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L'histoire des États-Unis
La Guerre de Sécession
I - Le déclenchement des hostilités
Histoire des Etats-Unis d'Amérique
Aperçu
Les premiers affrontements
L'encerclement du Sud Les grandes batailles
Grant et Sherman
Le parti républicain

Le bill du Kansas, au nom du principe nouveau de la Squatter Sovereignty (souveraineté du pionnier), laissait à la population des deux Territoires le soin de décider si l'esclavage serait établi ou non dans le Kansas et le Nebraska. Aussitôt les efforts des deux partis se portèrent sur le peuplement du Kansas, le Nebraska, situé plus au Nord, étant en fait hors de cause. Le territoire fut envahi par des maîtres d'esclaves du Sud et par des Yankees de la Nouvelle Angleterre et des États du Nord-Ouest. Une guerre civile éclata, localisée dans le Kansas, et se termina par la victoire des gens du Nord qui demandèrent l'admission du Kansas comme État avec une constitution interdisant l'esclavage (1856). De 1854 à 1856, la lutte étant rouverte entre les deux causes de la liberté et de l'esclavage, le parti anti-esclavagiste se reconstitua avec de nouveaux adhérents enlevés aux deux partis nationaux sous le nom de « parti républicain ». 

C'est à cette époque (20 mai 1856) que Sumner au Sénat fut assailli et à moitié assommé à coups de canne par Brooks de la South Carolina, que tout le Sud acclama comme un héros. Le nouveau parti réussit à faire élire un de ses membres président de la Chambre des représentants en 1855-56. Quant à la masse du parti whig, elle se fondit dans une organisation nouvelle, appelée le « parti américain » parce qu'elle avait pour objet la lutte contre les influences étrangères et spécialement contre l'influence du catholicisme, connue aussi sous le nom de « parti Know Nothing» à cause de ses allures de société secrète. Pour l'élection présidentielle de 1856, trois candidats se trouvèrent en présence, Buchanan pour le parti démocrate (avec le programme de 1852 et l'exaltation de l'act du Kansas-Nebraska), Fillmore pour le « parti américain » (même programme plus adouci) et Fremont pour le « parti républicain », avec un programme proclamant la nécessité absolue de la suppression dans les Territoires de ces deux vestiges de la barbarie, la polygamie et l'esclavage (la polygamie était en usage chez les Mormons, établis depuis quelques années dans le Territoire d'Utah). Buchanan fut élu par 174 voix contre 114 à Fremont et 8 à Fillmore. Le scrutin populaire donnait 1838 000 voix à Buchanan, 1 341 000 à Fremont et 874 000 à Fillmore. Ce n'était pas encore le succès pour le parti républicain, mais c'était pour les démocrates l'annonce d'une défaite prochaine. Les chefs de l'aile extrême des sudistes le comprirent et se préparèrent à la sécession, devenue, selon eux, inévitable. Buchanan, avec les voix de tous les États esclavagistes, avait encore obtenu celles de la Pennsylvanie, de l'Indiana, de l'Illinois et de la Californie
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James Buchanan.
James Buchanan.

Fremont avait en celles de onze des États libres. Deux nouveaux États libres furent admis dans l'Union, le Minnesota (1858) et l'Oregon (1859), et la controverse sur l'esclavage continua de faire rage au Kansas, dans le Congrès, dans la presse, dans toutes les réunions publiques, dans les législatures de tous les États. Elle inspira la Case de l'oncle Tom de Harriet Beecher Stowe (1857). Un grand nombre de législatures dans le Nord votèrent des lois locales pour empêcher l'action de la législation fédérale sur les esclaves fugitifs, comprise dans le compromis de 1850. Ces lois, appelées personal liberty laws, furent déclarées nulles par une décision que rendit le chief justice de la cour suprême, Taney, dans l'affaire du Noir Dred Scott (1857). Le parti démocrate se divisa, sur ces entrefaites, à propos d'un bill proposant l'adoption d'une nouvelle constitution rédigée à Lecompton (Kansas) par une minorité esclavagiste de la population du Territoire. Douglas devint le chef d'une des deux fractions du parti, Breckinridge celui de l'autre fraction, représentant les idées extrêmes du Sud. En 1859, John Brown, anti-esclavagiste du Kansas, fit une tentative armée contre l'arsenal fédéral de Harper's Ferry et appela les esclaves à la liberté. Arrêté par les autorités de Virginie, il fut condamné et pendu le 2 décembre 1859. On sait l'immense sensation causée dans tout le pays et en Europe par cette exécution. L'administration de Buchanan ne vit pas la fin de l'imbroglio du Kansas, qui ne se dénoua qu'en janvier 1861, par l'admission du Kansas comme État libre. 
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Johns Brown, par Hovenden.
Les derniers moments de John Brown (1800 -1859).
Tableau de Hovenden, Metropolitan Museum of Art, New York.

