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L'empire
du Bunyoro-Kitara et ses voisins
Le Bunyoro-Kitara.
Le mythe de fondation raconte les premiers
temps du royaume de Bunyoro-Kitara. La dynastie divine des Tembuzi est
au pouvoir. Ces dieux civilisateurs, ils apportent la culture du café,
de la poterie, des étoffes d'écorces, la métallurgie du fer et les fortifications
de terre. Ils instaurent aussi des institutions centralisées, qui prennent
le pas sur l'organisation clanique préexistante. Cette dynastie
est remplacée ensuite par celle - peut-être encore légendaire - des
Chwezi. L'histoire connue commence véritablement avec l'arrivée par vagues
successives à partir du début du XVIe
siècle de populations Luo (nilotiques)
originaires du Sud-Est du Soudan actuel. Empruntant leur rituel et leurs
pratiques aux locaux (disons les Chwezi), un de ces groupes, les
Bito, fonde la dynastie Luo-Babito. Celle-ci restera au pouvoir jusqu'au
XXe
siècle. Entre-temps, le Bunyoro aura connu des heures de gloires
et les prémices de sa dislocation. Au XVIIe
siècle la souveraineté des Bito s'étend sur presque tout
l'Ouganda actuel. La politique d'expansion se heurte cependant à la fin
du XVIIe siècle
à la résistance du Rwanda voisin. Une défaite militaire abouti à une
crise intérieure, puis au recul de la puissance impériale tout
au long du XVIIIe
siècle. Et, alors que la puissance de Rwanda peut commencer,
le Bunyoro (Ounyoro) commence à se morceler - il ne comptera plus que
quelques centaines de milliers d'habitants au début de sa colonisation
par les Européens. Les confettis de cet empire, gouvernés par des dynasties
apparentées forment les royaumes comme le Toro, qui fait sécession vers
1830,
Ankolé, Karagwé et surtout, sur les rives du Lac Victoria, le Buganda,
qui devient au milieu du XIXe
s. la puissance dominante de la région.
Le Buganda.
Le Buganda existe en tant qu'entité politique
et géographique, et centre de rivalités incessantes, depuis le XVe
siècle. Mais jusqu'à son émancipation à la fin du XVIIIe
siècle, ce n'est qu'un vassal de l'empire Bunyoro. Grâce au
déclin de ce dernier et à la mise en place d'une politique de contrôle
des routes commerciales utilisées par les Arabes des villes Swahili de
la côte orientale, il suffira de quelques décennies pour que le Buganda,
devenu une monarchie absolue, affirme son leadership.
Moeurs
royales - "Souverain absolu, intouchable et sacré, le roi du Buganda,
- le kabaka - était élu, bien qu'il fût généralement le fils du précédent
monarque . Les autres prétendants au trône, candidats malheureux, étaient
emprisonnés ou exécutés. La reine-mère, la soeur de la reine, et surtout
la première épouse (il en avait plusieurs centaines!) avaient une grande
influence. Autour du roi qui créait les fiefs, les distribuait,
les confisquait, condamnait à mort, il y avait un Conseil des grands chefs
ou grands dignitaires. [C'était eux qui] levaient les impôts et conduisaient
les armées." J. Milley, Y. Thoraval, Kenya, Afrique des Grands Lacs,
Ed. du Seuil, coll. Petite planète, 1980.
La clé aura été ici, une fois de plus,
l'équation si fréquemment rencontrée dans cette part de histoire africaine
qu'est l'histoire de la traite des esclaves : des armes à feu apportées
par les Arabes, contre des esclaves, capturés au bénéfice de l'expansion
du royaume, et acheminés vers les villes de la Côte
orientale et Zanzibar, ou financiers indiens et négociants européens
sont implantés. Les Arabes n'y pénétrèrent qu'au XIXe
siècle par le Sud (marché de Tabora),
au temps du roi Sinna (1836-60). Sous son successeur Mutesa Ier
(Mtésé)
parurent les Européens.
Mutesa Ier,
né vers 1842,
mort en 1884
avait succédé à son père Sinna, vers 1860.
Il fit la conquête des pays situés à l'Ouest du lac Victoria. Speke
et Grant, qu'il a bien accueillis en 1862,
l'ont représenté comme « un aimable jeune homme »; ils ont cependant
décrit les sacrifices humains qui constituaient un des plaisirs du roi.
