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En-Nasir Salah-eddin
Yousouf Ibn Ayyoub, connu en Occident sous le nom de Saladin est
le premier sultan ayyoubite d'Égypte
(Les
dynasties musulmanes au Moyen-âge), né à
Tikrit (Irak) en 1137, mort à Damas
en 1193. Ce Kurde, fils de Nadjim eddin Ayyoub, entra au service de l'atabek
Nour-eddin dont il devait continuer les exploits.
Quand le calife fatimide d'Egypte el-Adid,
pressé par les Francs, demanda secours à Nour-eddin, celui-ci
lui dépêcha Chirkouh qui prit le titre de grand vizir et mourut
peu après. Le neveu de Chirkouh, Saladin, qui l'avait suivi en Egypte,
lui succéda, et, à la mort du calife
- dont on l'accusa - il supprima le califat du Caire,
obéissant en cela aux ordres de Nour-eddin (1171). La mort de ce
dernier, que les menées de son lieutenant commençaient à
inquiéter, laissa le champ libre à Saladin.
Peu à peu il soumit la Syrie et
la Mésopotamie, s'empara de Damas (1174), Alep (1183) et assiégea
Mossoul. Il fut reconnu comme sultan d'Egypte et de Syrie. En même
temps, Saladin devait faire face aux croisés qui lui infligèrent
un sanglant échec près de Ramallah (1177) et le harcelèrent
de tous côtés. Une trêve fut conclue en 1179 qui permit
au sultan de guerroyer dans la Syrie du Nord, puis une autre en 1184.
Renaud de Châtillon,
seigneur de Karak au delà du Jourdain, rompit la trêve en
pillant une caravane musulmane dans laquelle était une soeur de
Saladin. Le sultan saisit ce prétexte pour envahir le royaume
de Jérusalem. En 1187, il remporta à Hattin, près
de Tibériade, une victoire décisive, s'emparant de la sainte
croix, faisant prisonnier Guy de Lusignan, roi
de Jérusalem, les grands maîtres des ordres du Temple
et de l'Hospital et une foule de chevaliers,
dont Renaud de Châtillon, qu'il tua de sa main. A la suite de ce
succès, il entra à Jérusalem,
enleva Ascalon, Saint-Jean-d'Acre, Saïda,
Beyrouth et la majeure partie du Nord de
la Syrie.
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Saladin
défait les cavaliers chrétiens et prend Jérusalem,
le 2 octobre 1187.
(Miniature
persane du XVIe siècle).
L'Occident s'émut et expédia
la troisième croisade. Les troupes
de Philippe-Auguste et de Richard
Coeur de Lion reprirent Acre, Césarée et Jaffa. Une trêve
fut conclue en 1192, et peu après mourait Saladin qui fut enterré
à Damas. Ses fils se partagèrent son vaste royaume : el-Afdal
régna à Damas, el-Aziz au Caire, ez-Zahir à Alep.
Mais bientôt Saif-eddin al-Adil (le Safadin des croisés),
frère de Saladin, qui dominait en Mésopotamie, supplanta
ses neveux à Damas et au Caire.
La
légendes de Saladin.
La valeur guerrière de Saladin
unie à ses vertus de piété et de justice lui assurèrent
jusque dans les pays chrétiens une éclatante renommée
qui le rendit aussi populaire que son rival le plus redouté, Richard
Coeur de Lion. Les récits fabuleux sur le destructeur du royaume
de Jérusalem occupent une place importante à l'aurore de
la littérature française.
Les plus anciens sont empreints de malveillance
: le fameux sultan aurait dû sa situation aux faveurs d'une femme
de Nour-eddin. Mais bientôt la légende devient sympathique.
On célèbre ses vertus, les prêtres vantent sa générosité,
son admiration pour les croisés, ses adversaires; on prétend
qu'il se fit armer chevalier.
A partir du XIIIe
siècle, on explique très nettement que Saladin fut frappé
de la beauté du culte chrétien et de l'excellence de la religion
chrétienne, mais qu'il en fut détourné par le spectacle
des moeurs des prêtres et particulièrement des prélats.
«
Les récits des visites de Saladin aux chrétiens, dit Gaston
Paris, deviennent ainsi des espèces de Lettres persanes, où,
tout en exaltant la religion chrétienne, on fait critiquer par le
Sarrasin certains abus auxquels elle donne lieu ou certaines négligences
de la part de ceux qui devraient le mieux la pratiquer. »
Le héros Saladin - à qui l'on
finit par trouver une origine française (la famille de Ponthieu)
et que l'on fait même venir en France - fournit la matière
d'une série de romans qui se poursuit du XIIIe
au XVe siècle. Au XIIIe
siècle, on appelait Pas Salhadin une peinture dont on ornait volontiers
les « salles » des châteaux et qui représentait
une douzaine de chevaliers dont Richard Coeur de Lieu, arrêtant dans
un défilé ou nas toute une armée sarrasine.
(R Dussaud). |
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