La Confédération sudiste.
A ce moment, les membres sudistes du Congrès avaient quitté Washington, l'élection présidentielle de l'année précédente (1860) ayant consommé la rupture de l'Union. Cette fois, quatre candidats étaient en lice, Breckinridge pour les sudistes déterminés, Douglas pour les démocrates unionistes, Bell pour le « parti américain-», devenu le « parti de l'Union constitutionnelle », et Abraham Lincoln, pour les républicains, parti strictement nordiste. Le programme républicain de 1860 n'était nullement abolitionniste; il reconnaissait le droit des États de régler chacun pour eux la question de l'esclavage, mais déclarait que la liberté étant une condition naturelle, ni le Congrès, ni une législature locale, ni personne n'avait le droit d'établir l'esclavage dans un Territoire des États-Unis. Lincoln eut les voix électorales de tous les États libres, soit 189, contre 39 à Bell, 12 à Douglas et 72 à Breckinridge, soit une majorité de 66 contre ses trois concurrents. Le vote populaire donnait 1 866 000 voix à Lincoln, 994 000 à Douglas, 669 000 à Breckinridge, 575 000 à Bell. Le vote total ayant été de 4 680 000 voix, Lincoln ne réunissait pas tout à fait la moitié des suffrages populaires, mais le collège électoral le faisait président de l'Union. Les « hommes des droits du Sud » qui, depuis plusieurs années, soit dans les grandes administrations publiques autour du président Buchanan, soit dans les États esclavagistes, avaient tout préparé pour cette éventualité, ne perdirent pas de temps pour mettre leurs desseins à exécution. Six semaines après l'élection, une convention populaire dans la Caroline du Sud vota une ordonnance de sécession (20 décembre 1860). Elle stipilait :

« l'Union existant actuellement entre la Caroline du Sud et les autres États, sous le nom d'États-Unis d'Amérique, est dès à présent dissoute ». 
La résolution était fondée sur divers considérants, entre autres sur l'affirmation que quatorze États avaient formellement refusé, depuis de longues années, de remplir leurs obligations constitutionnelles (loi sur la reddition des esclaves fugitifs). Les autres États esclavagistes suivirent bientôt l'exemple de la Caroline du Sud. Le Mississippi sortit de l'Union le 9 janvier 1861 la Floride le 10, l'Alabama le 11, la Géorgie le 19, la Louisiane le 26, le Texas le 1er  février. Dans tous ces États, les douanes, les arsenaux, les forts et tous autres établissements fédéraux furent saisis par les séparatistes. Quelques forts seulement, comme celui de Sumter à Charleston, restèrent aux mains des garnisons fédérales.  Le 4 février 1861 un Congrès séparatiste, composé de délégués de la Caroline du Sud, de la Géorgie, de la Floride, de l'Alabama, du Mississippi et de la Louisiane, se tint à Montgomery (Alabama) et choisit pour président Howell Cobb, ex-ministre des finances de l'Union. Ce Congrès forma une constitution pour les « États confédérés d'Amérique ».  La constitution sudiste ne différait que par quelques points de l'instrument fédéral; les ministres, ou premiers agents des départements du pouvoir exécutif, pouvaient siéger dans les deux Chambres. Il était interdit au gouvernement d'établir aucun droit à l'importation pour encourager ou protéger une branche d'industrie. Jamais il ne serait porté atteinte, dans aucun des États confédérés, au droit de propriété sur les esclaves.  L'institution de l'esclavage était de droit dans les nouveaux Territoires. Le président de la constitution, élu pour six ans par le Congrès confédéré, ne serait pas rééligible. 