A
partir de 1869, plusieurs expéditions
anglo-égyptiennes conduites depuis le Nord par Charles
Gordon, alors gouverneur général du Soudan,
se
heurtent aux armes modernes des Bugandais et échouent. Les tensions s'apaiseront
assez vite. Quand le colonel Chaillé-Long
est envoyé auprès de Mutesa par Gordon en 1874, il est assez bien reçu.
Le roi fait même massacrer trente de ses sujets devant lui, pour lui faire
honneur, dit-il (à moins que ce ne soit pour faire preuve de sa détermination...).
L'année suivante, Mutesa recevra simultanément un autre envoyé de Gordon,
Linant
de Bellefonds, et Stanley, venu du Zanzibar
en 1875.
Il leur fit cette fois le meilleur accueil. Tous deux furent frappés de
la dignité de Mutesa; sous l'influence des immigrants musulmans, il avait
adopté le costume arabe et se montrait fort doux. Il facilita la continuation
du voyage de Stanley; le voyageur crut même avoir presque décidé le
roi à se convertir au christianisme. Des missions, l'une protestante,
en 1877,
l'autre catholique, en 1879,
furent fondées dans l'Ouganda et réussirent des conversions conversions,
mais sans pouvoir mettre le roi au nombre de leurs prosélytes.
En 1877,
Mutesa reçut Emin Bey, envoyé de Gordon. Il échangea quelques lettres
avec le sultan de Zanzibar, et en 1879
chargea les missionnaires Wilson et Felkin de porter une lettre à la reine
Victoria. Jusqu'à sa mort, il ne cessa de se montrer plutôt bien disposé
pour les missionnaires, sans manifester d'inquiétude contre les projets
des blancs. C'est des Égyptiens seuls qu'il redoutait l'invasion, et les
relations amicales qu'il entretint avec les envoyés du gouverneur du Soudan
furent toujours empreintes d'une certaine défiance.
La situation change
avec le successeur de Mutésa, son fils Mouanga. Celui-ci, parvenu au trône
en octobre 1884,
se trouve d'emblée confronté à aux bouleversements qui secouent le Nord,
avec la révolte du Mahdi au Soudan,
qui dès 1883 a fermé la route du
Nord. Les expéditions vers les Grand Lacs reprendront avec plus de succès
depuis Mombasa et Dar-es-Salaam.
Mais cette fois ce sera au prix d'une compétition entre Allemands et Anglais
dans la région ( Zanzibar
et la côte swahili). Les Allemands vont remporter la partie
au Tanganyika, et les Anglais vont dès lors devoir se rabattre sur l'Ouganda.
Ils s'attacheront à le déstabiliser à leur avantage autant que possible.
Résulta immédiat : Mouanga commença à se montrer très mal disposé
pour les missionnaires chrétiens, voyant en eux les précurseurs d'une
invasion européenne.
En octobre 1885,
il fit assassiner l'évêque anglican Hannington qui, malgré les conseils
de ses confrères, avait voulu pénétrer dans l'Ouganda par la route de
l'Est (d'où devait venir, d'après une légende, un ennemi qui ferait
la conquête du royaume), et qui persista à ne pas reprendre la route
de la côte en dépit des ordres du roi. Tout rapport fut interdit aux
missionnaires avec les chrétiens indigènes. Enfin, en mai 1886,
ceux-ci furent massacrés en grand nombre. Mouanga ne permit cependant
que quelques mois plus tard aux missionnaires anglais de quitter l'Ouganda.
Également hostile aux chrétiens
comme aux musulmans ,
qu'il voulut exterminer les uns et les autres, il fut chassé en septembre
1888
par une révolution; il se réfugia à la mission catholique de l'île
de Sese. Il fut remplacé par ses frères, Kiwewa, puis Kalema. Les musulmans
qui régnaient sous leur nom ayant expulsé les chrétiens, ceux-ci s'allièrent
à Mouanga, qu'ils replacèrent sur le trône (octobre 1889),
et qui, sans se convertir au catholicisme, jugea utile de se dire disposé
à le faire. En 1889, Jackson, agent
de la Compagnie britannique de l'Afrique orientale, lui envoya un pavillon.
L'année suivante, il conclut avec le docteur Peters un traité par lequel
il se plaçait sous le protectorat de l'Allemagne. Jackson, arrivant peu
après, protesta contre ce traité, dont l'Allemagne a renoncé à se prévaloir.
