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Frédéric
Cailliaud,
voyageur né à Nantes le 9 juin
1787, mort à Nantes le 1er mai 1869.
II était d'une humble origine, son père exerçant la
profession de serrurier-mécanicien. Attiré de bonne heure
par ses goûts vers les sciences naturelles, il commença par
apprendre seul la géologie et la minéralogie. Il se rendit
à Paris en 1809, pour y parfaire ses
études. Au bout de quatre ans, déjà possesseur d'une
grande somme de connaissances, il voulut les augmenter et entreprit dans
ce but des voyages qui lui firent connaître la Hollande, l'Italie,
la Sicile, la Grèce en partie, la Turquie d'Europe et la Turquie
d'Asie. L'année 1815 le conduisit en Égypte, où il
trouva faveur près du pacha, le célèbre Mohammed-Ali
(Méhémet-Ali), qui le chargea
de parcourir les déserts qui bordent les deux rives du Nil, afin
de faire quelques découvertes. Il pénétra dans la
Nubie
jusqu'aux dernières cataractes et explora les monuments qu'on y
trouve. Ce n'était là qu'une partie de sa tâche, et
le grand désert de la rive Ouest l'attirait ( L'exploration
de l'Afrique ).
Mais auparavant il eut la bonne fortune
de retrouver, au mont Zabarah, les fameuses
mines d'émeraude exploitées dans l'antiquité égyptienne,
source de grands revenus pour les Pharaons, fort vantées par les
auteurs classiques, par les écrivains arabes, et ayant laissé
dans la mémoire du peuple l'une de ces fantastiques réputations
si communes en Orient. Cailliaud les retrouva telles qu'elles étaient
au moment où les travailleurs les avaient abandonnées sous
les Ptolémées. Il surprit les
secrets de l'exploitation et trouva les instruments dont on se servait.
Les galeries souterraines atteignaient une grande profondeur; elles étaient
assez spacieuses pour permettre à quatre cents ouvriers d'y travailler
à la fois, et elles contenaient à profusion des cordages,
des paniers, des meules, des leviers, des autels
de toute sorte, des vases, des lampes, des meubles, etc.
Le voyageur voulut se donner à lui-même
le plaisir de continuer l'exploitation et réunit jusqu'à
dix livres d'émeraudes. Mais, malgré ce succès relatif,
l'exploitation n'a jamais été reprise pour la raison plausible
qu'elle ne rapportait plus assez pour compenser les frais. Près
des mines se trouvait une petite ville qui devait être habitée
par les mineurs : au milieu de la ville, on voyait des temples gréco-égyptiens
avec des inscriptions. Fier de ce premier succès, il résolut
de suivre, sur l'indication des Arabes de la tribu des Abadeh et des Bischarris,
une route qui conduisait les caravanes de la ville de Coptos
(auj. Keft) à une autre ville sur les bords de la mer. Cette seconde
ville n'était autre que la ville de Bérénice, et la
route était celle qui servait au trafic de l'Égypte avec
les contrées de l'extrême Orient, sous le 24° de latitude
environ, et près de la montagne d'Elbé.
Pendant tous ces voyages, Cailliaud prit
le plus grand soin de faire des observations géologiques et minéralogiques,
de décrire les moeurs des pays, de dessiner les costumes, de dresser
un itinéraire avec des cartes, de copier les inscriptions. Quand
il revint en France, il avait un portefeuille bourré de documents
et une collection considérable d'antiquités achetées
sur les lieux, principalement à Thèbes. Le tout fut acquis
par le ministère de l'instruction publique et confié à
Jomard
pour être publié comme une suite du grand ouvrage de la commission
d'Égypte. Cette publication parut en 1821, en 2 vol. in fol., sous
le titre : Voyage à l'oasis de Thèbes, dans les déserts
situés à l'Orient et à l'Occident de la Thébaïde,
fait pendant les années 1815, 1816, 1817 et 1818.
Arrivé à Paris
à la fin de février 1819, Cailliaud était déjà
de retour en Égypte à la fin de la même année,
chargé d'une mission scientifique de la part du gouvernement français.
Il porta ses recherches du côté des oasis, sous la protection
du pacha et la conduite d'un habitant de l'une de ces oasis, qu'il avait
trouvé dans la ville de Fayoum .
Pendant quatre mois, il parcourut les déserts, allant de Syouah
à Falafré, de Dakhel à El-Khargeh, levant les plans
des temples, entre autres celui de Zeus-Ammon,
si célèbre par le voyage qu'y voulut faire Alexandre
le Grand, et recueillit tous les matériaux scientifiques qu'il
lui était possible de recueillir.
Il revenait de ce voyage au mois
de mars 1820, lorsqu'il entendit parler de l'expédition que le pacha
d'Égypte se préparait à envoyer dans la haute Nubie ,
sous la conduite de son fils, lsmaïl-bey. Il sollicita de Mohammed-Ali
la faveur d'accompagner le jeune général, et elle lui fut
accordée. Il visita Méroé
et arriva presque au 10e degré de
latitude Nord.
Une
des pyramides de Méroé.
Les résultats et les observations
de son voyage dans les oasis furent publiés par Jomard sous ce titre
Voyage
à l'oasis de Syouah (in-fol, avec planches). Cailliaud publia
lui-même son Voyage à Méroé, au fleuve Blanc,
au delà de Fazogl, dans le midi du royaume de Sennar, à Syouah
et dans les cinq autres oasis, fait dans les années 1819, 1820,
1821 et 1822 (1826-1827, 4 vol. in-8, avec cartes et planches in-fol.).
Quoiqu'il ne fut pas un égyptologue de profession, car la découverte
de Champollion n'était pas encore
faite, Cailliaud copia une foule d'inscriptions, rapporta des monuments
de toute sorte, entre autres une momie
couverte d'inscriptions hiéroglyphiques
avec traduction grecque, qui servit beaucoup aux études de Champollion.
Il publia les résultats de ses observations
sous le titre de Recherches sur les arts et métiers, les usages
de la vie civile et domestiques des anciens Égyptiens (1823,
in-fol.); puis il développa ce même ouvrage, le dédia
au roi et le publia sous ce nouveau titre : Recherches sur les arts
et métiers, les usages de la vie civile et domestique des anciens
peuples de d'Égypte ,
de la Nubie
et de l'Éthiopie ,
suivies de détails sur les moeurs et coutumes des peuples modernes
des mêmes contrées (1837, in-4, avec planches coloriées).
Cailliaud se retira dans sa ville natale,
y vécut paisiblement dans les fonctions de conservateur du musée
et y mourut à la date indiquée plus haut. Son nom a été
attaché à plusieurs ostraca, déposés
au Louvre et dont quelques-uns contiennent
des textes intéressants.
(E. Amélineau).
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En
librairie - Frédéric
Cailliaud, Voyage à Méroé et au fleuve blanc
(4 tomes et 1 atlas), fac simile de l'édition royale de 1823-27,
Phénix Editions, 2003. |
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