Le Congrès élut, à l'unanimité, pour président, Jefferson Davis, et pour vice-président Alexandre H. Stephens. Cette élection avait eu lieu immédiatement après l'adoption de la constitution provisoire, et Jefferson Davis était installé le 18 février, quinze jours avant son rival du Nord, Abraham Lincoln. Les ministres furent Toombs, Memminger, Walker, Reagan, Mallory, Benjamin. Une armée confédérée fut organisée et placée le 3 mars sous le commandement du général Beauregard.

Les premiers combats
Jefferson Davis, investi du pouvoir suprême par la majorité de ses concitoyens du Sud, agit dès les premiers jours de sa présidence avec la plus grande énergie. Sur la nouvelle que le gouvernement fédéral avait annoncé l'intention de ravitailler la petite garnison du fort Sumter (îlot rocheux à l'entrée de la rade de Charleston), il donna l'ordre au général Beauregard d'attaquer la forteresse. Le bombardement eut lien le 12 avril 1861, et le major Anderson, à court de munitions, dut capituler le même jour.

Le 17 avril, une Convention réunie à Richmond votait la sécession de la Virginie qui avait hésité jusqu'alors. Des miliciens et des volontaires virginiens marchèrent aussitôt sur l'arsenal de Harper's Ferry (Potomac) et sur le port militaire de Norfolk (Elisabeth River, baie de Chesapeake), deux postes fédéraux que leurs garnisons abandonnèrent après avoir tout incendié ou détruit. Le gouvernement fédéral n'était plus séparé de la rébellion que par le Potomac. Il faillit même se trouver bloqué à Washington. Le 19 avril, en effet, les autorités de Baltimore, favorables aux sudistes, coupèrent les ponts du chemin de fer et les fils du télégraphe. Les communications furent interrompues pendant huit jours entre Washington et le Nord; le président Lincoln était prisonnier des ennemis de la République, dont fourmillait la capitale fédérale. Butler dénoua cette situation dangereuse en débarquant le 25 avril des régiments du Massachusetts à Annapolis. Il s'empara de Baltimore sans coup férir, et, dès le 15 mai, la ville de Washington, occupée par des troupes suffisantes, était à l'abri d'un coup de main. Le gouvernement sécessionniste, voulant se rapprocher de la capitale fédérale, s'était transporté de Montgomery à Richmond que 120 km à peine séparaient de Washington; la capitale de la Virginie devint la capitale de la Confédération du Sud, et le Congrès de la sécession y fut convoqué pour le 20 juillet.

Les États-Unis ne possédaient que 15 000 hommes de troupes régulières, dispersées sur les points extrêmes du territoire, et dont une grande partie se joignit au mouvement sudiste. Aussi, les confédérés, au début de la lutte, semblaient-ils avoir de nombreux avantages, les meilleurs officiers, une population habituée aux armes, une grande abondance de matériel et de munitions, grâce à la trahison du ministre de la guerre, Floyd, et du ministre de la marine de Buchanan. Ils avaient pris possession de plus de 40 millions de dollars de propriétés fédérales, et mis eu campagne environ 20 000 hommes, dont plus de la moitié en Virginie, sur une ligne irrégulière, de Harper's Ferry à Norfolk. Jefferson Davis envoya en Russie et en Belgique deux délégués (Mason et Slidell) pour demander la reconnaissance du nouvel État américain, fit éteindre tous les feux sur les côtes depuis Hampton Roads (embouchure de la James River) jusqu'au rio Grande, et délivra des lettres de marque pour faire la course contre la marine fédérale.