L'Ouganda ayant été placé dans la sphère
d'influence britannique, par le traité du 1er
juillet 1890, le capitaine Lugard,
représentant de l'I. B. E. A (= Imperial British
East African Association), s'y rendit et obtint de Mouanga,
le 24 décembre, malgré la répugnance du roi pour la domination anglaise,
la conclusion d'un traité avec la compagnie. L'opposition manifestée
par les indigènes catholiques contre ce traité et la préférence marquée
aux protestants par Lugard amenèrent une guerre civile sanglante, dans
laquelle les agents de la compagnie se montrèrent d'une grande brutalité
contre les missionnaires français (janvier 1892).
Le roi, qui s'était enfui avec les catholiques dans le Bouddou, fut rappelé
par Lugard; le 30 mars, il signa à Mengo, sa résidence, un nouveau traité
de protectorat. Il n'a plus été par la suite qu'un instrument aux mains
des agents de l'I.B.E.A., puis des représentants du gouvernement britannique
(substitué à la compagnie le 19 juin 1894,
à la suite de la rébellion des musulmans, de concert avec les Soudanais
du cap Macdonald, en 1893).
Le Buganda n'en disparaîtra pas pour autant. Et l'on peut même relever
pour l'anecdote, qu'après l'accession à l'indépendance de l'Ouganda,
en 1962, sont premier président élu
ne sera autre que le dernier kabaka du Buganda, Mutesa II (Mutexi Luwangula
Mutesa)...
-
Sur
les bords du lac Tanganyika.
Les États Hima.
Cette partie de l'Afrique en est l'une
des plus densément peuplées. Un des raisons qui peut être cherchée
dans l'histoire est qu'elle a été traditionnellement un refuge.
Rwanda, Burundi et quelques uns des autres petits États qui ont pu les
environner sont apparus comme des centre de solidarités villageoises,
analogues à celles que l'on a pu aussi rencontrer chez les Kabyé du Togo
contre la traite esclavagiste. Ni le Rwanda, ni le Burundi, contrairement
à quelques-uns de leurs voisins plus puissants n'ont participé à ce
commerce.
-
Hutu et Tutsi
Il n'est pas possible
dans ces pages, dont la seule ambition est de poser des repères chronologiques,
de faire un sort à une imposture historique installée dès l'époque
coloniale, et si tragiquement active désormais dans les populations concernées
elles-mêmes, un imposture qui fait des Hutu et des Tutsi deux supposés
"ethnies", dont l'opposition ancestrale pourrait suffire à expliquer,
quand ce n'est pas à justifier, les conflits et les massacres qu'ont connu
depuis 1962 le Rwanda et le Burundi.
On signalera simplement
que l'opposition Hutu/Tutsi, telle qu'elle se présentait avant la colonisation,
était avant tout l'expression d'une structuration sociale duale, dont
les modalités ont d'ailleurs été très diverses d'une région à une
autre. La catégorie Tutsi (= Hima) se réfère à une frange de la population
à vocation pastorale. Initialement, le mot semble-t-il ne servait qu'Ã
désigner une personne qui possédait un riche troupeau, et ne correspondait
donc même pas à une catégorie sociale particulière. La catégorie Hutu
(= Iru) désigne la frange à vocation agricole de la même population,
vivant sur le même territoire. Il n'y a bien sûr qu'une seule langue,
et un système de croyances partagé, puisque la distinction s'opère Ã
l'intérieur même d'une société unique. Il n'y a pas de Tutsi sans Hutu,
ni de Hutu sans Tutsi.
