-devant seigneurs, et les évêques et prêtres qui ne servaient pas la République, et elle ordonna leur désarmement; les conseils généraux des communes furent autorisés à faire désarmer également les autres personnes qu'ils reconnaîtraient suspectes.

La loi du 28 mars bannit à perpétuité les émigrés et condamna à mort ceux qui rentreraient ou seraient pris. Les biens des émigrés furent acquis à l'État. Enfin, l'inviolabilité des députés fut suspendue (1er avril) pour le cas de complicité avec les ennemis du gouvernement. La peine de mort fut édictée (13 avril) contre quiconque parlerait de traiter avec l'étranger avant qu'il eût reconnu I'indépendance, la souveraineté, l'indivisibilité, l'unité de la République.

Voici maintenant quels furent les pouvoirs chargés d'appliquer ces mesures extrêmes, de veiller à la sûreté de l'État et de concentrer toutes ses énergies contre l'étranger et ses complices de l'intérieur.

Il faut citer en premier lieu le tribunal révolutionnaire, organisé le 14 mars 1793. Il avait compétence sur toutes les entreprises contre-révolutionnaires et  tous les attentats contre la liberté, l'égalité, l'unité, l'indivisibilité de la République. Il était composé d'un jury et de cinq juges qui dirigeaient l'instruction et appliquaient la loi après la déclaration des jurés sur le fait. Les juges ainsi que l'accusateur publie et ses substituts étaient nommés par la Convention, de même que les jurés et leurs suppléants. Une commission de six membres de la Convention formait en quelque sorte un comité de surveillance. Les jurés votaient à haute voix. Les jugements étaient exécutoires sans appel ni recours; les accusés en fuite étaient assimilés aux émigrés. Les biens des condamnés étaient acquis à l'Etat. Les peines prononcées devaient être celles édictées par le code pénal et les lois subséquentes; si la répression des crimes et délits, dont un accusé était convaincu, n'était pas prévue, la peine était la déportation.

D'après la loi du 21 mars, un comité de surveillance, dans lequel n'entraient ni nobles ni ecclésiastiques, fut élu dans chaque commune; ces comités, chargés d'abord de surveiller les étrangers, devinrent les comités révolutionnaires.

Le 6 avril, le comité de Salut public était organisé; il était composé de neuf membres élus; il délibérait en secret, surveillait et accélérait l'action de l'administration confiée au conseil exécutif provisoire dont il pouvait suspendre les arrêtés, à charge d'en aviser la Convention. Il prenait toutes les mesures de défense extérieure et intérieure, et ses arrêtés, signés par les deux tiers au moins de ses membres, étaient immédiatement exécutoires. Il ne décernait des mandats d'amener que contre les agents d'exécution. II y avait des fonds à sa disposition à la trésorerie nationale. Il tenait un registre de ses délibérations, et faisait, chaque semaine, un rapport général. II n'était nommé que pour un mois.

Le 10 octobre (19 vendémiaire an II), le conseil exécutif provisoire, les ministres, les généraux, les corps constitués furent placés sous la surveillance du comité de Salut publie qui dut faire un rapport tous les huit jours. Le gouvernement fut déclaré révolutionnaire jusqu'à la paix.

La loi du 14 frimaire an II organisa le gouvernement révolutionnaire, qui venait d'être officiellement proclamé. La promulgation des lois se fit désormais par la publication du Bulletin des lois, qui fut créé; la loi était promulguée par l'arrivée et la publication, à son de trompe ou de tambour, du bulletin dans chaque localité, et elle devenait exécutoire vingt-quatre heures après. Le comité de Salut public avait la surveillance de tous les corps constitués et de tous les fonctionnaires publies; la police et la surveillance des personnes appartenait au comité de Sûreté générale. Dans les départements, les districts veillaient à l'exécution des lois votées par la Convention et des mesures prises par les deux comités, et ils avisaient le comité de Salut public. L'application des lois révolutionnaires était confiée aux municipalités et aux comités de surveillance qui devenaient les comités révolutionnaires, et qui rendaient compte tous les dix jours à la Convention par l'intermédiaire des districts de leur arrondissement. Les comités de Paris cor respondaient seuls directement avec l'Assemblée. Les procureurs-syndics de districts ou de communes étaient remplacés par des agents nationaux chargés de poursuivre et de requérir l'exécution des lois, et de dénoncer les infractions et les négligences. 

La Convention conservait un grand nombre des anciens procureurs-syndics comme agents nationaux, et elle nommait elle-même ceux qu'elle remplaçait. Le comité de Salut public était chargé des affaires diplomatiques; les représentants du peuple en mission correspondaient tous les dix jours avec lui, et ils ne pouvaient suspendre que provisoirement les généraux, le comité décidant souverainement et prenant toutes les mesures de gouvernement. Les conseils généraux, les procureurs généraux syndics et les présidents des départements étaient supprimés et remplacés par des directoires. Les présidents et secrétaires des comités révolutionnaires durent être renouvelés tous les quinze jours. Seuls, le comité de Salut public, les représentants du peuple, le conseil exécutif et la commission des subsistances purent envoyer des agents en mission, avec charge de faire exécuter les mesures révolutionnaires, les réquisitions et les arrêtés de ceux qui les nommaient. Les représentants du peuple dans les départements étaient chargés d'assurer et d'accélérer l'exécution de la loi qui organisait le gouvernement révolutionnaire.