Dès le 15 avril, Lincoln avait appelé sous les armes 75 000 miliciens, et convoqué le Congrès en session extraordinaire pour le 4 juillet. Le général Scott, âgé de soixante-quinze ans, fut nommé commandant en chef de l'armée fédérale, qu'il dut organiser avant de songer à la conduire à l'ennemi. Tout était à créer on plutôt à recréer; l'administration militaire existait à peine, les arsenaux et magasins du Nord étaient démunis, les états-majors faisaient défaut, un assez grand nombre des officiers sortis de l'école militaire de West Point étaient allés offrir leur service au gouvernement confédéré (200 environ sur 950), parmi eux, le colonel Lee, chef d'état-major de Scott, Virginien comme son chef, et l'un des officiers les plus distingués de l'armée américaine. Les milices du Massachusetts et de la Pennsylvanie, avec des volontaires organisés à la hâte dans les États du Nord, formèrent le noyau de l'armée fédérale. Le 3 mai, une nouvelle proclamation de Lincoln appela 82 000 volontaires (64 000 pour l'armée de terre et 18 000 pour la marine) dont l'enrôlement devait être fait pour la durée de la guerre. La forteresse de Monroe (baie de Chesapeake) fut ravitaillée, les ports du Sud déclarés en état de blocus. A cette même date, Beauregard, appelé au commandement de l'armée sudiste, occupait, en Virginie, des positions faisant face à Washington avec 25 000 hommes. A la fin du mois, les troupes fédérales commencèrent à franchir le Potomac, occupant les hauteurs d'Arlington, Alexandria, sur la rive droite du fleuve, et bientôt Centreville et Fairfax, à quelque distance au Sud. Ces troupes étaient commandées par le général Mac Dowell, Scott gardant la capitale et son camp retranché.

Les unionistes, dès le début, avaient attaché une grande importance à la possession de la partie de la Virginie située au delà des montagnes, à cause du chemin de fer Baltimore and Ohio, qui commandait les communications entre l'Ouest et Washington. Le colonel Kelley, avec une troupe de fédéraux, tenait Wheeling en mai. Là se réunit, à l'automne, une Convention qui décida la séparation entre cette région restée fidèle à l'Union et la Virginie sécessionniste. Le vote populaire ratifia la séparation, une constitution fut rédigée, et la Virginie occidentale fut admise comme État dans l'Union en juin 1863.

Le premier combat, en rase campagne, de la guerre civile, fut livré à Philippi, où le colonel Kelley battit les confédérés, ce qui le rendit maître du chemin de fer (3 juin). Les confédérés furent encore battus à Romney le 11 juin; ils durent évacuer Harper's Ferry et reculer à Winchester, où Joseph C. Johnston vint se mettre à leur tête. Patterson, avec 14 000 fédéraux, traversa le Potomac et s'établit à Martinsburg; Mac Clellan et Rosecrans infligèrent encore quelques défaites aux sudistes; au milieu de juillet, les troupes du Sud avaient évacué le territoire de la Virginie occidentale. Cette suite de succès allait être bientôt effacée par le premier revers important des fédéraux.

La 4 juillet, le Congrès fédéral se réunit à Washington; on connaissait déjà les déclarations de neutralité de l'Angleterre (mai) et de la France (juin). Le Congrès approuva l'appel de milices et de volontaires fait par le président, et l'autorisa à constituer une armée de 500 000 hommes. Toutes les propositions financières du secrétaire du Trésor, Chase (impôts et emprunts), furent adoptées.

Bull's Run.
L'opinion publique, un peu fatiguée de la longueur des préparatifs, réclamait une action vigoureuse. Depuis plus de deux mois, fédéraux et sudistes étaient en présence à Manassas, sur les bords du ruisseau Bull's Run. Le 17 juillet, Mac Dowell reçut l'ordre d'attaquer l'ennemi. Une partie de la population de Washington vint entourer le champ de bataille, pour assister, comme à un spectacle, à la déroute présumée des confédérés. Mais ce furent les fédéraux qui durent prendre la fuite. L'arrivée opportune de Johnston avec 6 000 hommes (venant de Winchester) eu secours de Beauregard, assura la victoire aux sudistes. Cette première bataille de Bull's Run (21 juillet) fut suivie d'une véritable débandade de l'armée fédérale jusqu'à Washington.

Jefferson Davis ne fit pas poursuivre ce grand succès. Peut-être ne le pouvait-il pas, les provisions et toute organisation administrative faisant encore défaut. La capitale fédérale serait peut-être tombée sans combat entre les mains de Beauregard, s'il avait pu franchir le Potomac à la suite des fuyards. Tout au moins le président sudiste, qui avait assisté à la fin de la bataille, envoya-t-il dans les États sécessionnistes un message pompeux de victoire qui excita un enthousiasme extrême dans toute la Confédération.