Le mode de fonctionnement
de cette société a traditionnellement été de nature féodale
et clientéliste - le bétail est prêté aux Hutus en échange d'une redevance
en récoltes. Les classes dirigeantes se sont recrutées chez les familles
les plus riches, donc parmi les Tutsi. Mais il n'y a jamais eu une séparation
étanche entre les deux catégories, puisque des temps immémoriaux des
mariages existent entre les membres des deux fractions, même si - surtout
depuis la fin XIXe siècle - l'on tend comme partout ailleurs Ã
se marier à l'intérieur de sa classe sociale. |
Rwanda
- L'archéologie fait remonter l'histoire du Rwanda très loin dans le
passé. La métallurgie du fer y était connue dès le troisième siècle
avant notre ère. Mais le récit de cette histoire ne peut être fait qu'Ã
partir de 1506. Le Rwanda est alors une petite chefferie. Une organisation
militaire et un pouvoir royal fort et structuré s'installent alors sous
la conduite de familles de pasteurs-guerriers Tutsi. Des raids
sur les territoires voisins, de véritables guerres, et parfois simplement
la lente infiltration des populations dans les régions adjacentes
conduisent à une inexorable extension du royaume. Au XVIIIe
siècle, les petites principautés voisines sont annexés par
la force, et le Rwanda peut prétendre faire jeu égal avec le Bunyoro,
encore puissant à cette époque. Sa politique expansionniste sera encore
attestée au XIXe siècle. |
Burundi
- L'histoire du pays est assez analogue à celle du Rwanda. Jusqu'au XIXe
siècle, la caste dominante est recrutée, comme dans l'État voisin,
chez les propriétaires de bétail, les Tutsi. Le pays a connu une expansion
de même importance que celle du Rwanda. Seules les méthodes ont peut-être
fait la différence. Ici, on a misé davantage sur les alliances, et moins
sur les guerres. Encore que celles qui ont épisodiquement opposé le Burundi
à son bouillant voisin aient constitué des jalons importants de
son histoire. On notera encore qu'au Burundi, l'opposition Hutu/Tutsi
a structuré la société de façon moins rigide qu'au Rwanda. Et
l'on verra même apparaître au XIXesiècle
un pouvoir - celui des Ganwa - qui maintiendra sa domination, par delÃ
l'époque coloniale, et qui s'est présenté comme n'étant ni tutsi, ni
hutu. |
Les sources
du Nil - Le Nil proprement dit démarre à Jinja, sur la rive nord
du lac Victoria. Mais ce lac étant alimenté par diverses rivières, on
considère en général que les sources du Nil se situent plutôt à la
source de la plus longue d'entre elle, au Burundi. Il s'agit de la rivière
Ruvubu, qui se prolonge par la Kagera, qui elle-même se jette dans le
lac Victoria. La découverte des sources du Nil a été en Europe, et dans
toute l'aire méditerranéenne, une interrogation récurrente depuis l'Antiquité.
Elle n'a trouvé sa réponse qu'au XIXe siècle, en même temps
que la connaissance de l'hydrographie du haut-Congo et du Zambèze, grâce
à quelques missionnaires et explorateurs qui ont laissé leur nom dans
l'histoire : David Linvingstone (1813-1873),
John
Stanley (1841- 1904), et surtout
Richard
Burton (1821-1890) et John Speke, mandatés
par la Royal Geographical Society, dans le but explicite était
bien cette découverte. C'est Speke (1827- 1864), finalement, qui
atteindra le premier en 1858 la rive sud du lac Victoria, puis en
1862
le Buganda ( L'exploration
de l'Afrique).
Alan Moorehead, The White Nile, Dell, 1960.
A la fin du XIXe
siècle, à la suite du partage colonial entre l'Allemagne et
la Grande-Bretagne, le Rwanda et le Burundi sont devenus des colonies allemandes.
Au lendemain de la Première
Guerre mondiale, ces deux pays (ainsi que le Tanganyika, lui
aussi allemand) sont passés sous l'administration de la Socité des Nations.
Celle-ci a ensuite délégué cette administration à la Belgique (l'adminsitration
du Tanganyika revenant à la Grande-Bretagne).
Les
chefferies et tribus du Rift
Les régions qui
se situent sur les plateaux intérieurs de l'actuelle Tanzanie et du Kenya
n'ont pas connu de véritable unité politique jusqu'au XXe
siècle. On y rencontre seulement de petites
entités. Entre les grands lacs et la mer on trouve plusieurs petits royaumes,
Oukambani et Oumasat, Outeïta au pied du Kilimandjaro; plus au sud, des
chefferies qui concluent à l'occasion - c'est-à -dire sous la pression
de menaces extérieures (raids Galla, Masaï, Zimba, Kamba, etc) - des
alliances entre elles, comme celle des Zaramo et les Shambaa au XVIIe
siècle, qui s'érigent parfois en éphémères
royaumes tel celui d'Ugweno fondé par les Pare du Nord à la fin du XVIe
siècle, ou en confédérations
plus ou moins lâches, comme comme celles de Hehé, poussés à l'union
vers le milieu du XVIIIe
siècle par la montée en puissance, au
Sud, des Zulu (= Nguni septentrionaux), et de toutes façons se côtoient
en menant des modes de vie parfois très opposés. Ainsi rencontre-t-on
sur un espace, il est vrai assez étendu, une nébuleuse de groupes d'agriculteurs-éleveurs
bantous, tels que les Nyamwezi et quelques autres (Kikuyu, Sukuma, Hehe,
Makonde, etc.), aussi bien que des populations nomades d'éleveurs
apparentées aux Nilotiques, telles que les Nandi et les Iraku, sans parler
des Masaï dispersés sur le territoire le plus grand, et qui sont les
plus célèbres.