La loi du 12 germinal supprima, à partir du 1er floréal, le conseil exécutif et les six ministres qui le composaient, et qui étaient ceux de l'intérieur, de la guerre, des contributions publiques, de la justice, de la marine et dés affaires étrangères. Elle les remplaça par douze commissions exécutives, composées chacune de un ou deux membres, et de un ou deux adjoints; la commission des finances avait cinq membres et un adjoint. Ces commissions étaient celles; 1° des administrations civiles, police et tribunaux; 2° de l'instruction publique; 3° de l'agriculture et des arts; 4° du commerce et des approvisionnements; 5° des travaux publics; 6° des secours publics; 7° des transports, postes et messageries; 8° des finances; 9° de l'organisation et des mouvements de l'armée de terre; 10° de la marine et des colonies; 11° des armes, poudres et exploitation des mines; 12° des relations extérieures. Elles correspondaient avec le comité de Salut public et lui étaient subordonnées; il pouvait annuler on modifier leur opération. Les membres des commissions et les adjoints étaient nommés par la Convention, sur la présentation du comité de Salut public.

La loi du 11 thermidor an Il ordonna le renouvellement des comités par quart, tous les mois; un membre sortant ne pouvait être renommé qu'un mois après.

La loi du 7 fructidor an Il vint réorganiser les comités de la Convention; elle en établit seize, mais ne modifia pas le nombre des commissions exécutives, de sorte qu'il n'y eut pas de concordance exacte entre les commissions et les comités. Ces comités furent ceux de salut public, composé de douze membres; de sûreté générale, composé de seize membres; des finances, composé de quarante-huit membres; de législation, composé de seize membres; de l'instruction publique, composé de seize membres; de l'agriculture et des arts, composé de douze membres; du commerce et des approvisionnements, composé de douze membres; des travaux publics, composé de douze membres; des transports, postes et messageries, composé de douze membres; de la guerre, composé de seize membres; de la marine et des colonies, composé de douze membres; des secours publics, composé de seize membres; de division, composé de douze membres; des procès-verbaux, décrets et archives, composé de seize membres; des pétitions, correspondances et dépêches, composé de seize membres; et des inspecteurs du palais national, composé de seize membres. Le comité de Salut public conservait le rôle prépondérant : il avait la direction des affaires extérieures, la surveillance et l'organisation des forces de terre et de mer, et la confection ainsi que la surveillance de l'exécution des plans de campagne; il avait, en matière militaire, le droit de réquisition et celui d'arrestation, mais il devait s'entendre avec le comité de Sûreté générale pour traduire devant le tribunal révolutionnaire les agents militaires, et pour faire arrêter les fonctionnaires de l'ordre purement civil. Le comité de Sûreté générale avait la police de la République; il pouvait faire arrêter et traduire les citoyens devant le tribunal révolutionnaire et requérir la force armée; ses attributions s'exerçaient surtout à Paris. Les deux comités prenaient dans les deux mois une décision sur les personnes contre lesquelles ils avaient décerné des mandats d'amener et d'arrêt.

Les comités de la Convention ne déléguaient pas leurs pouvoirs, mais ils faisaient seulement exécuter leurs arrêtés; nul n'était membre de deux comités à la fois. Les commissions exécutives rendaient compte aux comités qui avaient le droit de suspendre on de destituer les fonctionnaires placés sous leur surveillance. Les comités se renouvelaient par quart tous les mois, et les membres sortants du comité de Salut public et du comité de Sûreté générale n'étaient immédiatement rééligibles ni à l'un ni à l'autre de ces comités. La Convention était arrivée aux affaires à un moment ou il n'y avait plus de gouvernement, et elle en arriva peu à peu à réaliser, par des mesures successives, le gouvernement direct par l'Assemblée elle-même. Cet état de fait fut consacré d'une façon régulière par la loi du 7 fructidor an Il; la constitution de 1793, qui ne fut jamais appliquée, ne modifia en rien les différentes situations que nous avons expliquées. La loi de fructidor, qui fut la dernière forme, et la plus complète, donnée au gouvernement révolutionnaire, fut appliquée jusqu'au 7 frimaire an III, jour où fut mise en vigueur la constitution du 5 fructidor an III.

Cette constitution fonctionna jusqu'au 9 novembre 1799 : elle fut renversée par le coup d'Etat du 18 brumaire an VIII. Le coup d'État accompli par le général Bonaparte mettait fin à la constitution de l'an III. On était décidé à faire dans la nouvelle constitution une plus large part au pouvoir personnel . L'acte du 19 brumaire fut le complément du coup d'Etat. Il nomma une commission consulaire et chargea les membres dociles du conseil des Anciens et du conseil des Cinq-Cents de préparer une nouvelle constitution qui fut promulguée le 22 frimaire an VIII; elle donnait le pouvoir au général Bonaparte, en créant un premier consul tout-puissant assisté de deux collègues effacés. Elle fut modifiée successivement par le sénatus-consulte du 46 thermidor an X qui organisa le consulat à vie et par celui du 22 floréal an XII qui créa l'Empire. 

Ces trois actes formèrent la constitution impériale qui fut en vigueur depuis le 18 mai 1804 jusqu'à la première abdication. L'acte additionnel du 22 avril 1815, publié après le retour de l'île d'Elbe, fut le dernier acte constitutionnel du premier Empire, qui tentait inutilement de se réformer. (GE).

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