La campagne de la James River.
Mac Clellan, âgé de trente-cinq ans, remplaça Mac Dowell à la tête de l'armée vaincue, puis, en novembre, fut nommé commandant en chef des armées de la République après la retraite du général Winfield Scott. Il consacra l'automne et l'hiver à organiser et à discipliner son armée qui, en mars 1862, s'élevait à 150 000 hommes répartis en corps d'armée, divisions et brigades, et présentait un aspect réellement martial. Beauregard à Manassas, pendant ces neuf mois, s'entoura de retranchements qui faisaient vis-à-vis à ceux de l'armée de Mac Clellan. Le 5 mars 1862, il fut transféré du commandement de l'armée de Virginie à celui de la division du Mississippi, et son successeur fut le général Joe Johnston, le vrai vainqueur de Bull's Run.

Johnston, dès le 9 mars, évacua les lignes de Menassas et se replia sur Richmond. Il avait reçu avis du projet de Mac Clellan, de transporter la plus grande partie de son armée au sud de cette ville, sur la rive droite de la James River. Mac Clellan fit immédiatement embarquer ses troupes à Alexandria pour Fort Monroe, poste fédéral situé à l'extrémité de la presqu'île du York et de la James. Le plan primitif comportait une attaque directe sur Richmond par une flottille remontant la rivière James, tandis que les troupes s'avanceraient sur les deux rives. Mais comme le Merrimac, ancienne frégate fédérale que les confédérés avaient recouverte de fer et armée de canons de gros calibre, venait de couler deux frégates dans la rade de Hampton Roads et n'était rentré à Norfolk que devant l'apparition du Monitor, petit bâtiment cuirassé à tourelle appartenant à la flotte fédérale, Mac Clellan résolut de tenter une opération par la rive septentrionale de la James. L'armée fédérale s'ébranla le 4 avril, franchit le 4 mai, après un mois de siège, les retranchements de Yorktown, et, le lendemain, délogea, de Williamsburg, après un très vif combat, l'armée confédérée qui dut se replier sur Richmond. Mac Clellan établit ses troupes (16 mai) sur les deux rives du Chickahominy (affluent de la rive gauche de la James River). Il avait donné rendez-vous en ce point à trois corps fédéraux convergeant de trois directions différentes, Fremont des montagnes virginiennes, Banks de la vallée de Shenandoah et Mac Dowell de Fredericksburg. Mais le général confédéré Stonewall Jackson portait en ce moment même l'épouvante dans le Nord par une pointe d'une extrême hardiesse qui remit un moment en ses mains Harper's Ferry. Mac Dowell fut appelé à la défense du Potomac, les deux autres colonnes tenues immobiles. Jackson, au contraire, put se dérober, échapper aux forces qui le cernaient, et arriver à temps sur le champ de bataille où Mac Clellan et Johnston étaient aux prises.

Johnston avait fait évacuer Norfolk et tous les postes détachés en aval de Richmond. Le 31 mai, il livra une bataille furieuse à l'aile gauche de l'armée fédérale, à Fair Oaks. La lutte dura deux jours, fut très meurtrière, mais non décisive. Le 2 juin, les deux armées avaient repris leurs anciennes positions. Johnston, grièvement blessé à Fair Oaks, était remplacé par le général  Robert Lee, le descendant d'une des familles les plus célèbres de la Virginie, gendre de Custis qui était fils adoptif de Washington. Renforcé par Beauregard et par Jackson, Lee, le 26 juin, attaqua Mac Clellan sur le Chickahominy, au moment où le général fédéral préparait une marche de flanc pour se rapprocher de la James River. L'effort des confédérés porta, dans cette première journée, appelée bataille de Mechanicsville, sur l'aile droite de l'armée fédérale, qui fut battue et rejetée sur Gaines' Mill, où une seconde bataille fut livrée le lendemain 27. Sous les efforts combinés de Lee, Longstreet, Hill et Jackson, les troupes nordistes furent complètement battues.
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Robert Lee.
Robert Lee.