A la fin du XIXe
siècle cette région a connu une succession
de calamités naturelles (sécheresse, sauterelles) et d'épidémies :
peste bovine (1890-1891),
variole, trypanosomiase, qui ont affaibli ces populations
au point de faciliter grandement l'implantation coloniale. Mais auparavant,
elle aura été l'espace à travers lequel été tracées l'une des
grandes routes commerciales entre les villes arabo-swahili de la
côte et les royaumes de l'intérieur. Les Kamaba,
puis le Buganda en contrôlent une au Nord, entre Mombasa et le pays Kikuyu,
les Yao, au Sud en contrôlent une autre qui mène de Kilwa
Kisiwani jusqu'au lac Malawi et au Katanga . La troisième est celle
qui contourne la steppe Masaï et traverse, en passant par Tabora (= Kazeh,
à l'époque), le pays Nyamwezi. A Tabora un relais est créé vers 1830.
La route s'y sépare en deux itinéraires : l'un vers le Nord et le Buganda,
l'autre vers Ujiji, sur la rive orientale du Tanganyika, qui
devient un centre de diffusion vers tout le bassin du Haut-Congo. Tabora
et Ujiji, où sont délégués des cadis venus d'Oman seront à la fois
des pôles d'islamisation et les plaques tournantes du trafic caravanier
(étoffes, perles, fil de laiton sont introduits en échange
d'ivoire et d'esclaves). Ujiji sera également le point de départ de l'aventure
d'un trafiquant arabo-swahili Hamed Ben Mohammed
el-Murjebi ( = Tippu Tip) qui et fonde sur l'autre rive un petit
royaume qu'il dirigera de 1870
à 1884...
Les Nyamwezi.
Les Nyamwezi (=
les gens de la lune), qui vivent à l'Est du lac Tanganyika forment
un ensemble de chefferies appartenant au même groupe linguistique, et
plus ou moins réunies en confédération au XVIIe
siècle. Ils sont traditionnellement le relais des commerçants
arabes de la Côte avec les populations des régions centrales de l'Afrique.
lIs se spécialisent dans le portage des produits tels que le miel, les
peaux, l'huile des bords du Tanganyika, le sel de l'Uvinza ou encore les
houes du Buha et du Buzinza. En 1871,
les Nyamwezi s'emparent du relais arabo-swahili
de Tabora sous la conduite d'un certain Mirambo qui en
fait la première étape de la constitution d'un petit royaume (capitale
: Urambo). Pendant quelque temps, il contrôlera les routes esclavagiste
d'Ujiji et du Buganda. Mais le royaume disparaîtra en même temps
que son fondateur, en 1884. A
peu près à la même époque, un autre Nyamwezi, le chef de la tribu
Yéké marche sur le Katanga et s'empare de ses mines de cuivre.
Son fils Msiri, conquiert également une partie du royaume Luba déjÃ
chancelant et y crée son propre royaume, dont la capitale - surtout un
comptoir commercial, nouvelle plaque tournante du commerce des esclaves,
de l'or, du cuivre et de l'ivoire en direction de Zanzibar et des ports
de l'Océan Indien - sera Bunkeya. Msiri est tué en 1891
et son royaume est annexé au Congo belge.
Les Masai.
Les Masai ou Massaï
parlent une langue nilo-hamitique, le maa. Venus du Nord - certainement
de la région du lac Turkana -, ils font irruption dans la région
des Grands lacs en même temps que les Teso, qui s'installent au Buganda,
aux côtés de Karamojong, aux XVIIe
et
XVIIe
siècles. De traditions belliqueuses, ils exerceront
une pression guerrière constante sur les populations locales. L'extension
de leur territoire se stabilise dans les années 1830,
quand leur marche vers le Sud se trouve stoppé par des bandes de pillards
Nguni originaires du Natal, et poussés vers le Nord
par les troubles qui règnent à cette époque en pays Zoulou. Cela a eu
pour effet d'entretenir de nouvelles guerres avec ceux dont ils occupaient
désormais les territoires, et qui ont finalement été rejetés dans le
Kavirondo et dans le Lykipia (entre le mont Kenya et le Baringo).