Mac Clellan opéra cependant une habile retraite, repoussa les confédérés à Savages Station et à White Oak Swamp (29 et 30 juin) et rallia ses troupes à Harrison's Landing sur la James River, où il retrouva l'appui des canonnières fédérales et un ravitaillement facile. Les confédérés avaient tenté encore contre les lignes de Mac Clellan, le 1er juillet, à Malvern Hill, une attaque qui fut aussi sanglante qu'inutile. Lee ramena toutes ses forces dans les retranchements de Richmond. Mac Clellan disposait sur la James River de 24 chaloupes canonnières, de 3 bâtiments cuirassés, d'une flottille à mortiers et de nombreux transports entre Newport News et Harrison's Landing. C'était peut-être l'occasion d'une audacieuse irruption de bâtiments forçant les passages à toute vapeur, et bravant le feu des batteries placées sur les rives. C'est par ces moyens que le Mississippi devait être conquis sur la Confédération; l'entreprise ne fut pas tentée sur la James.

A Washington, le gouvernement, effrayé, ne songeait qu'à concentrer toutes ses forces pour la défense de la capitale. Les trois corps de Fremont, de Banks et de Mac Dowell furent réunis en une seule armée sous le commandement du général Pope qui, menacé par Jackson sur son aile droite, recula au Nord du Rappahannock. Mac Clellan reçut l'ordre de ramener son armée sur le Potomac et évacua Harrison's Landing le 16 août. Sur le Rappahannock, Pope, pris entre Lee qui l'attaqua en tête, et Jackson qui, par un détour du côté des montagnes, menaçait le flanc droit et les lignes de communication de l'armée fédérale, Lutta avec vigueur le 28 et 29 août, mais fut écrasé le 30 à la seconde bataille de Bull's Run. Les débris de l'armée fédérale durent chercher un refuge sous les fortifications de Washington, avant abandonné à l'ennemi les approvisionnements et l'artillerie. Mac Clellan, qui venait d'arriver de la baie de Chesapeake, recueillit ces débris dans les rangs de son armée encore solide et vaillante, et reçut le commandement en chef de toutes les forces fédérales. Il lui fallait tenir tête à l'invasion du Maryland tentée par les confédérés après leur seconde victoire de Bull's Run.

Lee ne pouvait songer à aborder de front la capitale fédérale; il résolut de la tourner par les vallées du Blue Ridge. Le 12 septembre, Jackson attaqua Harper's Ferry, tandis que les corps de Hil et Longstreet passaient le Potomac et s'avançaient jusqu'à Frederick à 70 kil. de Washington. Mac Clellan avait eu le temps de disposer ses troupes en tel ordre que les généraux confédérés reconnurent la nécessité de rentrer en Virginie. Ils ne purent le faire qu'en repoussant l'assaut violent que leur livra le 17 septembre (bataille d'Antietam) toute l'armée de Mac Clellan. Malgré les résultats indécis de cette journée meurtrière, les confédérés se hâtèrent de repasser le 19 au Sud du Potomac. Mac Clellan établit son quartier général à Harper's Ferry. Le dernier incident de la campagne fut un raid, du général de la cavalerie sudiste, Stuart, le 8 octobre, en Pennsylvanie jusqu'à Mercersburg.

La guerre dans l'Ouest. Shiloh

Dès le début de la guerre, le gouvernement sécessionniste, maître de l'embouchure du Mississippi et de son cours inférieur par la Nouvelle-Orléans et la Louisiane, fit de grands efforts pour s'assurer le haut cours du fleuve et gagner à sa cause les trois grands États du Tennessee, du Kentucky et du Missouri. Les gouverneurs, dans ces trois États, étaient de coeur avec le Sud, mais non les législatures. Du moins, les opinions étaient aussi divisées dans la représentation que dans le peuple même. Les milices sudistes du Tennessee s'emparèrent de Memphis, celles du Kentucky de Columbus, mais dans le Missouri un coup de main sur l'arsenal fédéral de Saint-Louis fut déjoué par le général Lyon. Les secours arrivèrent promptement des États voisins du Nord fidèles à l'Union. Des milices de l'Illinois occupèrent Cairo; le général Ulysses Grant entra dans le Kentucky à la tête des milices de l'Indiana et de l'Ohio.
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Ulysses Grant.
Ulysses Grant.