Guerriers
Masaï.
La société
politique masaï traditionnelle est structurée autour de compagnies de
guerriers, dont le chef est responsable des affaires civiles et militaires.
Les guerriers (elmoran) comprennent
des jeunes gens au-dessous de vingt-cinq ans; après la circoncision ,
ils sont envoyés au camp des guerriers, on ils vivent exclusivement de
viande et de laitage. Les guerriers sont armés d'une lance, d'une épée
et d'un grand bouclier ovale orné de dessins héraldiques; ils portent
sur la tête un collier de plumes d'autruche, et ont d'autres ornements
de plumes ou de poils aux épaules, aux genoux, aux chevilles; ils s'enduisent
le corps d'une couche d'argile et portent de nombreux ornements. Les Masaï
ont des sorciers et n'enterrent pas leurs morts.
Au moment des troubles
qui ont agité la région, dans le deuxième tiers du du XIXe
siècle, on a décrit les Masaï comme
"la terreur de toute l'Afrique orientale"; ils n'ont, semble-t-il d'autre
occupation que le pillage. On évaluait alors leur nombre à 500 000. Ces
compagnies de guerriers s'associaient parfois pour former des tribus dans
lesquelles les tâches se partageaient entre guerriers et pasteurs. Quelques
unes ont survécu. Les Masaï sont ainsi divisés aujourd'hui en Arusha,
Ilmaasaï, Kwavi et Samburu. Les
Arusha sont devenus agriculteurs au début du XIXe
siècle.
-
Explorations
en Pays Masai
Les missionnaires
Rebmann (1847) et Krapf (1849) ont
étudié, les premiers, le pays des Masaï; le premier découvrit le mont
Kilimandjaro, le second le Kenya, et vers 1851 le fleuve Tana; après
eux, il faut citer les voyages du baron von der Decken
et du docteur Kersten (1862-65); des missionnaires Wakefield
(1865) et New (1870), du naturaliste Hildebrandt (1877),
du docteur Fischer, qui, en 1882-83, pénétra jusqu'au lac
Naïvacha; de Joseph Thomson qui, en 1883-84,
explora les lacs Naïvacha et Baringo, reconnut le Kenya et s'avança jusqu'au
lac Victoria Nyanza; de Johnston, qui s'est attaché à l'étude du Kilimandjaro
(1884); du comte Teleki et de Höhnel, se rendant au lac Rodolphe
(1887-99); du docteur Peters, qui a été de Vitou au lac
Baringo, puis au Kavirondo (1889); des agents de la Compagnie britannique
de l'Afrique orientale, Jackson (1888-90), Pigoti (1889),
Lugard (1890), Eric Smith (1891), Dundas (1891); de
Höhnel et Astor Chanler (1892-93), de Gregory (1893),
des docteurs Stuhlmann (1892) et Baumann (1892-93),
qui traversèrent la partie occidentale du pays des Masaï ( L'exploration
de l'Afrique). |
Les traités conclus
entre l'Angleterre et l'Allemagne dans les années 1890
ont partagé le pays des Masaï entre les sphères d'influence de ces deux
puissances. Des stations anglaises ont été fondées le long de la Tana,
dans l'Oukamboni, etc. Une ligne télégraphique a été installée de
Mombasa à l'Ouganda. La construction d'un chemin de fer entre Mombasa
et le lac Victoria a été décidée; le trajet en a été fixé par les
travaux des capitaines Macdonald, Pringle, etc. (1892).
Les Masaï ont peu à peu pris l'habitude de laisser passer les caravanes
sans les molester. Quelques chefs ont conclu des traités avec le gouvernement
britannique.
Les Yao et leurs
voisins.
Les Yao vivent au
sud de l'actuelle Tanzanie près du lac Nyassa (Malawi), les Makwa, islamisés,
plus à l'Est, près de la côte. Ces deux populations ont activement participé
au trafic d'esclaves avec les marchands arabes, puis les européens. Ils
contrôlait la route méridionale de ce commerce en direction des villes
swahili. Les Yao, organisés en chefferies, très belliqueux, s'y sont
montrés particulièrement actifs. Autour du lac Nyasa vivent également
les Maravi, les Tchewa et Toumbouka, chacun ayant eu à une époque ou
une autre une certaine puissance.