Sur la rive droite du Mississippi, une petite armée de sudistes, formée de volontaires du Missouri, de l'Arkansas et du Tennessee battit les fédéraux; le général Lyon fut tué. Fremont, nommé commandant en chef des troupes fédérales du haut Mississippi, s'établit à Saint-Louis; mais, ayant lancé intempestivement, au jugement des autorités de Washington, une proclamation sur l'affranchissement des esclaves, il fut remplacé par le général Halleck. Prise, chef des confédérés du Missouri, fut aisément contenu et peu à peu rejeté dans l'Arkansas.

Sur la rive gauche, le Kentucky servait de champ de bataille aux troupes des deux partis. Grant, établi à Cairo et à Paducah sur le bas Ohio, résolut d'attaquer les forts Henry et Donelson, qui commandaient les deux rivières de Cumberland et de Tennessee, à peu de distance de leur confluent avec l'Ohio. Du 6 au 15 février 1862, il s'en empara avec l'aide d'une flottille de canonnières commandée par Foote. Les confédérés laissaient 13 000 prisonniers aux mains  des fédéraux, et le Kentucky était conservé à la cause fédérale. Grant, poursuivant sa victoire, marcha immédiatement vers le Sud, entra dans le Tennessee et occupa, le 24 février, sans combat, la capitale de l'État, Nashville. Pendant ce temps, le général sudiste, Polk, ancien évêque, était obligé d'abandonner Columbus à l'approche des canonnières de Foote, et de se retirer jusqu'à Memphis, en brûlant partout les provisions de coton. Beauregard, appelé au commandement de l'armée confédérée du Mississippi, concentra 60 000 hommes à Corinth, au Sud du Tennessee, centre de chemins de fer, et y établit un camp retranché.
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Chute du Fort Donelson.
Chute du fort Donelson.

Price et les autres généraux confédérés de la rive droite du Mississippi, repoussés dans l'Arkansas, y furent battus à Pea Ridge par le général nordiste Curtis. Foote et ses canonnières, descendant le Mississippi, délogèrent encore les confédérés de New Madrid (rive droite, au Missouri), mais se trouva (15 mars) arrêté devant l'île n° 10, qu'il dut assiéger en règle avec l'aide du général Pope. Il creusa un canal entre les deux extrémités d'une courbe du fleuve, et put ainsi tourner les ouvrages de l'ennemi. Le 7 avril, les défenseurs de l'île n° 10 capitulèrent, et les canonnières de Foote furent maîtresses de tout le cours supérieur du Mississippi jusqu'à Memphis.

Dans le Tennessee, Grant et Buell s'étaient mis en mouvement pour opérer leur jonction sur la rivière Tennessee, derrière laquelle se tenait Beauregard. Le général Halleck, commandant en chef, avait lui-même quitté Saint-Louis pour rejoindre ses deux généraux. Grant, arrivé le premier, passa le Tennessee à Pittsburg Landing, et attendit le corps de Buell. Mais il fut attaqué dans cette position le 6 avril par les sudistes (Johnston et Beauregard) et presque jeté dans la rivière à la fin de la première journée (bataille de Shiloh). La présence de deux canonnières fédérales et l'arrivée des troupes de Buell sauvèrent l'armée de Grant. Le lendemain 7, la bataille recommença; les troupes fraîches de Buell décidèrent la victoire en faveur des Nordistes. Beauregard ramena ses troupes épuisées dans le camp retranché de Corinth, d'où il se tenait en communication avec les troupes confédérées et les canonnières sudistes réfugiées à Memphis et au fort Pillow qui protégeait cette ville.

Halleck, avant rejoint Grant et Buell, prit le commandement supérieur et bloqua Beauregard dans Corinth. Le général confédéré, craignant de se voir coupé de toutes communications, évacua la place le 30 mai 1862. Une partie de ses troupes fut dirigée sur la place forte de Vicksburg (rive gauche du Mississippi, en aval de Memphis); il emmena le reste à Richmond, où les confédérés étaient vivement serrés par Mac Clellan. Depuis le 10 mai, les canonnières fédérales avaient forcé let confédérés à abandonner le fort Pillow. Le 6 juin, ils durent encore évacuer Memphis après la destruction de presque toute la flottille sudiste, et les canonnières fédérales, descendant le fleuve, ne furent plus arrêtées que par la place de Vicksburg .

Bataille de la Guerre de Sécession.
Un épisode de la Guerre de Sécession : la bataille de Caine's Mill, en Virginie (27 juin 1962).
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