-
Femmes
du Tankanyika, vers 1920.
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Joseph
Thomson, Au
Pays des Massaï, Voyage d'exploration à travers les montagnes neigeuses
et volvaniques et les tribus étranges de l'Afrique équatoriale,
L'Harmattan, 2004. - Le pays des Massaï est resté
de nombreuses décennies sans qu'aucun Européen n'ait osé tenter l'expédition
dans ces "mystérieusescontrées de l'intérieur" alors que les côtes
de l'Afrique centrale ( L'exploration
de l'Afrique )
avaient déjà été découvertes depuis Vasco de Gama.
Une telle expédition était jugée trop hasardeuse et coûteuse, bien
que les récits des trafiquants d'indigènes promissent "une riche moisson
de découvertes à l'homme qui oserait regarder en face les terribles Massaï
et réussirait à s'ouvrir à leur pays" ( La
région des Grands Lacs ).
C'est
mandaté par la Société royale de géographie à Londres
pour une expédition purement géographique que Joseph
Thomson met pied au pays des Massaï, sa mission étant de présenter
un travail sur la possibilité d'y faire passer une caravane et de vérifier
qu'il existât une route praticable aux voyageurs européens pour relier
un des ports de la côte au Victoria Nyanza.
Le
livre est étayé de gravures, dont une partie provient des photographies
prises par l'auteur, et de la carte qu'il a élaborée à l'aide des documents
recueillis au cours de l'expédition. Il reprend les informations qu'il
a pu rapporter sur le mont Kenya, la météorologie, la géologie ,
l'histoire naturelle et l'ethnologie tout en racontant
de quelle façon, et dans quelles conditions et pourquoi il a effectué
ce travail.
Joseph
Thomson a écrit cet ouvrage à 26 ans, suite à sa troisième expédition
en Afrique, et après la publication d'un premier ouvrage : Aux lacs
de l'Afrique centrale. La première édition de Au pays des Massaï
date
de 1886.(couv.).
Xavier
Péron, Je
suis un Maasaï, Arthaud , 2007.
T.
Saitoti, Ma
vie de Guerrier masaï, Le Rocher, 2004. - Dans
les plaines de Serengeti - dont la verdeur luxuriante à la saison des
pluies et la cruelle aridité à la saison sèche sont pareillement peuplées
de dangereux animaux sauvages - un enfant grandit, chargé par son père
sévère et traditionaliste de garder le bétail, les moutons et les chèvres.
Le
petit Ole s'accommode de son mieux des errances et des épreuves de la
vie nomade des Masaï, tout en se comportant comme tous les enfants du
monde - même si après la mort de sa mère, il est soumis à l'autorité
des diverses épouses de son père. A contrecoeur, il doit quitter sa famille
et s'aventurer dans l'inconnu, car il est choisi pour s'en aller étudier
dans une école publique, où nous le voyons, lui, l'enfant d'une culture
orale, succomber, émerveillé, à la magie de la parole écrite. Il passe
ensuite dans une école tenue par des missionnaires où on l'encourage
à renoncer aux moeurs traditionnelles de ses ancêtres pour adopter les
croyances "civilisées" des enseignants - et se faire baptiser.
Jeune
homme, à présent, il retourne dans sa famille, mais il est désormais,
de diverses manières qu'il n'imaginait même pas, transformé par son
expérience. Ce qui ne l'empêche pas d'être circoncis
et initié aux pratiques des hommes de son peuple, grâce auxquelles il
devient gardien d'une réserve naturelle et fait la chasse aux braconniers
; peu à peu, son univers s'élargit à la faveur de rencontres avec des
visiteurs étrangers.
Il
est choisi, encore une fois, pour représenter son peuple dans un film
de la National Geographic Society, puis il se retrouve à Munich où il
apprend l'allemand ; un concours de circonstances l'envoie en Amérique
où, grâce à une dispense spéciale, il peut suivre des études universitaires
qui lui permettront d'écrire un livre témoignant de la culture de son
peuple, avant de regagner la Masaïland, afin d'aider ce peuple à survivre.
(couv.). |
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